Amina, la Méditerranéenne

Il y a bien eu cette compilation Nomad sortie en catimini, une apparition ici ou là dans un film ou un spectacle¹, mais il faut bien l'admettre, Amina était d'une grande discrétion ces derniers temps. Trop occupée ailleurs (tournées aux Etats-Unis, en Afrique...), elle semblait nous ignorer. C'était un malentendu. J' attendais seulement une proposition déclare-t-elle entre deux sourires.

Une flamme toujours ardente

Il y a bien eu cette compilation Nomad sortie en catimini, une apparition ici ou là dans un film ou un spectacle¹, mais il faut bien l'admettre, Amina était d'une grande discrétion ces derniers temps. Trop occupée ailleurs (tournées aux Etats-Unis, en Afrique...), elle semblait nous ignorer. C'était un malentendu. J' attendais seulement une proposition déclare-t-elle entre deux sourires.

On en rêvait et le festival Les Méditerranéennes a répondu à son attente. Cela s'est passé samedi soir à Argelès-Sur-Mer. Un retour qui n'a pas déçu et sans doute le prologue d'une nouvelle opération de séduction et de reconquête du public français, dont la deuxième étape devrait être un concert à La Cigale à Paris le 19 octobre, en première partie de Cheb Kader.

Depuis 1996, l'année de leur première édition, Les Méditerranéennes, sont un rendez-vous repéré parmi les festivals dédiés aux musiques du monde. Installées jusqu'alors à Céret, petite ville de 7000 âmes au cœur du pays catalan, elles se déplacent cette année jusqu'à Argelès-Sur-Mer, à quelques kilomètres de là. Assis sur l' herbe en pente douce, on peut apercevoir la mer en retrait derrière la scène, quand le ciel est encore clair. Elle trace la ligne d'horizon au-delà des vignes qui entourent le château Valmy, domaine viticole sur la route de Collioure dont le parc semé de fontaines et cerné par des arbres est serpenté de sentiers. Un endroit rêvé pour goûter aux joies d'un festival qui prolonge l'été.
Organisé par la société productrice de spectacles Azimuth, les Méditerranéennes célèbrent les musiques populaires de la Méditerranée. Parmi les temps forts de cette 6ème édition, on se souviendra notamment de l'ébouriffante prestation du trompettiste sicilien Roy Paci (ancien compagnon de route de Manu Chao) et de son gang Aretuska, qui retiendront le public devant la scène malgré la pluie et l'orage. La veille, en ouverture de soirée, avant Simon Shaheen, Idir et Khaled, Amina, entourée d'un groupe soudé et persuasif a séduit par sa fraîcheur, son naturel, la qualité de sa voix sans reproche et a offert au public des Méditerranéennes la primeur de nouvelles compositions. Brève rencontre sur un banc, quelques heures avant de monter sur scène.

RFI : Le cinéma vous accapare-t-il désormais davantage que la musique ?
Amina : Non. D'ailleurs je n'ai pas de projet actuellement. J'aimerais tourner plus, mais il est vrai que je cherche davantage à rencontrer des gens de musique que des gens de cinéma. Le cinéma, c'est toujours arrivé un peu par hasard, comme un accident. Un accident heureux. Les rôles que j'ai interprétés m'ont tous apporté quelque chose, appris des choses sur moi. Si je choisis de m'investir dans un film, c'est parce que je sens que c'est vraiment important pour moi à ce moment-là et que j'ai envie de défendre le rôle qui m'y est proposé. Dans Inch Allah dimanche de Yamina Benguigui, j'interprète le personnage d'une femme immigrée qui perd la boule, vit dans les cartons, pensant chaque jour qu'elle va rentrer au pays. C'est un film qui montre toute la difficulté de l'immigration. Quand je suis retournée en Tunisie cette année où je n'étais pas allée depuis trois ans, il s'est passé quelque chose en moi. Pour la première fois, je me suis retrouvée à pleurer en partant. Je quittais la terre de mes racines.

RFI : Si l'on vous a peu vue en France ces derniers temps, vous avez en revanche pas mal tourné à l'étranger.
Amina : Depuis deux ans, j'ai eu une vraie boulimie de concerts. L'an dernier par exemple, j'ai fait une grosse tournée aux Etats-Unis où j'ai participé notamment à un concert pour la paix à New York, après le 11 septembre, invitée par Simon Shaheen (musicien palestinien installé aux USA). J'ai chanté en Angleterre (Womad), en Scandinavie, suis passée par le Mozambique, le Soudan, l'Ethiopie... Cet été je suis allée au Liban. Je n'y étais pas retournée depuis plus de dix ans. Tout a radicalement changé. Les gens y font la fête, ont une fiévreuse envie de vivre.

RFI : Condensé de votre carrière, la compilation sortie récemment, Nomad , propose également deux inédits.
Amina : Il y a Ederlezi, le titre du film Le Temps de Gitans, que je chante en arabe et Ya Baba, une chanson traditionnelle tunisienne. Actuellement, je n'ai plus de maison de disques, mais je pense déjà à mon prochain album. Je prépare des maquettes avec Imothep de IAM et je rencontre différents producteurs. Parmi ce que j'ai écouté récemment, j'ai beaucoup aimé le travail de Philippe Eidel notamment. En fait j'ai envie de revenir à des choses beaucoup plus acoustiques.

RFI : Aux Méditerranéennes, vous dévoilez déjà un peu ce que sera cet album à venir?
Amina : J'interprète trois chansons nouvelles. D'abord Saaddi (un jour l'amour de ma vie viendra, je n'ai pas d'argent mais mon cœur à lui offrir...), écrite avec un des musiciens de Nass el Ghiwane. J'y mélange Maroc (musique gnawi) et Brésil (chant de capoera). Il y a aussi Jungle Montmartre, une chanson jungle où je chante en arabe, passe par une sorte de valse à la Piaf, puis par un univers aux sonorités indiennes. C'est comme les séquences d'un film qui défilent. Enfin, Ah-Ya-lieli, évoquant une femme à qui le cousin a promis le mariage, mais qui n'en finit pas d'attendre. Elles ont été beaucoup à attendre comme cela au bled, pendant des années. Aujourd'hui les choses changent. La nouvelle génération n'attend plus et c'est tant mieux !

ALBUM : Nomad / Mercury

¹Mon coeur est devenu tolérant..., une création de Goran Bregovic en juin dernier au festival de Saint-Denis, en banlieue parisienne.