SHARQ TARONALARI
Samarkand, le 10 septembre 2001 - Le IIIe Festival International Sharq Taronalari - "mélodies d'Orient" - de Samarkand (Ouzbékistan) s'est tenu du 25 au 30 août 2001. Il a réuni quelque 150 artistes originaires de vingt-quatre pays, invités à se produire sur la célèbre place du Registan et à concourir devant un jury international : six jours de musique, où l'essentiel s'est peut-être joué dans d'homériques bœufs hors scène.
Voix de Soie à Samarkand
Samarkand, le 10 septembre 2001 - Le IIIe Festival International Sharq Taronalari - "mélodies d'Orient" - de Samarkand (Ouzbékistan) s'est tenu du 25 au 30 août 2001. Il a réuni quelque 150 artistes originaires de vingt-quatre pays, invités à se produire sur la célèbre place du Registan et à concourir devant un jury international : six jours de musique, où l'essentiel s'est peut-être joué dans d'homériques bœufs hors scène.
On ne redira pas combien Samarkand fait rêver, à la seule évocation de son nom. Capitale centre-asiatique jusqu'au XVIe siècle, Samarkand fut une grande place économique, culturelle et politique, un bijou architectural sur la Route de la Soie. Aujourd'hui les caravanes ont disparu, mais Samarkand a conservé tout son charme, étrange mélange d'architecture timouride restaurée (la place du Registan, le mausolée de Guri Amir…), d'urbanisme soviétique et de délabrement dû au brusque appauvrissement de la population depuis l'effondrement du système soviétique en 1991.
Les mélodies de quel Orient ?
Les objectifs du très officiel Festival qui s'y donne tous les deux ans sont clairs : assurer une vitrine musicale à l'Ouzbékistan et, en cette année du Xe anniversaire de son indépendance, jouer le grand jeu de la puissance régionale, soucieuse de culture et d'amitié entre les peuples. Bref, à Samarkand on ne lésine pas sur les moyens, d'où la richesse des plateaux pour un public local sage et modeste.
L'Asie Centrale et la Russie sont bien représentées, mais le Festival prétend couvrir une immense zone géographique, qui court du Maghreb au Japon et à l'Indonésie, sans oublier l'Inde, le Népal et tant d'autres. Si l'on y ajoute quelques choix hasardeux - un ensemble sud-africain et une troupe folklorique allemande, égarés entre deux steppes -, le tout a un petit air hétéroclite, qui nuit au sérieux de la programmation.
Celle-ci inclut un lot d'artistes bien connus, par le disque ou par la scène. Alim Qasimov, LA voix azérie (Bakou), fréquente les salles européennes depuis une dizaine d'années ; Salim Fergani et son ensemble de Constantine (Algérie) ont, de longue date, fait de la France leur arrière-cour ; enfin, les publics parisien et nancéen ont pu applaudir l'excellent chanteur Bolot Baïrichev (Altaï, Fédération de Russie) au printemps dernier. Mais il faut aussi compter avec d'heureuses surprises. On rangera parmi les voix d'avenir la Turque Nahidé Tokgöz (Ankara), ainsi que trois jeunes Ouzbeks de l'Ensemble maqom Yunus Rajabi (Tachkent) : Zulaykhan Baykhanova, Saibjan Niazov et Abdunabi Ibrahimov - ces deux derniers ont livré, en duo, une prestation impeccable.
Du bœuf au concours (ou l'inverse)
Mais la grosse affaire du Festival, c'est son concours - hélas. Fort bien doté, il phagocyte les scènes (les prestations durent moins de 25 minutes), pèse sur les esprits et laisse quelques questions sans réponse : comment le jury s'y prend-il pour juger des musiques si différentes ? Peut-il vraiment les comparer ? Ou encore, est-il libre de ses choix ? La multiplicité des prix conférés ex-aequo et la présence sur le podium de formations très moyennes, n'ont pas contribué à dissiper les doutes. Finalement, pendant cette semaine festivalière l'essentiel a peut-être été dit dans la cour de l'hôtel, lors de ces jam-sessions nocturnes où des musiciens de tous horizons ont librement échangé et partagé, pour le bonheur de quelques insomniaques. Alors, osera-t-on quelques conseils pour la prochaine édition ? Resserrer la programmation autour du monde musical arabo-turco-persan, laisser les artistes s'exprimer dans de véritables concerts… et renoncer à tirer des feux d'artifice sur les médersas du Registan, si belles mais si fragiles, pour que Samarkand ait le festival qu'elle mérite.
Site internet officiel du festival
Site sur l'Ouzbékistan (anglais)