Afro tendances

Paris, le 5 novembre 2001- Chaque année, à l'instar du Midem, le Womex, salon dédié aux musiques du monde, présente les tendances de la saison à venir.

Afro-électro ou afro-techno?
Issa Bagayogo et l'Orchestre Baobab.

Paris, le 5 novembre 2001- Chaque année, à l'instar du Midem, le Womex, salon dédié aux musiques du monde, présente les tendances de la saison à venir.

Le continent africain a été particulièrement bien représenté cette année à Rotterdam avec deux groupes qui ont fait sensation, celui du Malien Issa Bagayogo, version afro-électro, et le groupe mythique des années 70 au Sénégal, l'Orchestre Baobab, que nous fait redécouvrir Nick Gold, l'homme qui a produit Ali Farka Touré et le Buena Vista Social Club de Cumpay Segundo.
Deux groupes francophones que les labels anglo-saxons se sont accaparés. Paris ne serait-il plus la capitale de la musique africaine?

Issa Bagayogo, de la terre à l'électro.

Les tentatives de fusion afro-électro sont "tendance" depuis quelques années. Mais aucune à ce jour n'a vraiment abouti.
Manu Dibango avait été le précurseur, une fois de plus, avec son album Electric Africa, sur le label anglais Island.
Depuis, les musiciens maliens, dont la culture est pourtant fort éloignée des musiques électroniques, participent activement à ce travail de recherche.
Neba Solo a tenté de mixer les mélodies hypnotiques de son balafon avec les beats du DJ français Fréderic Galliano. Mais la magie n'ayant pas pris, ce dernier développe maintenant depuis Paris sa techno avec la chanteuse malienne Hadja Kouyaté, pour son label Frikiywa.

Pendant ce temps, à Bamako, deux Français cherchent le son du 3e millénaire dans leur studio monté avec Ali Farka Touré.
Philippe Berthier, installé depuis dix-huit ans dans la capitale malienne, après avoir été le disquaire lyonnais "branché" au début des années 80, à l'époque où la capitale des Gaules disputait à Rennes le leadership du rock français, et Yves Wernert, ancien bassiste du groupe nancéien Double Nelson, trouvent en Issa Bagayogo le chanteur avec lequel entreprendre l'aventure afro-électro.

Cet artiste, âgé aujourd'hui de 40 ans, a un parcours étonnant. Paysan du Wassoulou, la région de Nahawa Doumbia, il apprend à jouer le kamalé n'goni, une harpe à six cordes puis monte voici dix ans à Bamako pour devenir chauffeur de bus et s'essayer à la musique.
Après deux cassettes soldées par un échec en 91 et 93, le tandem français lui propose de mixer sa culture de la tradition aux samples de l'électronique.
Surpassant une saine réserve pour la boîte à rythme, Issa accepte le projet et travaille le concept avec Moussa Koné, ancien guitariste d'Ali Farka Touré.
Lorsque paraît Sya, résultat de ce travail, fin 98, c'est un succès au Mali. L'album sort en Europe sur le label Cobalt, et Issa Bagayogo devient "Techno Issa".
Cette première étape franchie, Philippe Berthier part à la recherche d'une maison de disques qui lui donnerait les moyens de développer la carrière d'Issa. C'est avec le label américain Six Degrees Records, rencontré à Cannes lors du Midem 2001, qu'il signe finalement. Le printemps 2001 est consacré à l'enregistrement de Timbuktu, qui sortira en février prochain.

Le Womex est donc l'occasion de présenter en avant-première quelques perles de l'album à un public de professionnels généralement blasé et difficile à convaincre. Et là, la magie fonctionne à plein, l'apport de deux anciens du combo parisien Malka Family à la basse et aux samples mettant en valeur toutes les possibilités de cette musique du futur où la voix profonde d'"Electro Issa", son nouveau surnom, part à la rencontre de la machine.

Orchestre Baobab, tendance afro-rétro.

Cet "afro feed back" est actuellement en vogue dans l'univers anglo-saxon où le groupe de vétérans de la musique zaïroise des années 60, Kékélé, séduit le Royaume-Uni.
Quant à Manu Dibango, toujours lui, on annonce pour le mois prochain un album de ses compositions des années 70 au marimba, le xylophone africain.
L'Orchestre Baobab, le groupe de salsa mythique des années 70 au Sénégal, revient grâce à Nick Gold, le producteur anglais qui a découvert Ali Farka Touré et le fameux Buena Vista Social Club cubain.

Baobab, c'est le groupe phare de la musique sénégalaise avant l'arrivée de Youssou N'Dour, l'orchestre de l'intelligentsia de la fin des années Senghor. Un ensemble qui n'existait plus que par les cassettes pirates échangées sous le manteau et par les reprises faites par les groupes de rap sénégalais.
En fait, si le Baobab était dissous, les musiciens jouaient chacun de leur côté dans les grands hôtels pour les touristes de passage. Un peu comme les musiciens du Buena Vista.
Et s'ils reviennent aujourd'hui sur le devant de la scène, c'est par le plus grand des hasards. Un producteur sénégalais détenant les droits pour sortir ces bandes inédites datant de 1982 sur cassettes au Sénégal les propose à Nick Gold pour son label World Circuit, sans que les artistes en soient avertis.

C'est ainsi que cette cassette devient un double CD "Pirates Choice" (le choix des pirates). Avec un certain humour, Balla Sidibé, un des trois chanteurs, explique: C'est une chance pour le groupe d'avoir été piraté, car cela nous permet de débarquer dans le circuit international!

Nick Gold, qui a découvert le Buena Vista Social Club grâce à sa passion pour la musique africaine, a trouvé en l'Orchestre Baobab une passerelle entre ces deux cultures.
De là à rééditer le coup du Buena Vista? L'avenir nous le dira.

 

Le continent africain a été particulièrement bien représenté cette année à Rotterdam avec deux groupes qui ont fait sensation, celui du Malien Issa Bagayogo, version afro-électro, et le groupe mythique des années 70 au Sénégal, l'Orchestre Baobab, que nous fait redécouvrir Nick Gold, l'homme qui a produit Ali Farka Touré et le Buena Vista Social Club de Cumpay Segundo.
Deux groupes francophones que les labels anglo-saxons se sont accaparés. Paris ne serait-il plus la capitale de la musique africaine ?

Issa Bagayogo, de la terre à l'électro.

Les tentatives de fusion afro-électro sont "tendance" depuis quelques années. Mais aucune à ce jour n'a vraiment abouti.
Manu Dibango avait été le précurseur, une fois de plus, avec son album Electric Africa, sur le label anglais Island.
Depuis, les musiciens maliens, dont la culture est pourtant fort éloignée des musiques électroniques, participent activement à ce travail de recherche.
Neba Solo a tenté de mixer les mélodies hypnotiques de son balafon avec les beats du DJ français Fréderic Galliano. Mais la magie n'ayant pas pris, ce dernier développe maintenant depuis Paris sa techno avec la chanteuse malienne Hadja Kouyaté, pour son label Frikiywa.

Pendant ce temps, à Bamako, deux Français cherchent le son du 3e millénaire dans leur studio monté avec Ali Farka Touré.
Philippe Berthier, installé depuis dix-huit ans dans la capitale malienne, après avoir été le disquaire lyonnais "branché" au début des années 80, à l'époque où la capitale des Gaules disputait à Rennes le leadership du rock français, et Yves Wernert, ancien bassiste du groupe nancéien Double Nelson, trouvent en Issa Bagayogo le chanteur avec lequel entreprendre l'aventure afro-électro.

Cet artiste, âgé aujourd'hui de 40 ans, a un parcours étonnant. Paysan du Wassoulou, la région de Nahawa Doumbia, il apprend à jouer le kamalé n'goni, une harpe à six cordes puis monte voici dix ans à Bamako pour devenir chauffeur de bus et s'essayer à la musique.
Après deux cassettes soldées par un échec en 91 et 93, le tandem français lui propose de mixer sa culture de la tradition aux samples de l'électronique.
Surpassant une saine réserve pour la boîte à rythme, Issa accepte le projet et travaille le concept avec Moussa Koné, ancien guitariste d'Ali Farka Touré.
Lorsque paraît Sya, résultat de ce travail, fin 98, c'est un succès au Mali. L'album sort en Europe sur le label Cobalt, et Issa Bagayogo devient "Techno Issa".
Cette première étape franchie, Philippe Berthier part à la recherche d'une maison de disques qui lui donnerait les moyens de développer la carrière d'Issa. C'est avec le label américain Six Degrees Records, rencontré à Cannes lors du Midem 2001, qu'il signe finalement. Le printemps 2001 est consacré à l'enregistrement de Timbuktu, qui sortira en février prochain.

Le Womex est donc l'occasion de présenter en avant-première quelques perles de l'album à un public de professionnels généralement blasé et difficile à convaincre. Et là, la magie fonctionne à plein, l'apport de deux anciens du combo parisien Malka Family à la basse et aux samples mettant en valeur toutes les possibilités de cette musique du futur où la voix profonde d'"Electro Issa", son nouveau surnom, part à la rencontre de la machine.

Orchestre Baobab, tendance afro-rétro.

Cet "afro feed back" est actuellement en vogue dans l'univers anglo-saxon où le groupe de vétérans de la musique zaïroise des années 60, Kékélé, séduit le Royaume-Uni.
Quant à Manu Dibango, toujours lui, on annonce pour le mois prochain un album de ses compositions des années 70 au marimba, le xylophone africain.
L'Orchestre Baobab, le groupe de salsa mythique des années 70 au Sénégal, revient grâce à Nick Gold, le producteur anglais qui a découvert Ali Farka Touré et le fameux Buena Vista Social Club cubain.

Baobab, c'est le groupe phare de la musique sénégalaise avant l'arrivée de Youssou N'Dour, l'orchestre de l'intelligentsia de la fin des années Senghor. Un ensemble qui n'existait plus que par les cassettes pirates échangées sous le manteau et par les reprises faites par les groupes de rap sénégalais.
En fait, si le Baobab était dissous, les musiciens jouaient chacun de leur côté dans les grands hôtels pour les touristes de passage. Un peu comme les musiciens du Buena Vista.
Et s'ils reviennent aujourd'hui sur le devant de la scène, c'est par le plus grand des hasards. Un producteur sénégalais détenant les droits pour sortir ces bandes inédites datant de 1982 sur cassettes au Sénégal les propose à Nick Gold pour son label World Circuit, sans que les artistes en soient avertis.

C'est ainsi que cette cassette devient un double CD "Pirates Choice" (le choix des pirates). Avec un certain humour, Balla Sidibé, un des trois chanteurs, explique: C'est une chance pour le groupe d'avoir été piraté, car cela nous permet de débarquer dans le circuit international!

Nick Gold, qui a découvert le Buena Vista Social Club grâce à sa passion pour la musique africaine, a trouvé en l'Orchestre Baobab une passerelle entre ces deux cultures.
De là à rééditer le coup du Buena Vista? L'avenir nous le dira.