Chroniques électro
Bob Sinclar / Champs-Elysées (Yellow Prod./East West)
Détesté par les intégristes de l’électronique mais chéri par le public, Bob Sinclar nous revient avec un second album. On lui reproche d’user et d’abuser de l’image French Touch, de recycler le disco et surtout de vendre beaucoup de disques. Il faut savoir que derrière ce pseudonyme se cache Chriss the french kiss, fondateur du label Yellow. C’est ce label, avec celui de Laurent Garnier, F.Com, qui le premier a voulu défendre une certaine image de l’électronique à la française. Son catalogue est impressionnant : Dimitri From Paris, Kid Loco, Mighty Bop entre autres artistes, des projets précurseurs : La Yellow 357, la B.O d’un film qui n’existe pas, Bossa Très Jazz, fusion entre musiques brésiliennes, japonaises et françaises. Bref, Yellow reste l’un des labels les plus en vue dans le monde et n’a pas à rougir de son parcours.
Alors pourquoi le milieu électronique branché parisien crache-t’il sur Bob Sinclar ? Tout simplement parce que Bob Sinclar en bon provocateur, cultive cette image de star. Si l’auteur de I feel for you a intitulé son album Champs-Elysées, c’est dit-il, pour se moquer de ses détracteurs qui lui reproche son côté franchouillard (Champs Elysées étant une des émissions de télé les plus populaires des années 80, certains diront ringarde, ndlr). Ce qu’on ne pourra pas lui enlever, c’est sa sincérité et son honnêteté ; à l’heure où des dizaines de procès sont en cours pour de sombres histoires de droits non déclarés, Bob Sinclar, lui, a décroché son téléphone pour demander l’autorisation de sampler Cerrone. La suite lui prouva qu’il avait eu le nez fin. Le roi du disco des années 70, plutôt flatté, l’a non seulement autorisé à récupérer des boucles mais l’a immédiatement invité à Los Angeles, dans son studio pour travailler ensemble sur certains morceaux.
Alors bien entendu, cet album a un parfum disco mais le patron de Yellow aime véritablement cette musique. Pour lui, ce n’est pas un coup. Autre rêve de gamin, avoir fait chanter James-D’train-William’s sur le prochain single Darlin’. Alors finalement, mérite t’il autant de noms d’oiseaux, notre Bob Sinclar ? Personnellement, je préférais son travail sous le nom de Mighty Bop, plus proche du trip-hop que de la house, Mais ce Champs-Elysées reste très fréquentable pour un disque dance, et c’est comme ça qu’il faut l'entendre et surtout le danser…
Benjamin Diamond : Strange attitude (Sony / Epic)
Autre personnage clef de la scène électronique parisienne, le chanteur de Stardust qui lui nous présente un premier album de pop électro touchant. En un single, Music sounds better with you, la voix de Benjamin Diamond est devenu aussi reconnaissable que celle de Cher pour prendre un mauvais exemple. Pour lui, il aurait été simple et beaucoup plus lucratif de poser sa voix soul sur des rythmiques house, comme l’on fait les plagiaires de Phats and Small. Mais c’est mal connaître le caractère et l’ambition musicale de celui qu’on surnomme déjà «The Voice». L’auteur de Litle Scare, s’est, comme Bob Sinclar, replongé dans les années 80. Pas celles du disco et des paillettes mais celles de Soft Cell, souvenez-vous de son leader Marc Almond et du tube Tainted love. Un Strange Attitude loin des clichés disco-house filtrés, aux textes personnels qui évoquent autant la naissance de son petit garçon sur U were born, les plaisirs solitaires Playin’ with myself que partagés In your arms.
Un album attachant qui pourra cependant en agacer quelques-uns par le maniérisme du chant. Mais au moins, nous tenons en France un vrai chanteur au charisme indéniable qui se produit en concert comme n’importe quel artiste pop. Enfin, cet album vaut la peine d’être acheté pour au moins deux titres : Litle scare et le futur classique très downtempo, le splendide Read in your mind.p> Un premier galop d’essai, maladroit parfois mais tendre comme un premier baiser. Procurez vous aussi le maxi Little Scare remixé par Cosmo Vitelli. Une petite merveille de déconstruction.
Benjamin Diamond en ligne
Château Flight : Puzzle (Pias / Versatile)
Le meilleur pour la fin. Château flight est un duo composé de Gilb-r et d’I:CUBE. Le premier est le fondateur du label Versatile et a découvert mon second. Gilb-r s’est lancé dans le hip-hop dès le milieux des années 80, puis il a été l’un des pionniers de la jungle en France, avant de se lancer dans ce qu’on pourrait appeler le Nu-funk. Il se définit lui-même comme un franc-tireur. I:CUBE alias Nicolas Chaix c’est l’antithèse. Discret et timide, son truc, c’est la techno froide et clinique, façon Detroit. Difficile d’imaginer les deux producteurs en studio tant tout les sépare. Tout ? Sauf le désire de faire avancer la musique électronique hors des sentiers battus et balisés. Et le pire, c’est qu’ils y arrivent.
Rarement un album, depuis la sortie du Homework des Daft Punk, aura fait ainsi l’unanimité. Du trip-hop empreint de jazz sur Camping jazz à la house minimale d’Instant replay au funk futuriste de Frontal funk, tous les styles se transforment par le travail des deux acolytes en du jamais-entendu. On pensera à l’Anglais Herbert, pour l’approche iconoclaste des bruits de la vie de tous les jours avec l’hilarant et planant Bizzare, aux Allemands du label Compost et leurs influences sud-américaines sur le titre Auto-power. Mais sorti de ces deux références, on a du mal à s’y retrouver. Et c’est tant mieux !!!
Si vous n’avez qu’un disque à acheter cette année, c’est celui-là. Enfin un album qui ne regarde pas dans le rétroviseur mais qui nous emmène sur les chemins de traverses, là où vous ne croisez pas grand monde. Pour moi ce sont les plus beaux. Empruntez les rapidement, avant la bousculade.
Willy Richert
Bob Sinclar, Benjamin Diamond, Château Flight
Bob Sinclar / Champs-Elysées (Yellow Prod./East West)
Détesté par les intégristes de l’électronique mais chéri par le public, Bob Sinclar nous revient avec un second album. On lui reproche d’user et d’abuser de l’image French Touch, de recycler le disco et surtout de vendre beaucoup de disques. Il faut savoir que derrière ce pseudonyme se cache Chriss the french kiss, fondateur du label Yellow. C’est ce label, avec celui de Laurent Garnier, F.Com, qui le premier a voulu défendre une certaine image de l’électronique à la française. Son catalogue est impressionnant : Dimitri From Paris, Kid Loco, Mighty Bop entre autres artistes, des projets précurseurs : La Yellow 357, la B.O d’un film qui n’existe pas, Bossa Très Jazz, fusion entre musiques brésiliennes, japonaises et françaises. Bref, Yellow reste l’un des labels les plus en vue dans le monde et n’a pas à rougir de son parcours.
Alors pourquoi le milieu électronique branché parisien crache-t’il sur Bob Sinclar ? Tout simplement parce que Bob Sinclar en bon provocateur, cultive cette image de star. Si l’auteur de I feel for you a intitulé son album Champs-Elysées, c’est dit-il, pour se moquer de ses détracteurs qui lui reproche son côté franchouillard (Champs Elysées étant une des émissions de télé les plus populaires des années 80, certains diront ringarde, ndlr). Ce qu’on ne pourra pas lui enlever, c’est sa sincérité et son honnêteté ; à l’heure où des dizaines de procès sont en cours pour de sombres histoires de droits non déclarés, Bob Sinclar, lui, a décroché son téléphone pour demander l’autorisation de sampler Cerrone. La suite lui prouva qu’il avait eu le nez fin. Le roi du disco des années 70, plutôt flatté, l’a non seulement autorisé à récupérer des boucles mais l’a immédiatement invité à Los Angeles, dans son studio pour travailler ensemble sur certains morceaux.
Alors bien entendu, cet album a un parfum disco mais le patron de Yellow aime véritablement cette musique. Pour lui, ce n’est pas un coup. Autre rêve de gamin, avoir fait chanter James-D’train-William’s sur le prochain single Darlin’. Alors finalement, mérite t’il autant de noms d’oiseaux, notre Bob Sinclar ? Personnellement, je préférais son travail sous le nom de Mighty Bop, plus proche du trip-hop que de la house, Mais ce Champs-Elysées reste très fréquentable pour un disque dance, et c’est comme ça qu’il faut l'entendre et surtout le danser…
Benjamin Diamond : Strange attitude (Sony / Epic)
Autre personnage clef de la scène électronique parisienne, le chanteur de Stardust qui lui nous présente un premier album de pop électro touchant. En un single, Music sounds better with you, la voix de Benjamin Diamond est devenu aussi reconnaissable que celle de Cher pour prendre un mauvais exemple. Pour lui, il aurait été simple et beaucoup plus lucratif de poser sa voix soul sur des rythmiques house, comme l’on fait les plagiaires de Phats and Small. Mais c’est mal connaître le caractère et l’ambition musicale de celui qu’on surnomme déjà «The Voice». L’auteur de Litle Scare, s’est, comme Bob Sinclar, replongé dans les années 80. Pas celles du disco et des paillettes mais celles de Soft Cell, souvenez-vous de son leader Marc Almond et du tube Tainted love. Un Strange Attitude loin des clichés disco-house filtrés, aux textes personnels qui évoquent autant la naissance de son petit garçon sur U were born, les plaisirs solitaires Playin’ with myself que partagés In your arms.
Un album attachant qui pourra cependant en agacer quelques-uns par le maniérisme du chant. Mais au moins, nous tenons en France un vrai chanteur au charisme indéniable qui se produit en concert comme n’importe quel artiste pop. Enfin, cet album vaut la peine d’être acheté pour au moins deux titres : Litle scare et le futur classique très downtempo, le splendide Read in your mind.p> Un premier galop d’essai, maladroit parfois mais tendre comme un premier baiser. Procurez vous aussi le maxi Little Scare remixé par Cosmo Vitelli. Une petite merveille de déconstruction.
Château Flight : Puzzle (Pias / Versatile)
Le meilleur pour la fin. Château flight est un duo composé de Gilb-r et d’I:CUBE. Le premier est le fondateur du label Versatile et a découvert mon second. Gilb-r s’est lancé dans le hip-hop dès le milieux des années 80, puis il a été l’un des pionniers de la jungle en France, avant de se lancer dans ce qu’on pourrait appeler le Nu-funk. Il se définit lui-même comme un franc-tireur. I:CUBE alias Nicolas Chaix c’est l’antithèse. Discret et timide, son truc, c’est la techno froide et clinique, façon Detroit. Difficile d’imaginer les deux producteurs en studio tant tout les sépare. Tout ? Sauf le désire de faire avancer la musique électronique hors des sentiers battus et balisés. Et le pire, c’est qu’ils y arrivent.
Rarement un album, depuis la sortie du Homework des Daft Punk, aura fait ainsi l’unanimité. Du trip-hop empreint de jazz sur Camping jazz à la house minimale d’Instant replay au funk futuriste de Frontal funk, tous les styles se transforment par le travail des deux acolytes en du jamais-entendu. On pensera à l’Anglais Herbert, pour l’approche iconoclaste des bruits de la vie de tous les jours avec l’hilarant et planant Bizzare, aux Allemands du label Compost et leurs influences sud-américaines sur le titre Auto-power. Mais sorti de ces deux références, on a du mal à s’y retrouver. Et c’est tant mieux !!!
Si vous n’avez qu’un disque à acheter cette année, c’est celui-là. Enfin un album qui ne regarde pas dans le rétroviseur mais qui nous emmène sur les chemins de traverses, là où vous ne croisez pas grand monde. Pour moi ce sont les plus beaux. Empruntez les rapidement, avant la bousculade.
Willy Richert