Axelle Red

On savait Axelle Red adoratrice de soul. Face A/Face B, son nouvel album, l’impose en reine des dancefloors ! Sur la douzaine de titres, la toujours fan des Seventies en livre une bonne moitié taillée dans le rythme et les paillettes disco. Une ambiance "boule à facettes" qui ne rime pas qu’avec légèreté, puisque l’incendiaire Flamande n’oublie jamais de nourrir sa plume avec des sujets de société.

Ou le disco à texte !

On savait Axelle Red adoratrice de soul. Face A/Face B, son nouvel album, l’impose en reine des dancefloors ! Sur la douzaine de titres, la toujours fan des Seventies en livre une bonne moitié taillée dans le rythme et les paillettes disco. Une ambiance "boule à facettes" qui ne rime pas qu’avec légèreté, puisque l’incendiaire Flamande n’oublie jamais de nourrir sa plume avec des sujets de société.

Face A/face B est un titre un peu schizophrène… Y aurait-il donc deux Axelle Red?
Deux, trois, même une dizaine ! Ceci dit, c’est le premier album sur lequel j’ai, en quelque sorte, trouvé la paix entre toutes ces contradictions. Je peux, par exemple, être extrêmement réaliste et d’un autre côté, avoir une naïveté presque revendiquée. Ça se traduit aussi musicalement : j’aime la musique qui groove, tout en restant attirée par les belles mélodies. Pour moi ça reste la base.

Musicalement, cet album pourrait-il s’appeler Entre Marvin (Gaye) et Michael (Jackson) ?…
Je le prends comme un compliment ! Mais, il manquerait une référence blanche, un Burt Bacharach, une Carole King ou tout simplement Abba. Il y a en tous cas beaucoup d’ingrédients différents dans cet album, et c’est pour moi un plaisir.

Le penchant dancefloor de l’album ne peut-il pas déconcerter certains de vos fans ?
C’est vrai que systématiquement, certains ont une préférence pour mes slows. Mais j’ai donné la couleur dès le premier album: dans Sensualité ou Le monde tourne mal, il y avait déjà le groove,la couleur soul. Déjà à l’époque, certains me disaient "Pourquoi as-tu été faire un album soul?!" En d’autres termes "Qu’est-ce que j’en ai à foutre de cette soul?!" Le prix que j’ai reçu cet été pour le million de ventes de A tâtons est en ce sens rassurant. Ceci dit, la moitié de Face A/face B est constituée de morceaux down-tempo.

Sur cet album, vous abordez plus volontiers des thèmes de société. Une manière de ne pas danser idiot, de faire du disco à message ?
Le premier à faire ça, c’était Marvin Gaye. On peut danser sur What’s goin' on, car c’est une musique super sexy, sans forcément penser au thème grave de la chanson. C’est vrai qu’il n’y a pas ce genre d’exemple avec le disco. Mais j’ai l’impression que le message passe plus facilement ainsi car les gens ne s’en rendent pas compte ! Je sens en tous cas que c’est mon quatrième album car j’aborde plus volontiers certains thèmes que d’autres. J’ai plus de facilité, d’expérience.  A l’époque de A tâtons, j’avais écrit Rien que d’y penser qui parlait aussi d’un enfant de la guerre. Mais c’était mon regard sur cet enfant et le résultat était assez lourd, j’ai donc changé le texte avant de le mettre sur l’album. Là, je me sentais prête avec Pas maintenant : j’adopte le point de vue de l’enfant ce qui me semble plus juste. Il y a d’autres thèmes comme ceux de Venez vers moi ou Voilà tout ce qu’on peut faireque je n’aurais pas pu être capable d’aborder avant. Il ne faut pas oublier non plus que le français n’est pas ma langue maternelle…

Votre rôle d’ambassadrice extraordinaire de l’UNICEF joue-t-il un rôle dans ce processus ?
Oui, mais c’est déjà le cas depuis 97. Ce désir était déjà présent, mais je n’arrivais pas à le traduire en chanson. Il y a tout de même eu des chansons comme Ma prière qui parlait du monde. Mais cette fonction à l’UNICEF pèse effectivementdans la balance : certaines images resteront éternellement gravées dans ma mémoire. Je me souviens notamment d’une petite fille au Laos, le pays le plus touché par les mines anti-personnel, qui m’a demandé "Est-ce que tu écriras une chanson pour nous?". Je lui ai répondu "Je ne te promets rien, mais je vais essayer". Le résultat, c’est Pas maintenant.

Il y a une touche "années 80" dans cet album. En ce sens, vous collez à une certaine tendance actuelle…
Ça fait déjà un moment qu’on puise dans les années 80. Peut-être quatre, cinq ans. En ce qui me concerne, c’est un album disco que j’écoutais en vacances qui a tout déclenché. Ça m’a rappelé que j’étais une "disco-grenouille", une fan ! Que j’avais un grand faible pour Michael Jackson, Earth Wind & Fire, Kool & the Gang… Je me suis effectivement demandée si les gens n’allaient pas croire que je courrais après une tendance. Mais après tout, pourquoi ne pas se faire plaisir ? D’autant qu’on m’a traitée de "disco-grenouille" toute mon adolescence : j’étais donc bien placée pour faire ce genre d’album. Je me suis fait plaisir, tout simplement, et je crois que c’est finalement le disque qui me ressemble le plus : on y retrouve toutes mes facettes. Même le côté pop, qui était plus en exergue sur mon tout premier disque Sans plus attendre.

Quel regard porte la fan de soul sur le courant Nu soul (mélange de jazz et de soul, très doux, ndlr). Pourriez-vous tenter ce genre d’aventure musicale ?
Peut-être dans le futur ? Je suis en tous les cas ce qui se passe, et ne suis pas insensible à des artistes comme Angie Stone ou Alicia Keys. Il y a effectivement un courant très intéressant. Personnellement, même si mes références restent la soul, le funk, je mélange ces musiques d’origine américaine avec ce qui vient d’Europe, et notamment d’Angleterre. Des groupes comme Massive Attack, Portishead. Le mélange d’un Jamiroquai ou d’une Björk. Actuellement, ce sont ces tendances européennes qui me parlent le plus.

C’est peut-être la raison pour laquelle vous êtes avant tout perçue comme une chanteuse francophone par le grand public, et non comme une chanteuse soul…
Je ne sais pas. De toutes façons, je ne cherche pas à avoir ce genre d’image. Je chante mes chansons à ma façon. J’ai fait un concert soul, parce que je voulais que mes fans découvrent la vraie soul, pas seulement la mienne, mais si je cherchais cette étiquette soul, je pourrais me rendre la vie plus facile, en prenant des clichés. Or je cherche vraiment à faire ma musique, c’est ce qui m’intéresse : avoir une étiquette Axelle Red ! C’est ce que je cherche depuis le premier album.

Cette sincérité, ce naturel ne fait pas franchement de vous une personnalité "rock’n’roll" au sens imagé du terme: vous faites l’éloge du couple (Toujours), de la maternité, vous dites non à la drogue dans Blanche neige
Je trouve que Blanche neige est assez rock’n’roll justement ! Dans cette chanson, je ne dis pas non à la drogue : pour moi, c’est comme l’alcool, la seule différence se situe au niveau de la légalité. A partir du moment où on ne nuit pas à soi-même et aux autres, je n’ai rien contre. Mais bon, ce n’est pas la question ! Pour moi être rock’n’roll, c’est faire ce que l’on ressent, être très honnête et ne pas faire de concessions. Je me sens parfois beaucoup plus rock’n’roll que les artistes qui ont cette étiquette. D’un autre côté, je m’en fous un peu.

C’est peut-être ça être rock’n’roll !
Je fais ma musique et j’essaie de faire en sorte que les gens l’apprécient. La plus belle des récompenses quand j’essaie de faire groover ma musique, c’est de voir les gens danser ! C’est le même principe avec mes paroles. C’est tout ce qui compte.

Axelle Red Face A/Face B (Virgin) 2002