Didier Lockwood

Avec Jean-Luc Ponty, Didier Lockwood est le récipiendaire d'une tradition jazz lourde à porter car initiée par un monument du jazz mondial : Stéphane Grappelli. Bien que pratiquée dans de nombreux autres pays, le violon jazz est une spécificité française qui des ancêtres Michel Warlop aux plus jeunes pousses dont Florin Niculescu, participe de ce qu'on appelle la " french touch".

Une émotion à fleur de corde

Avec Jean-Luc Ponty, Didier Lockwood est le récipiendaire d'une tradition jazz lourde à porter car initiée par un monument du jazz mondial : Stéphane Grappelli. Bien que pratiquée dans de nombreux autres pays, le violon jazz est une spécificité française qui des ancêtres Michel Warlop aux plus jeunes pousses dont Florin Niculescu, participe de ce qu'on appelle la " french touch".

Après ses débuts dans le groupe de Christian Vander Magma, puis sa rencontre avec celui qui deviendrait son maître Stéphane Grappelli, en 76, Didier Lockwood n'a eu de cesse de faire des rencontres et des expériences musicales diverses avec les guitaristes Christian Escoudé et Philip Catherine, avec Michel Petrucciani ou au sein de son propre groupe Phoenix.

Aujourd'hui, il se prépare pour un concerto unique au Théâtre des Champs-Elysées et à un autre spectacle courant mai avec des musiciens indiens. Le violoniste revient sur ses nombreux projets.

Le 31 mars, à quoi ressemblera ce spectacle dans un antre de la musique classique au Théâtre des Champs-Elysées ?
C'est une soirée qui est organisée par les concerts Lamoureux et qui présentera en première partie un hommage à Stéphane Grappelli avec le bassiste Marc-Michel Lebevillon et le guitariste Romane et moi-même. Ce sera un concert inspiré de l'album Tribute que j'ai enregistré il y a un an, avec le guitariste Bireli Lagrene et le contrebassiste Niels-Henning Orsted Pederen. Puis, en seconde partie, on entendra les œuvres symphoniques que j'ai composées tout au long de ces dernières années : le concerto pour piano qui sera joué par le pianiste Franck Braley et puis une pièce qui est une mélodie pour voix et enfin le Concerto pour orchestre et mouettes que j'interpréterai.

Quatre ans après sa disparition quelle image gardez-vous de Stéphane Grappelli ?
Il est important de garder dans la mémoire collective ce que Stéphane a apporté aussi bien musicalement qu'humainement. C'est quelqu'un qui a radicalement changé le violon. Qui a su et eu le courage de le faire, suscitant l'admiration des plus grands instrumentistes comme Yehudi Menuhin. C'est un vrai patrimoine qu'il faut défendre parce qu'après Stéphane Grappelli il y a eu Jean-Luc Ponty qui a eu un rôle extrêmement important. Et j'essaye de défendre ce patrimoine à travers le disque et l'école que je viens d'ouvrir.

Il y a certes une belle descendance " violonistique " avec des artistes comme Debora Seffer, Pierre Blanchard ou Dominique Pifarèly. Comment expliquez-vous cette profusion de violonistes jazz français ?
Il y en aurait encore bien d'autres à citer comme les jeunes pousses : Alexandre Cavaliere ou Thomas Copland. Disons que c'est une question d'école et d'émulation. Stéphane, Jean-Luc ou moi-même avons énormément joué en France et automatiquement, on draine et on incite les jeunes à aller vers ce côté de la musique.

D'autant plus qu'avec cette école que vous venez de créer, vous risquez de susciter d'autres vocations. Pourriez-vous nous en dire plus sur ce centre d'apprentissage ?
C'est une école d'enseignement supérieur professionnel qui se destine à des élèves qui ont déjà une bonne connaissance de l'instrument et de sa pratique. Elle se trouve à Dammarie-les-Lys en Seine et Marne. On y reçoit une cinquantaine d'élèves par an, pas plus. Car au-delà ce serait ingérable. Il y a un cursus de vingt heures par semaine avec toutes les musiques improvisées. Les professeurs enseignent sur cinq instruments. Il y a des violonistes comme moi, Christophe Cravero ou Nicolas Krassik, il y a également le violoncelliste Vincent Segal ou les guitaristes Louis Winsberg, Jean-Marie Ecay, des batteurs comme Stéphane Huchard ou le bassiste Bruno Chevillon. Il y aura également des intervenants extérieurs lors de master class. Des pointures internationales comme Paco De Lucia, Chick Corea ou John Scofield…

Compte tenu de l'ingratitude de l'instrument, de sa difficulté à le maîtriser, qu'est qui fait selon vous que l'on a ou pas des prédispositions à jouer du violon ?
On devient un bon instrumentiste quand on a su dans un premier temps être touché par un artiste. Tout passe alors par l'envie d'imiter avant de forger son propre style, sa propre voie et sa personnalité musicale. Le don vient par une forte envie de jouer d'un instrument et c'est vrai qu'il est difficile de jouer du violon, surtout en improvisation. Je crois que l'intérêt de cette école permettra de s'intéresser de près à l'étude des cordes improvisées et de mieux en comprendre la maîtrise.

En dehors de ce concert du 31 mars et de l'ouverture de cette école, quels sont vos projets ?
Il va y avoir un enregistrement live au Cirque d'Hiver à Paris avec un danseur indien, Raghunath Manet qui danse la danse karmatique et qui joue de la vina, l'ancêtre de la sitar. On est accompagné par un percussionniste qui s'appelle Burgan. Et puis, il y a Caroline Casadesus qui chante. C'est un spectacle qui aura lieu de nouveau du 15 au 18 mai au moment de la sortie du disque en attendant mon prochain album.
J'avais rencontré Raghunath lors d'une tournée en Inde et il avait entendu certains de mes disques, il y a une vingtaine d'année. Il m'a expliqué lors de cette rencontre qu'il voulait jouer avec moi. J'étais enthousiasmé ! Il s'agit d'une rencontre entre Orient et Occident. Elle ne va pas dans le sens d'expériences comme celle de John McLaughlin dans les années 70 où les musiciens européens allaient dans le sens de la musique indienne. Avec ce spectacle, je garde mon identité européenne et Ragunat conserve son identité artistique. Simplement, la fusion s'opère harmonieusement. J'improvise au-dessus et autour de cette danse et de sa chorégraphie.

Didier Lockwood Tribute to Stéphane Grappelli Dreyfus /Sony
En concert le 31 mars au Théâtre des Champs-Elysées à Paris
Centre des Musiques Didier Lockwood à Dammarie-les-Lys
tél. : 01 64 83 07 50
http://cmdl.free.fr/