Tarmac attaque

Quatre à deux

Après le succès phénoménal de Louise Attaque (plus de deux millions d’albums vendus), les quatre Parisiens ont décidé de faire une petite pause pour se concentrer sur différents projets. Gaétan Roussel et Arnaud Samuel, respectivement chanteur et violoniste, viennent de créer une nouvelle formation, Tarmac. Ils sortent un premier album acoustique intitulé l’Atelier.

Même si Gaétan Roussel et Arnaud Samuel s’échinent à construire une identité propre à leur nouveau-né pour le dissocier de l’aventure Louise Attaque, Tarmac ressemble bien à son aîné. Il porte la griffe de ce qui a fait le succès du groupe : la présence vocale unique de Gaëtan Roussel mise en relief par la corde sensible, si singulière elle aussi, du violoniste Arnaud Samuel. A priori, on a donc un peu de mal à oublier l’histoire du fameux quatuor en écoutant cet album. Pourtant, il n’est pas réalisé de la même façon que les précédentes épopées rock de ce tandem original (qui fuit toujours autant les interviews). Construit à partir de matériaux bruts, comme le souligne la pochette où des hommes s’activent à modeler des petits cailloux de goudron dans la chaleur, pour en faire une route bien lisse, cet opus a la qualité des productions les plus léchées.

De quatuor en duo

A l'exception d'un solo de trompette, tout a été réalisé par les deux compères. Arnaud Samuel et Gaétan Roussel se sont activés au violon, au Fender Rhodes (piano électrique), au mélodica et aux percussions, pour le premier, à la guitare acoustique et slide, aux percussions et aux chant, pour le second. Ecrit l'hiver dernier à l'issue d'une tournée, ce premier album-duo a été enregistré en une vingtaine de jours seulement dans les Landes.
Tarmac s’inscrit dans une veine acoustique qui rappelle certains penchants de Louise Attaque. On y ressent les réminiscences d’aéroports, de vacances, de visites guidées ou non, du blues ou du rock irlandais en passant par le Maghreb et le Machrek.
L’absence de batterie et la diminution des riffs de guitare permettent à la voix du chanteur de se développer de façon plus intimiste et plus déstructurée. Du coup, il s’offre aussi des écarts de langues en anglais, en français ou en espagnol (Camarades démocrates/Je vous ai compris/Nous sommes dispersés/Hé entendido vosotros/ les réformateurs sont cachés/ I understand your wishes derrière des arbres, des forêts).

Vous l’aurez compris, cet album touche aussi un peu à la politique, avec, comme toujours, la grâce poétique de l’écriture de Gaétan Roussel. Il aborde des thèmes déjà effleurés dans le dernier album des Louise Attaque, qui disait “ Du Nord au Sud /le long d'un méridien /l'élégance du voisin son tarmac est le mien /du Nord au Sud /je vais loin je rêve en plein /et si je veux je reviens ”, alors que Tarmac, plus mélancolique, d’un monde qui a “ besoin de mince et de ventru ”. Et enfin soupire “ Quelle belle idée que de savoir être en voisin un pont de suite/ Un chemin ”.
Au milieu de chansons revendiquant une liberté de penser la reprise de “ La ballade des gens qui sont nés quelque part ”, de Brassens qui fustige les chauvins et les cocardiers intolérants (aussi sur la compilation hommage “ Les Oiseaux de Passage ”), paraît donc tout à fait justifiée.

De surprises en émotions…

Même si l’on s’est peu à peu habitués à la voix et au violon, cet album recèle beaucoup de bonnes surprises et d’émotions. Sur une piste fantôme, accompagné au piano, Gaëtan Roussel réapparaît en duo avec un enfant qui chante en léger décalage avec lui, comme si, adulte et enfant ne pouvaient plus être à l’unisson. Emouvant et simple, ce titre s’achève par un métronome qui compte les mesures du temps qui passe…
Pendant ce temps, les deux plus jeunes membres de Louise Attaque, Robin Feix (basse) et Alexandre Margraff (batterie) ont également monté un groupe, Ali Dragon, tourné vers des expériences électroniques. Leur “ premier ” album devrait sortir au printemps 2002. En revanche, il faudra patienter jusqu'en 2003 pour un nouvel opus de Louise Attaque. D’ici-là, Tarmac se pressera prochainement sur les bitumes et asphaltes de France pour une série de concerts.

Tarmac : L’Atelier ( Atmosphériques/Sony Music)
Les Oiseaux de Passage (Mercury/Universal)