Gino Sitson
Originaire du Cameroun, Gino Sitson est un objet vocal non identifié (comme il aime à se décrire). Après avoir conquis les clubs parisiens, le voici maintenant à l'attaque de ceux de la Grosse Pomme. Nous étions à The Jazz Gallery il y a quelques temps et nous n'oublierons pas la prestation de celui qui sort son deuxième album Song Zin' et qui voit déjà se profiler un destin fort prometteur.
Un Camerounais à New York
Originaire du Cameroun, Gino Sitson est un objet vocal non identifié (comme il aime à se décrire). Après avoir conquis les clubs parisiens, le voici maintenant à l'attaque de ceux de la Grosse Pomme. Nous étions à The Jazz Gallery il y a quelques temps et nous n'oublierons pas la prestation de celui qui sort son deuxième album Song Zin' et qui voit déjà se profiler un destin fort prometteur.
Sur les trottoirs downtown, « en bas de la ville » comme on dit ici, il reste encore un peu de neige. Ne me demandez pas pourquoi mais en sortant du métro, je me surprends à me demander quelle peut bien être en ce moment, la température en plein cœur de l'Afrique ? «Allez sois sympa, viens vendredi et tu ne seras pas déçue, ce mec-là, il sort tout droit de la lampe d'Aladin», qu'il disait Jim Eigo le producteur et figure du jazz-business new-yorkais depuis plus de 25 ans !… Le show est censé commencer à 21h et les mecs sont encore en train de répéter quand j'arrive. Ça sent l'amateurisme à plein nez, j'aurai mieux fait de rester au chaud devant la télé. Alors histoire de m'occuper, je jette un œil sur les photos posées au mur. Après tout, ça s'appelle « The Jazz Gallery ». Bingo ! J'ai bien choisi, je me suis assise juste sous la photo de Bud Powell. Sur le mur d'en face je reconnais Oscar Peterson, Sonny Rollins et quelques autres. Tout à coup : « Eh ! tu parles Français ? » - « Ben oui ! » - « Salut, moi c'est Gino Sitson. » Un petit bonhomme chemise rouge flamboyant et bonnet africain me sert la main avec un sourire façon « banane » qu'il fait bon partager dans une ville comme celle-ci. «Dans une minute on est sur scène et j'espère que l'on va t'envoyer de bonnes vibrations».
J'ai à peine le temps de mettre mon téléphone portable en position off que le directeur de la Gallery annonce déjà : «Ladies and gentlemen, please welcome Gino Sitson». Quelques timides applaudissements accueillent sur une scène qui n'en est pas une, ce vocaliste camerounais qui a parcouru la terre avec quelques grands noms comme Manu Dibango, Papa Wemba, Youssou N'Dour, et Jorge Ben pour ne citer qu'eux, avant d'être le Gino Sitson que je vous souhaite tous de découvrir comme j'ai eu la chance de la faire un vendredi soir, sous la neige new-yorkaise.
En medumba, l'un des dialectes parlés dans son pays natal le Cameroun, Gino Sitson nous invite à danser (Wô ou Wô), nous parle de sa nièce, (Lovely Dany Jo) dont il est si fier, et finit en beauté par un long solo « bucal ». Tapotant sa mâchoire pour en extraire des sons telle une batterie, je me revois soudainement quelques années auparavant sous une pluie toride au Théâtre Antique de Vienne dans l'Isère où à l'occasion du festival de Jazz, Bobby Mc Ferrin s'était mêlé à la foule et avait terminé son spectacle sous l'orage, par un exercice vocal identique. Mais revenons à notre « tempo », car ce poisson-là croyez-moi, il deviendra grand !
Je commence à peine à sentir la température monter que le même gars réapparaît pour annoncer cette fois ci : «Ladies and gentlemen, let's thanks Gino Sitson». Moralité, les bonnes choses ont toujours une fin et je me maudis d'être gourmande à ce point. Je plonge dans mon sac, rebranche mon téléphone, l'argent pour le taxi, les clés. let's go ! Je lève la tête et revoilà mon bonhomme chemise rouge, bonnet toujours en place, petites lunettes façon Gandhi plus que Lennon qui me dit : «Alors t'as aimé ?».
Il n'y a pas qu'à New York que les belles choses se réalisent. Mais je dois avouer que ce vendredi-là, au milieu des buildings, les vocalises de Gino Sitson ont résonné de telle façon qu'il ne m'a pas été difficile de croire à un miracle.
Gino Sitson Song Zin' (Night and Day) 2001