NUITS D'AFRIQUE À MONTRÉAL
Montréal, le 18 juillet 2000 - Depuis le 13 juillet, et pour la 14ème année consécutive, le festival Nuits d'Afrique de Montréal investit la cité québécoise. Cette année, le festival a démarré sur des rythmes sud-africains et sénégalais, respectivement représentés par Miriam Makeba, marraine de cette édition, et de Nder et le Setsima Group. Retour sur les premières heures d'un festival chaud, chaud, chaud.
Allons, enfants du mbalax !
Montréal, le 18 juillet 2000 - Depuis le 13 juillet, et pour la 14ème année consécutive, le festival Nuits d'Afrique de Montréal investit la cité québécoise. Cette année, le festival a démarré sur des rythmes sud-africains et sénégalais, respectivement représentés par Miriam Makeba, marraine de cette édition, et de Nder et le Setsima Group. Retour sur les premières heures d'un festival chaud, chaud, chaud.
Les métropoles canadiennes connaissent une frénésie de manifestations à pareille époque. Ainsi dans la capitale économique du Québec, le festival de jazz vient à peine de se terminer que débutent simultanément les festivals "Juste pour rire" et "Nuits d'Afrique" qui céderont à leur tour la place aux Francofolies ! Tout est prétexte à réjouissances, y compris le 13 juillet qui a vu fleurir les bals musette à la française, réaffirmation touchante et politique d'une appartenance à la communauté francophone. Comme si le temps était compté pour nos "cousins d`Amérique". Comme s'il fallait emmagasiner en un été très court le maximum de calories culturelles, avant d'affronter le long hivernage.
A cet égard, la 14ème édition du festival international Nuits d'Afrique, qui se tient jusqu'au 23 juillet, y pourvoira. Et si le coup d'envoi de cette première soirée a été donné par Miriam Makeba, "Mama Africa", la marraine de la manifestation qui a délivré un beau concert, sa clôture a été assurée par l'étoile montante du mbalax sénégalais, Alioune Nder et son groupe, le Setsima. L'idole des jeunes de Pikine et autres faubourgs populaires de Dakar, ces 16-21 ans, ces "craignent-rien" comme on les appelle qui, sous l'effet de la crise endémique, posent, avec impatience, de plus en plus de questions à la société sénégalaise et n'ont pas redouté le jugement du "Dieu-président", Abdou Diouf, en portant à la présidence, Abdoulaye Wade.
Nder avait été la révélation de l'édition précédente où il s'était produit devant des milliers de personnes "en fusion", sur une des grandes places de la ville. Il tentait donc le pari d'une seconde apparition successive. Jeunes de la communauté sénégalaise venus se ressourcer à l'énergie des bougarabous (percussions) originels et mélomanes canadiens curieux de voir s'il n'avait pas changé se sont entassés dans le club Kola Note, situé dans les faubourgs de Montréal.
Nder avait été la révélation de l'édition précédente où il s'était produit devant des milliers de personnes "en fusion", sur une des grandes places de la ville. Il tentait donc le pari d'une seconde apparition successive. Jeunes de la communauté sénégalaise venus se ressourcer à l'énergie des bougarabous (percussions) originels et mélomanes canadiens curieux de voir s'il n'avait pas changé se sont entassés dans le club Kola Note, situé dans les faubourgs de Montréal.
Alioune Nder ou le Youssou N'Dour des jeunes générations. Formule de journaliste, une fois de plus. Car si, après une cassette et deux CDs (ce qu'a enregistré jusqu'ici cet artiste de 32 ans), le second chantait extatique, immobile, le premier en revanche est un vrai showman, meublant l'espace de la scène, interpellant le public. Souple, il n'hésite d'ailleurs pas à danser sensuellement. Le fruit de son travail de chanteur-danseur au sein de Lemzo Diamono, le groupe de ses débuts qu'il a quitté pour une carrière solo en 1995.
Et puis, il y a la volonté de briser le moule conçu par les "grands frères". Exit le tama, le fameux tambour à aisselles qui a popularisé cette musique de percussions d'origine essentiellement wolof. Restent les incontournables sabars que viennent épicer une guitare aux arpèges "flangerisés", inspirés du rock et le violon de Patricia Tang, jeune Américaine d'origine formosane tombée amoureuse du mbalax. "J'essaie de ne pas refaire le même mbalax", confirme-t-il. "Le modérer, lui ajouter d'autres couleurs. Il me faut toucher les publics hors du Sénégal."
Alioune Nder est un étrange mélange de lucidité : "Aujourd'hui, la musique est un gagne-pain... J'ai déjà une boîte de production et je souhaiterais désormais avoir mon entreprise de duplication de cassettes." Une lucidité que bouscule parfois une fièvre quasi mystique : "Je ne peux pas expliquer ma musique, c'est comme ca. C'est comme les textes que j'écris, ils sont faits dans l'improvisation quand j'entre en studio."
On le sent ambitieux, Rastignac à la mode africaine. Mais il ne s'agit que de "l'enfance d'un chef". On en veut pour preuve ce concert qui a déployé trop souvent les défauts propres aux jeunes artistes du mbalax. Notamment les mélodies qui s'étirent, se diluent dans de trop longues séquences rythmiques et qui évoquent précisément... le Youssou Ndour des années 70-80. En un mot, pour Alioune Nder, ce n'est pas la victoire en chantant, encore moins Waterloo, morne plaine. Tout juste l'appel aux armes d'un jeune artiste en quête de maturité.
Jean-Michel DENIS