La réussite d'Urban Peace

Le Stade de France à Saint-Denis, en région parisienne, a accueilli le 21 septembre Urban Peace, le plus gros concert de hip hop jamais organisé dans l'Hexagone, voire en Europe. Quelques vingt-cinq artistes de la scène française se sont produits entre 17 h et minuit et demi, devant plus de 40.000 personnes enthousiastes.

Les meilleures intentions du monde

Le Stade de France à Saint-Denis, en région parisienne, a accueilli le 21 septembre Urban Peace, le plus gros concert de hip hop jamais organisé dans l'Hexagone, voire en Europe. Quelques vingt-cinq artistes de la scène française se sont produits entre 17 h et minuit et demi, devant plus de 40.000 personnes enthousiastes.

Tous les amateurs de foot connaissent le sacro-saint Stade de France. Implanté sur la commune de Saint-Denis, en banlieue nord, il accueille de temps en temps des événements non sportifs. Ce week-end, les aficionados de hip hop étaient de sortie. En bande ou en couple, avec leur père pour les plus jeunes, ils étaient venus écouter le gros des troupes du rap et du R'n'b français, sous l'œil attentif des forces de police largement mobilisées à cette occasion. Depuis plusieurs jours, de nombreuses rumeurs circulaient quant au danger de ce type de concerts. La sécurité était devenue l'enjeu le plus important dans cette affaire, avant même la performance artistique attendue, accentuant s'il en était besoin, un sentiment diffus d'inquiétude.

Quelques cars de CRS plus loin et quelques fouilles au corps plus tard, une fois entré dans l'enceinte du Stade, on a enfin pu apprécier une affiche exceptionnelle, et c'était bien tout l'intérêt de cette manifestation. Kool Shen avait dans ces colonnes avant le concert, exprimé son scepticisme devant des passages de quinze minutes au plus pour chaque artiste programmé. Evidemment, cela ne laissait que peu de temps à chacun pour montrer son savoir faire sur scène. S'il est vrai que cela ne posait aucun problème au patron de IV My People, aguerri depuis longtemps à ce genre d'exercice, comme d'ailleurs à Joey Starr son ancien acolyte aujourd'hui à la tête de B.O.S.S., cela n'était pas forcément le cas pour d'autres. Difficile d'occuper une scène de 1500 m² même portés par les acclamations d'un public connaisseur. Le groupe Sniper eut beau faire scander au public les lettres de son nom, leur prestation, par manque d'expérience sans doute, fut un peu décevante. La performance ne se résume pas à traverser la scène de part en part, dans un sens puis dans l'autre !

Finalement, cela n'avait qu'une importance relative quant à la qualité globale du concert, puisque les groupes enchaînaient vitesse grand V. A peine le temps d'entendre Pit Baccardi, qu'on passait aux Neg'Marrons. A peine finis les déhanchements de Lady Laistee, qu'on passait au discours peu consensuel de Joey Starr ! La mise en scène enlevée d'Eric Checco, qui alliait musique, grafs, danse hip hop, etc., ne laissait pas la place aux blancs si fréquents dans ce genre de manifestations. Pas besoin non plus de faire de vrais changements de plateau puisqu'il n'y avait pas de vrais musiciens. Les organisateurs de Urban Peace avaient la louable intention de montrer l'étendue de la culture hip hop et ainsi, de donner une image plus positive de ce mouvement.

Cela aurait dû passer par une sonorisation irréprochable. Il est logique que l'acoustique d'un stade et celle d'une salle de concert n'aient pas grand chose en commun. Des tribunes, les lyrics étaient fondus dans une bouillie sonore boostée par des basses surdimensionnées, histoire de balancer aux spectateurs, LE gros son. Sur la pelouse, on entendait un peu mieux, heureusement. On peut seulement se demander s'il était vraiment utile de proposer un programme pareil dans ce genre d'endroit. Sabrer le fond au profit de la forme. Que serait le rap sans ses textes !

Les organisateurs ont voulu mettre en avant l'immense potentiel de cette scène rap et R'n'b hexagonale, même si de nombreuses critiques ont fusé quant au choix des artistes, aux intentions mercantiles ou encore à l'opportunité même de ce rassemblement. Mais qui ne tente rien n'a rien et on saura gré à Urban Peace de nous avoir permis de retrouver quelques-uns des meilleurs groupes comme la Fonky Family, par exemple. Un album live et un DVD devraient sortir d'ici quelques semaines, histoire de graver dans le sillon numérique un grand moment de musique.