NOUVELLE-ORLÉANS JAZZ FEST

La Nouvelle-Orléans, le 9 mai 2000 – Voici que se termine le deuxième week-end du Festival de Jazz de la Nouvelle-Orléans avec sa foule bigarrée, ses parades, ses stands de nourriture et surtout un grand nombre d’artistes qui prennent un plaisir évident à se produire ici. Impressions.

Folie musicale dans le sud des Etats-Unis

La Nouvelle-Orléans, le 9 mai 2000 – Voici que se termine le deuxième week-end du Festival de Jazz de la Nouvelle-Orléans avec sa foule bigarrée, ses parades, ses stands de nourriture et surtout un grand nombre d’artistes qui prennent un plaisir évident à se produire ici. Impressions.

Ça sent les écrevisses à l’étouffée, les noix de pécan pralinées, les relents de bière. Les après-midi sont chaudes. Quelques uns (ou quelques unes) ont apporté des parapluies en guise de parasol. La poussière voltige au rythme des bourrasques de vent. Pour se rafraîchir, on a installé une tente qui diffuse une espèce de bruine salvatrice. Car ici, pas un seul arbre à l’horizon. Nous sommes au Fair Grounds, un hippodrome transformé à l’occasion du Jazz Fest en Woodstock sudiste. En bande ou en famille, on vient de tous les Etats-Unis pour assister à ce grand rassemblement. L’équipement de base du festivalier se résume à un chapeau (évitons les insolations), une chaise pliante (qui permet de ne pas tomber d’inanition) et la glacière pour les plus organisés.

Chaque jour, une foule canalisée par un important système de sécurité vient écouter quelques 65 concerts dispatchés sur onze scènes. Difficile de faire un choix entre tous car les styles de musique sont tellement éclectiques qu’il y en a pour tous les goûts, du zydeco (nous sommes en Louisiane !) au jazz en passant par le blues, la country, le reggae, le gospel, etc. Et beaucoup d’artistes prestigieux sont passés par là. La première édition du New Orleans Jazz & Heritage Festival eut lieu en 1968 pour célébrer le 250ème anniversaire de la ville et rassembla des noms comme Louis Armstrong, Dave Brubeck et Duke Ellington. Depuis la programmation a quelque peu évolué et s’est ouverte à toute sorte de style.

Rencontré à Lafayette au Festival International de Louisiane, le groupe Tanably de Côte d’Ivoire n’en revient pas d’être là. Constitué d’une dizaine de percussionnistes et danseurs, il fut repéré dans son pays d’origine par un des programmateurs du Jazz Fest. La troupe formée en 1992 n’avait jamais traversé l’Atlantique. Quelque quatre prestations à Lafayette, autant à la Nouvelle Orléans et les voilà flanqués d’un mini fan club. Car ici leur danse traditionnelle venue des montagnes ivoiriennes fait beaucoup d’effet. Les percussions donnent une dimension tribale qui n’échappe pas aux spectateurs médusés par la puissance physique qui se dégage de ces jeunes artistes. Car le Jazz Fest est un endroit où l’on peut découvrir de nouveaux talents même si dans l’ensemble, les artistes programmés font office de vétérans.

Il en est ainsi de Irma Thomas, grande prêtresse soul des années 60 qui possède d’ailleurs un club ici, Marva Wright, la Voix du blues, Aaron Neville qui cette année, déçut un peu ses aficionados en chantant des chants religieux accompagné par une bande enregistrée (on entendait même un chœur de gospel et la salle le cherchait des yeux !!!). La musique cajun et zydeco fut très dignement représentée avec les incontournables Steve Riley ou Chris Ardoin (entre autres). Quant à Buckweat Zydeco, sorte de James Brown local (surtout pour la mise en plis et l’énergie débordante du bonhomme) fit danser le two-steps à la quasi-totalité de l’assistance un peu usée par la journée et la chaleur. Mais il faut le dire, le public du Jazz Fest est très motivé. Ici on est enthousiaste devant chaque groupe ou artiste que l’on est venu voir. On est là pour faire la fête, voire se défouler. Même si Mardi gras est passé depuis quelques semaines, il en reste quelques séquelles. Le Jazz Fest est un bon moyen de prolonger la fête, tout en écoutant de la musique de grande qualité.

Relater l’ensemble des concerts serait impossible. Ceux de Lyle Lovett, Hermeto Pascoal ou de King Sunny Ade resteront longtemps inscrits dans nos mémoires comme des moments de grande intensité musicale. De celle qui vous transporte dans un monde irréel. D’ailleurs pour quelques-uns, le retour à la réalité semble difficile. Le festival terminé, des jam sessions s’improvisent dans les rues adjacentes. Un micro, une guitare, une batterie et les quelques irréductibles finiront la nuit sur le bitume de la Nouvelle-Orléans, encore groggy, désenchantés par la fin de cet événement, qui chaque année rappelle à tous que cette ville est un haut lieu de la musique dans le monde.

Texte et photos : Valérie Passelègue