LA RUDA SALSKA SUR PIEDS
Paris, le 7 février 2002 - C’est peut-être en pensant à eux que Goldman a trouvé le titre de son nouvel album Musique pour les pieds… La Ruda Salska montre, affiche, proclame, qu’elle a tout compris, tout gardé, du meilleur des Satellites, de La Mano Negra et de tout ce que le versant festif du rock alternatif français a produit à la fin des années 80. Démonstration, tome troisième.
Le réel survolté
Paris, le 7 février 2002 - C’est peut-être en pensant à eux que Goldman a trouvé le titre de son nouvel album Musique pour les pieds… La Ruda Salska montre, affiche, proclame, qu’elle a tout compris, tout gardé, du meilleur des Satellites, de La Mano Negra et de tout ce que le versant festif du rock alternatif français a produit à la fin des années 80. Démonstration, tome troisième.
La Ruda Salska plaît. Elle plaît même sans se forcer grâce à la magie du rythme identitaire qu’elle s’est choisie depuis ses débuts en 1993 : une adaptation rock de l’inusable rocksteady, le ska, ce reggae sous mezcal qui donne en trois secondes des fourmis dans les jambes, la nuque, les bras (et les pieds, merci Jean-Jacques !). Avec ce troisième album, Passager du réel, La Ruda Salska se tient avec rigueur à son credo, même si elle se permet quelques harmonies vocales pop du meilleur goût.
Cuivres saignants et mélodies sans failles habillent les textes engagés-dégagés du chanteur Pierre Lebas. Il faut écouter, dès le début du CD, L’Odyssée du réel («Le premier cri / Le deuxième souffle / La troisième dimension»), ou la meilleure manière de saluer à la fois le vingt-et-unième siècle et la trente-huitième rupture amoureuse… Et aussi «Histoires improbables» («Comme les marées / J’ai l’humour noir») ou la meilleure manière de rendre allègre l'énième charge contre la pollution de la planète. Notons que notre Salska est rudement aidée dans ses œuvres par la production d’Andy Lyden (U2, Marley, Satellites, Wampas…) qui offre à ses musiques une prise de son impeccable.
Au gré de ce disque de fête, de jeux et de rythmes, on trouve encore un joli coup de gueule en direction des politiques, L’Evolutionnaire («Plutôt que de soigner la sémantique, la diction / Faites des travaux pratiques d’éthique et de conviction»), un hommage plus qu’entraînant aux nanars des années 70 (La Comédie à la française), deux fictions polar-BD, plusieurs cris libertaires et même un raton laveur (Carnet d’une égérie, texte sur la haine qui, déclamé en rap, produirait un effet dévastateur, exactement inverse à celui de son interprétation rock-ska).
La Ruda Salska est née en 1993 à Saumur, adorable ville de garnison du centre de la France, «le bastion de l’ordure» d’après Trust. Dès le départ, les huit individualités qui composent ce collectif suivent la saine école illustrée par Matmatah et quelques autres : des concerts, des concerts avant toute chose. Plus de 400 à l’heure actuelle dont, en 2001, les Vieilles Charrues et les Eurockéennes. Entre 95 et 98, La Ruda Salska autoproduit aussi deux albums (Le prix du silence et L’art de la joie) avant de signer, en 2000, chez un des labels de pointe de Sony, Yelen. Sort aussitôt un live d’anthologie, survolté. Avec Passager du réel, la Ruda Salska franchit une étape de plus, celle de la professionnalisation. Sans oublier de la faire rimer avec autodérision.
Jean-Claude Demari
Passager du réel (Yelen/ Sony)
La Ruda Salska en ligne