Duo de charme à Koudougou
Les Nuits Atypiques de Koudougou se sont achevées dans la poussière ocre de cette petite ville burkinabè par les spectacles de ces deux artistes, pendant féminin sur la scène mondiale de leurs compatriotes Youssou N’Dour et Salif Keïta.
Coumba Gawlo Seck et Oumou Sangaré clôturent la 7e édition des NAK
Les Nuits Atypiques de Koudougou se sont achevées dans la poussière ocre de cette petite ville burkinabè par les spectacles de ces deux artistes, pendant féminin sur la scène mondiale de leurs compatriotes Youssou N’Dour et Salif Keïta.
Elles ne s’étaient jamais rencontrées. Mais les vicissitudes des voyages en Afrique ont placé ces deux femmes, qui n’étaient initialement pas programmées le même jour à Koudougou, côte à côte dans l’avion entre Bamako et Ouagadougou.<?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /> L’espace d’une heure trente de vol, elles ont fait connaissance et ce sont deux amies qui sont arrivées à l’hôtel Photo Luxe prêtes à discuter la nuit durant à bâtons rompus. Coumba Gawlo et Oumou se sont trouvées de nombreux points communs, grâce à un parcours parallèle, ces jeunes stars dans leur pays ayant par la suite obtenu une consécration internationale. Oumou Sangaré, la protégée de Nick Gold, l’homme du Buena Vista Social Club – bien avant les papys de La Havane - et Coumba Gawlo Seck, propulsée dans une inattendue carrière internationale après sa rencontre avec…Patriiick Bruel et sa reprise du mythique Pata Pata de Myriam Makeba. Deux femmes qui, malgré tout, ne se retrouvaient pas par hasard à Koudougou. En effet, cet atypique festival africain se tenait cette année autour du thème « Culture,femme et développement » avec une marraine de choc, la sémillante malienne Aminata Traoré, ancien ministre et agitatrice sur la scène de l’anti-mondialisation. Ces destinées croisées impliquaient une interview croisée de cet deux artistes, femmes avant tout et ambassadrices de charme de leur culture respective, celle des griots du Sénégal pour Coumba Gawlo Seck et celle de la tradition mandingue pour Oumou Sangaré.
RFI : Que vous inspire ce thème de « Culture, femme et développement » développé ici à Koudougou ?
OUMOU SANGARE : Ce thème m’inspire beaucoup, car c’est le combat que je mène depuis des années pour faire entendre la voix de la femme africaine. Ce qui m’a beaucoup plu dans ce festival, c’est qu’il est organisé par des hommes africains et qu’il est dédié aux femmes.<?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" />
COUMBA GAWLO SECK: Comme Oumou, c’est un honneur pour moi de participer à un festival organisé par des hommes et de contribuer à une manifestation se déroulant sur le continent car c’est encourageant de voir des gens y croire et prendre l’initiative d’entreprendre ce genre de manifestations.
RFI : Que pensez-vous de l’organisation d’une telle manifestation ?
OUMOU S : L’organisation est très bonne. C’est l’un des rares très beaux festivals que j’ai vus en Afrique de l’Ouest parce que ce n’est pas facile d’y organiser des festivals de cette envergure. L’idée est là, elle est bonne, on sent que c’est réalisé par des personnes qui ont la volonté de réaliser quelque chose de positif pour l’Afrique. C’est du jamais vu pour moi en Afrique de l’Ouest.
COUMBA G.S : Ce n’est pas évident d’organiser des manifestations de ce genre en Afrique, mais il faut bien le faire pour que les gens y croient. Ce continent est rempli de personnes de talents, mais qui n’ont malheureusement pas beaucoup de moyens. J’ai été impressionnée par le dispositif que j’ai trouvé sur place. Parce que tout un village animé comme cela pendant plusieurs jours, ce n’est pas évident, car la ville a des moyens qu’il n’y a pas au village. Néanmoins, tout est en place et chacun fait son maximum pour que cela se passe bien. C’est magnifique.
RFI : Vous aviez déjà participé à des manifestations de ce genre en Afrique ?
OUMOU S : Oui, j’étais au MASA à Abidjan mais ce n’était pas aussi bien organisé. Cette année, j’étais aux festivals d’Essaouira et de Rabat au Maroc, où l’organisation était très bonne. Et puis au FESPAM, à Brazzaville. Mais, franchement, l’organisation des Nuits Atypiques de Koudougou est très différente de ce que j’ai vu ailleurs.
COUMBA G.S : Oui, j’ai eu l’occasion de beaucoup tourner en Afrique, mais c’était généralement dans de grands stades, que ce soit en Ethiopie, au Kenya, au Mali ou même récemment, ici, au Burkina, où j’ai joué au stade du 4-Août. Mais dans un festival de ce type, c’était une première.
RFI : Vos carrières internationales ont débuté après la rencontre avec vos mentors respectifs, Nick Gold et Patrick Bruel. Comment se sont-elles passées ? <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" />
OUMOU S : Lorsque j’ai fait mon premier album en 1990, la communauté malienne installée en France m’a invitée à faire un spectacle à Paris. Mon producteur d’alors, Ibrahima Sylla, avait donné mes disques en distribution à World Circuit, le label de Nick Gold. Lors d’un concert à Londres, Nick Gold, que je ne connaissais pas, est venu avec mes tee-shirts, mes CD. J’ai dit : « Oh ! J’ai fait un CD ! ». Il était tout surpris, mais tellement content de me rencontrer. Il ne savait pas que mon CD était sorti sans que je sois au courant. Il était très surpris et m’a dit qu’il ne voulait pas travailler avec moi sans que je sois d’accord. Il a cassé le contrat avec Sylla et est venu directement avec moi. Depuis lors, nous travaillons ensemble.
COUMBA G.S : C’est par le biais du Sénégalais Saïdou Khalidou, qui avait travaillé chez Universal, que j’ai rencontré Patrick Bruel à Paris. Dès la première écoute de mes chansons, il a été séduit par ma voix. Depuis, nous avons fait beaucoup de choses ensemble et j’avoue que je ne regrette pas de l’avoir connu.
RFI : Quels espoirs ont suscité ces rencontres ?
OUMOU S : Nick Gold a beaucoup fait pour moi. Ce que je voulais, c’était faire passer un message, et pas seulement auprès d’un public africain. Ce n’était donc pas une rencontre fortuite, c’est quelqu’un qui aime beaucoup ce que je fais, la musique traditionnelle du Wassoulou et, Inch Allah, peut-être davantage.
COUMBA G.S : Depuis la sortie de cet album avec Bruel chez BMG, je n’ai pas arrêté de tourner. J’ai eu des disques d’or, des disques de platine un peu partout dans le monde. C’est une belle expérience que je ne regrette pas.
RFI : Avez-vous dû faire des concessions pour cette seconde carrière ?
OUMOU S : En fait, c’est la même musique que je joue, je ne change pas les mélodies. Le rythme que je fais pour l’Afrique est le même pour l’Europe. Je veux que l’Occident découvre le son naturel de l’Afrique. Je n’ai pas envie, comme certains, de faire un disque pour l’Europe et un autre pour l’Afrique. J’ai un rythme que je veux faire découvrir au monde entier.
COUMBA G.S : Les concessions, on en fait toujours de part et d’autre. Vous savez, j’ai une voix du Sahel et on n’apprend pas la chanson au Sénégal. C’est un don. Je suis née chanteuse, je suis de famille Gawlo, une famille de griots. Et la musique que je fais est une musique traditionnelle modernisée par des percussions. Mais quand on veut s’ouvrir au marché international, il faut respecter ses normes, ses règles, tout en gardant son identité, sa voix et tout le naturel de la femme africaine. Je crois que c’est très important.
RFI : Quels sont vos projets ?
OUMOU S : Un nouveau disque bientôt pour l’Europe, qui est d’ailleurs déjà sorti en Afrique. C’est un album que j’ai enregistré avec Boncana Maïga. Il a très bien marché en Afrique. On en a vendu 200.000 exemplaires en un mois au Mali. Dans l’histoire du pays, cela ne s’était jamais vu à cause des pirates. L’album a été le premier disque d’or du Mali. J’étais heureuse. C’est cet album, Laban, mélange de la musique du Wassoulou et du son occidental, qui sortira au printemps prochain en Europe.
COUMBA G.S : Actuellement, je travaille sur un album qui doit sortir au Sénégal d’ici 15 jours. J’ai d’ailleurs interrompu la session d’enregistrement pour venir ici, à Koudougou. Par ailleurs, je prépare mon album international avec Bruel qui sortira courant 2003.