Alain Souchon quartet
Comme Julien Clerc et Renaud avant lui et avant Véronique Sanson à l'automne prochain, Alain Souchon cède, depuis janvier, aux charmes de l'acoustique. Mais, comme dans le cas de ses collègues, cette tournée est plutôt une formule allégée qu'un réel récital acoustique… Histoire d'une version 0% à l'occasion de son passage au Casino de Paris du 29 avril au 10 mai.
Acoustique et branché
Comme Julien Clerc et Renaud avant lui et avant Véronique Sanson à l'automne prochain, Alain Souchon cède, depuis janvier, aux charmes de l'acoustique. Mais, comme dans le cas de ses collègues, cette tournée est plutôt une formule allégée qu'un réel récital acoustique… Histoire d'une version 0% à l'occasion de son passage au Casino de Paris du 29 avril au 10 mai.
Alain Souchon est une star populaire. Après une tournée de 140 dates entre 2000 et 2001, le revoilà parti depuis janvier 2002 pour une nouvelle virée quasi quotidienne à travers la francophonie d'ici et d'ailleurs (Dom-Tom, Québec, Belgique,…). Et partout, c'est le plein, des mois à l'avance, avec standing ovations à la clé. Partout, une foule sage, hétéroclite, se presse avec fidélité et enthousiasme aux concerts de ce chanteur qui depuis son premier album en 1974 n'a jamais déçu son vaste auditoire, sans cesse renouvelé. Devant le Casino de Paris, c'est comme partout ailleurs. Deux heures avant le début du spectacle, de longues files d'attente se serrent sur le trottoir de la magnifique salle de la rue de Clichy. Au milieu du public, des people aussi différents que Adamo ou Dani prouvent l'adhésion collective à l'univers Souchon.
Débarrassé de ses complexes
A l'aube de ses 58 ans, le chanteur est plus que jamais à l'aise sur scène. La grande bringue timide et gauche des débuts joue aujourd'hui de cette pseudo maladresse qui fit sa singularité lorsque la vogue était plutôt au disco macho et satiné. En jeans et chemise cintrée bleu ciel, les pieds en dedans, les cheveux en bataille, Alain Souchon nous semble si familier. Surtout quand, seul à la guitare, il attaque la soirée par la P'tite Bill "elle est malade", merveilleuse ritournelle tristounette de 1977. Parce que, tout en restant très ancré dans son temps, son répertoire ne prend pas une ride. Qu'ils traitent des malaises de la vie, des relations tendres mais difficiles entre les gars et les filles ou des absurdités de notre époque, les textes de Souchon, comme leurs musiques, brillent par leur justesse et leur pertinence.
C'est aussi pour ça que la forme de cette nouvelle tournée (déjà vieille de trois mois) va comme un gant à cet homme-là. Mais il y a pourtant bien peu de différences avec la précédente (2000/2001) qui s'appelait déjà "Tout simplement"… Cette année, il s'est entouré de trois musiciens, contre quatre avant : Albin de la Simone aux claviers, Michel-Yves Koechman aux guitares et Fabrice Moreau à la batterie. Mais à eux trois, ils jouent d'au moins dix instruments ! Donc la formule acoustique et allégée est parfois un leurre… Sur certains titres, la carte électrique est même résolument de mise (Au raz des pâquerettes, Ultra moderne solitude, Tout ce que vous voulez).
Poétique et drôle
Néanmoins, la poésie d'Alain Souchon, en demi-teinte, ni gaie ni triste, est bien là, étrangement envoûtante. Il chante la désuétude (Quand j'serai KO, J'étais pas là) et les déceptions (la Vie ne vaut rien, J'ai perdu tout ce que j'aimais). On retrouve des classiques dont on bredouille les paroles sans les avoir jamais apprises (Sommerset Maugham, Jamais content, le Bagad de Lann-Bihoué). Et on découvre des textes méconnus dont le tendre Portbail et cette phrase, symbole du personnage Souchon :"Toi qui trouves que pour un garçon, j'aime trop les fleurs…".
Le tout, 26 titres arrangés par Régis Ceccarelli et Renaud Létang, forme un ensemble homogène dont ressort parfaitement la voix de l'artiste, claire et joliment mise en avant. Cette voix, c'est celle aussi de l'acteur Alain Souchon, celui qui raconte de longues histoires, confirmant à la fois ce plaisir de jouer un personnage (le sien, riche de tous ses clichés) et une vraie force comique. Le récit du jeune chanteur envoyé par sa maison de disques dans un "centre de changement d'image de chanteur" vaut le détour. Sans compter sur l'incontournable personnage de cette fable, comme de la vie de Souchon : Laurent Voulzy qui "chaque jour, monte une heure sur le piédestal au fond de son jardin". Fausse boutade pour une vraie complicité entre les deux hommes qui, depuis 25 ans, sont d'inséparables co-auteurs de leurs disques respectifs. Voulzy passe d'ailleurs parfois sur les concerts de son "frère", au fil de la tournée, entamer un duo ou deux pour le plaisir du public. Avant de clore la soirée, Alain Souchon évoque aussi son fils Pierre, auteur de quelques textes dont Petit tas tombé ou C'était menti.
Une pop star qui s'ignore ?
Les seize Casinos de Paris de cette tournée auront rassemblé près de 24.000 personnes soit bien plus qu'un Bercy. Mais jamais on ne verra Alain Souchon sur une méga scène, n'ayant aucun goût pour le gigantisme. Si en 2001, il fait partie du club fermé des cinq artistes français ayant vendu un million d'albums (pour Au ras des pâquerettes), l'interprète d'Allo Maman Bobo privilégie le confort des petites salles. De la même façon, il fuit aussi les festivals. S'il a rempli trois Zénith parisiens de 4.000 places lors de sa précédente tournée, le rôle de rock star n'est pas son truc. Discrètement engagé (Sol en Si, les Enfoirés, Amnesty), Souchon a toujours su brouiller les pistes entre cette légèreté apparente et une force indicible. Ce mariage fut son passeport vers le succès, c'est depuis le vecteur de sa longévité.