EDITH LEFEL

Paris, le 23 décembre 1999 - Amour, tolérance et bonté. Voilà les trois mots clés qui ont servi à modeler le nouvel album de la diva caribéenne. Plus zouk que jamais, avec une ouverture inattendue sur la salsa, l'album "A fleur de peau" (Globe Music/Sony) raconte le rêve éveillé d'une des plus belles voix des Antilles françaises. Elle espère un monde meilleur pour les Hommes et pour ses enfants, auxquels elle dédie un des douze titres qu'elle nous a concoctés avec passion ("Sé pou yo") pour cette fin de siècle.

A fleur de peau

Paris, le 23 décembre 1999 - Amour, tolérance et bonté. Voilà les trois mots clés qui ont servi à modeler le nouvel album de la diva caribéenne. Plus zouk que jamais, avec une ouverture inattendue sur la salsa, l'album "A fleur de peau" (Globe Music/Sony) raconte le rêve éveillé d'une des plus belles voix des Antilles françaises. Elle espère un monde meilleur pour les Hommes et pour ses enfants, auxquels elle dédie un des douze titres qu'elle nous a concoctés avec passion ("Sé pou yo") pour cette fin de siècle.

"A fleur de peau" est-il un concentré d'Edith à fleur de mots? Une nouvelle prière? Une pièce d'espoir?
"A fleur de peau", c'est comme une renaissance. C'est comme un bébé qui arrive dans le monde, qui découvre la vie, parce que je reste persuadée qu'on apprend tous les jours. La vie est un combat. Lorsqu'on croit être arrivé, on se rend vite compte qu'on n'est arrivé nulle part. Et que c'est un éternel recommencement comme on dit.
Je pense en même temps que cet album a grandi avec moi. J'espère qu'on peut y retrouver le plus de douceur possible par ces temps d'agressivité et de violence. Il y a une telle tension dans ce monde que je tenais à ce que cet album soit vraiment comme une caresse, comme une douceur. Avec les années, avec l'âge, on a envie de parler d'autre chose.

L'album de la maturité?
Pas spécialement. Je dirais… l'album de la période que je suis en train de vivre. "A fleur de peau" parce que c'est peut-être une période où je suis plus sensible. Il est toujours question de rêve mais dit autrement. Par exemple dans la chanson "Viens rêver", je parle de la vie de tous les jours, quand certains jours je n'ai pas envie de me lever, de sortir. J'ai besoin de prendre le temps de rêver, de me retrouver, d'être un peu seule, à deux ou avec mes enfants. J'ai besoin de prendre le temps ! C'est donc un album qui est très proche de moi en fait.

D'abord "la Foule". Ensuite, "Non, je ne regrette rien". Reprendre Piaf en version salsa, n'est-ce pas un peu osé?
C'est certainement osé. Mais si je peux le rappeler, "la Foule" était déjà une chanson qu'Edith Piaf reprenait. Un artiste doit avoir le droit d'exprimer ce qu'il souhaite, comme il l'entend. Et ça passe bien si on le fait avec respect et avec foi, si on le fait vraiment avec admiration. Edith Piaf, c'est quelqu'un que j'admire beaucoup, que je continue à écouter régulièrement.

Reprendre Piaf, l'interpréter en français et sous tempo latino, on pourrait vous accuser de vouloir coller à la mode actuelle du tout latino par exemple…
C'est vrai qu'il y a des gens qui pourraient le dire. Effectivement, je crois qu'il n'y a aucune honte à prendre le train en marche. C'est tellement difficile de passer sur les ondes qu'il faut tout essayer pour passer un peu plus en radio. C'était aussi une opportunité pour moi grâce à Ronald Rubinel, qui a réalisé l'album et qui, depuis deux ans, allait régulièrement travailler à Cuba (où il a enregistré son CD "Ronald à Cuba", ndlr). Je trouvais tout à fait normal qu'il réalise pour moi un titre avec des Cubains, comme il l'avait fait déjà pour lui sur ses albums. Les gens pensent que c'est nouveau mais en fait, il y a sept ans, sur l'album "Meci", il y avait déjà une salsa. C'était une salsa originale qui s'appelait "Ti chou".

Vous interprétez aussi "Si j'étais un homme" de Diane Tell sur cet album…
C'est une reprise qui me tenait à cœur. Diane Tell fait partie de mes coups de cœur, des gens que j'aime. Ce sont des chansons que je chante régulièrement à la maison. A la limite, je me demande pourquoi on ne m'a pas composé une chanson comme ça un jour. Je me fais plaisir tout simplement.

Votre album, tout en restant très ouvert, fait quand même la part belle au zouk, à un moment où cette musique commence à perdre un petit peu de sa force. Plus zouk que jamais, n'est-ce pas un petit paradoxe dans le monde de la musique antillaise aujourd'hui?
Pas du tout. J'ai commencé dans le zouk, même si aujourd'hui, je chante en français et en anglais. Je suis quand même née dans cet univers caribéen du compas et du zouk. Alors, je ne vais pas me mettre subitement à faire totalement autre chose. Ce qu'il y a, c'est que le zouk est de moins en moins bien perçu, certainement parce qu'il y en a beaucoup trop. Mais ce n'est pas pour ça que je vais m'interdire d'en faire. Et puis aux Antilles et ailleurs, on danse encore sur le zouk dans les soirées. Je pense aussi à ce public, qui, à chaque fois qu'il me rencontrait, me demandait quand le nouvel album allait sortir. En ce qui me concerne, ce qui est important, c'est d'avoir cette possibilité de pouvoir faire ce qu'on veut quand on veut.

Sur ce disque, on trouve la patte de Tony Chasseur.
C'est quelqu'un que j'aime beaucoup. Avec lui, j'ai beaucoup de plaisir à travailler. On a fait beaucoup de chœurs, de séances en studio ensemble. C'est aussi un ami. Et il m'a proposé des compositions qui m'ont plues. C'est quelqu'un qui a une certaine sensibilité, qui me comprend en fait, qui est allé dans le sens où j'avais envie de chanter… Je tenais à ce qu'il y ait des invités comme Gilles Voyer (qui était déjà sur l'album "Rendez-vous") ou Dominique Zorobabel, une des chanteuses de Zouk Machine. Je crois qu'un album doit être une rencontre. C'est plus facile certainement pour les droits d'auteurs d'être tout seul sur un album. Moi j'aime bien faire des choses différentes, avoir des couleurs différentes, des sensibilités différentes, sur mes albums. Comme mes autres albums, j'ai invité du monde. Donc là on retrouve Jean-Philippe Marthély encore, parce que j'avais envie de continuer à travailler avec lui ou Sylviane Cédia qui est une chanteuse guyanaise que j'aime, que j'ai revue avec plaisir sur les tournées de Malavoi et qui a accepté de faire un duo avec moi. Il y a Mario Canonge qui apporte une autre couleur dans la chanson "Pou qui". C'est encore une autre sensibilité. Ce sont des gens que j'aime. En général, quand on fait une fête à la maison, on invite des gens qu'on aime bien. Il n'y a pas de raison qu'on reste tout seul dans son coin.

Propos recueillis par Soeuf Elbadawi.