SAMIA FARAH, C'EST QUI?

Paris, le 3 février 2000 - Une nouvelle voix est apparue depuis quelques mois sur la scène française. Celle de Samia Farah, jeune chanteuse d’origine tunisienne dont le premier album rasta-jazzy fait battre nos tympans de bonheur.

Une voix entre jazz, soul et reggae

Paris, le 3 février 2000 - Une nouvelle voix est apparue depuis quelques mois sur la scène française. Celle de Samia Farah, jeune chanteuse d’origine tunisienne dont le premier album rasta-jazzy fait battre nos tympans de bonheur.

C’est dans la cave d’une petite salle parisienne le Sentier des Halles que Samia Farah présente en chair et en voix son premier album. Un tout petit bout de bonne femme au milieu de six bonhommes fort bien pourvus en dread locks. On dirait une chanteuse pygmée cernée par des musiciens masaï. Sensation de vertige. Etourdissement confirmé lorsqu’on entend les notes poussées par ce rossignol de Tunisie.

Vêtue de noir - de la crinière qu’elle porte longue jusqu’aux chaussures – elle laisse s’échapper de sa gorge des notes dignes de Nina Simone ou (plus proche de la scène française) de Princess Erika. Cela tient sans doute au voile léger qui enrobe ses cordes vocales. Pink Martini et Paris Combo le prouvent, le temps est aux voix flûtées et un tantinet traînantes.

En cela, Samia Farah est bien de notre époque, chantant avec une pointe d’affliction et une louche d’ironie ses peines “Les temps difficiles” (reggae), ses craintes “Je me méfie / Je ne doute pas de mon ennemi quand je sais ce qu’il vaut / je me méfie un peu trop c’est le meilleur de mes défauts” et ses espoirs “Rien n’est acquis / Dans la vie rien n’est acquis, rien n’est dû mais rien n’est perdu d’avance, la vie peut sourire à ceux qui saisissent leur chance”. A ce moment, un lutin sur sa droite porte à sa bouche d’or une flûte traversière, une trompette ou un sax qui rehausse son reggae-style de touches jazzy. Elle, préfère se munir d’un accordina, sorte d’accordéon de bouche, qui donne à l’ensemble un ton merveilleusement désuet comme son sample d’Al Green “Let’s stay together” sur “Je sais”. Les références Stax ou Motown ne manquent d’ailleurs pas à la culture de la demoiselle. Pour preuve, ces chœurs langoureux “In Our Lifetime” repiqués à Mister Marvin Gaye, ou la mélodie joliment réorchestrée de Gainsbourg dans un “Un jour comme un autre” et qui devient “Un autre comme un jour".

A l’évidence, cette jeune fille de 29 ans sait ce qu’elle veut et se donne les moyens pour parvenir à ses fins. Pleine de talent, c’est elle qui signe l’illustration de sa pochette : une fille fine, au gros cœur, débordant de flacons multicolores.
Dans la salle voûtée du Sentier, tout le monde se lève pour acclamer Samia Farah. La chanteuse revient en pousser une petite dernière. S’excuse de ne pas être “très loquace” et en signe de baiser à un public conquis, sourit de toutes ses lèvres charnues. Comme une promesse que de cette bouche généreuse sortiront encore longtemps d’autres belles notes.

“Samia Farah” Samia Farah / Small/Sony Music

Frédéric Garat