Kat Onoma
Le nom de Kat Onoma signifie, grosso modo, Comme son nom l'indique. Justement, le groupe, qui compte parmi les vétérans du rock français (quinze ans d'activité), titre pour la première fois un album de son seul nom. Une manière de manifeste, quatre ans après le disque précédent et après les divers projets en solo de Rodolphe Burger et Philippe Poirier. Et une rencontre plus que féconde avec le producteur anglais Ian Caple.
Comme son nom l'indique
Le nom de Kat Onoma signifie, grosso modo, Comme son nom l'indique. Justement, le groupe, qui compte parmi les vétérans du rock français (quinze ans d'activité), titre pour la première fois un album de son seul nom. Une manière de manifeste, quatre ans après le disque précédent et après les divers projets en solo de Rodolphe Burger et Philippe Poirier. Et une rencontre plus que féconde avec le producteur anglais Ian Caple.
Que sera votre vie quand/Le silence entre les sons se remplira de cris ?/Que sera votre vie quand/Une heure durera de sept à huit minutes ? Que sera notre vie, alors ? L'apocalypse, bien sûr. Mais comme le dernier livre du Nouveau Testament recèle de grandes beautés poétiques en même temps que la prédiction de cataclysmes immenses, Que sera votre vie porte de sereines splendeurs en même temps que l'annonce du désastre final. Une batterie alourdie d'électronique, des guitares déchirantes, un quatuor à cordes désespérément doux, un texte inquiétant de Pierre Alféri (qui, pour une fois, a laissé tomber son masque de Thomas Lago, sous lequel il signe d'habitude ses chansons pour Kat Onoma) et la voix d'imprécateur de Rodolphe Burger.
Le chanteur retrouve son groupe après avoir mené quelques projets en solo (Meteor Show, L'Homme usé, Welche), de même que son complice Philippe Poirier (Qui donne les coups). Nous avions décidé de cette mise en stand by du groupe après la sortie du double disque en public, Happy Birthday, explique Rodolphe Burger. Simplement, on n'imaginait pas que ça durerait quatre ans. Le groupe s'est retrouvé pourtant, riche de nouvelles passions, entre autres l'usage de l'électronique musicale, très présente dans les projets solo de Burger. Et Kat Onoma a décidé de faire entrer dans le jeu Ian Caple (producteur de Tricky ou Tindersticks), ce qui a provoqué un renouvellement radical des méthodes de composition et d'enregistrement de la musique du groupe.
L
e producteur anglais a pour principe de tout enregistrer, de ne pas différencier le processus préparatoire de l'enregistrement définitif. Les premières parties de guitare, explique Rodolphe Burger, qui sont jetées rapidement, dans un contexte de maquette pour l'album, ont fini, pour 90%, par se retrouver dans le disque final. Jamais on n'a passé aussi peu de temps à enregistrer nos guitares : tout a été fait en un week-end. L'autre guitariste de Kat Onoma, Philippe Poirier, note que les techniques d'enregistrement actuelles permettent de tout garder, d'avancer sur le disque sans jamais rien avoir à recommencer, en conservant une part d'improvisation. Cela épouse exactement la façon dont nous faisons de la musique : la recherche, l'envie de nous surprendre nous-mêmes dans l'interprétation des morceaux. La technique permet enfin de préserver la spontanéité et la musicalité.
Ainsi l'album Kat Onoma se trouve-t-il bien nommé : il résume mieux qu'aucun autre le groupe, son alliance de rigueur monacale et de ferveur électrique, de puissance instinctive et de limpidité méditative. Se réinventant une liberté formelle avec tous les outils stylistiques d'aujourd'hui, le groupe a su dépasser son abord souvent évoqué de groupe " intello ". Un quatuor à cordes sur la majorité des morceaux ( nous avons mis longtemps à l'accepter ), un chœur gospel sur une poignée de chansons ( ce n'était pas évident du tout dans notre univers ) : c'est à des dimensions nouvelles que s'essaye le groupe, aiguillonné par les bricolages de Ian Caple.
L'informatique est devenue le cœur du dispositif, explique Rodolphe Burger. Elle permet de mélanger l'analogique et le numérique. Si on faisait l'historique des sons de cet album, on découvrirait des choses saisissantes : prises numériques, transfert analogique, rythmiques analogiques digitalisées sous Pro Tools puis repassées dans une vieille console analogique... Ian Caple nous a poussé à aller très loin dans les prises acoustiques faites dans une chapelle des Vosges (c'est l'école Abbey Road, où il a été assistant), tout en utilisant un micmac génial piloté par l'informatique. Il utilise des vieux pré-amplis Telefunken, la toute première génération de delay digital, que l'on trouve à trois cents balles dans les casses, mais dont l'informatique pallie tous les défauts - le souffle, le manque de dynamique. Cette richesse technique est caractéristique de la musique d'aujourd'hui, encore qu'on la connaisse peut-être dans d'autres arts comme le cinéma.
Et cette liberté technique contribue à faire de Kat Onoma un des disques rock les plus aboutis de cette génération en France, affranchi des codes raccornis de la " crédibilité " rock et des querelles d'école. Un disque grave et puissant, sûr de lui et accueillant.
Kat Onoma, EMI ref 7243 5312110 5