BOURGES ELECTRO

Depuis 1985, le Printemps de Bourges via les Découvertes, permet à de jeunes artistes de se produire en concert lors du festival. Cette année, ce sont près de 3.000 artistes et groupes qui se sont présentés dans l’une des quatre catégories proposées : hip hop/reggae/ragga, rock/pop, chanson et musiques électroniques. Dans cette dernière, le Français Krikor a été élu Découverte Ile-de-France. Manu Baron, responsable de la programmation du festival en profite pour faire le point sur l'électro à Bourges.

Rencontre avec Krikor, un artiste Découverte et Manu Baron, responsable de la programmation

Depuis 1985, le Printemps de Bourges via les Découvertes, permet à de jeunes artistes de se produire en concert lors du festival. Cette année, ce sont près de 3.000 artistes et groupes qui se sont présentés dans l’une des quatre catégories proposées : hip hop/reggae/ragga, rock/pop, chanson et musiques électroniques. Dans cette dernière, le Français Krikor a été élu Découverte Ile-de-France. Manu Baron, responsable de la programmation du festival en profite pour faire le point sur l'électro à Bourges.

Découverte, Krikor qui se produit le 23 avril au 22 Ouest, ne l’est pas vraiment pour tous ceux qui suivent de près l’évolution de la scène électro parisienne. Depuis sept ans, patiemment, ce DJ, producteur et bassiste s’impose comme l’un des plus brillants représentants d’une techno minimale très influencée par le courant allemand, le plus excitant depuis l’explosion de la house music. Rencontre.

Comment s’est déroulé concrètement ce concours ?
C'est simple. Je me suis inscrit directement à la FNAC en remplissant un dossier. J’ai envoyé des morceaux originaux, un mix ainsi qu’une biographie. Ça se déroule en plusieurs temps : le jury opère une présélection par région et ensuite, tu dois te produire devant un public. C’est à ce moment-là que les membres du jury choisissent les deux artistes électro qui représenteront la région, en l’occurrence Signal Electrique et moi. 

Lors de cette soirée, vous vous êtes donc produit en tant que DJ ? 
Oui. Mais quand j’ai appris que j’étais présélectionné pour le festival je me suis dit autant se produire en live. J’ai eu donc deux mois pour le mettre en forme. Et là, à quelques jours de ma prestation, je suis toujours en train de la travailler. Ce sera donc un concert que je proposerai au Printemps de Bourges et non pas un DJ-set qui est forcément moins intéressant. En fait, ce sera un live 'laptop' (fait à partir d'un micro-ordinateur portable : ndlr). J’ai donc à ma disposition mon portable, une carte son, un contrôleur qui me permet de gérer en externe l’ordinateur, une table de mixage et un sampler pour envoyer des sons.

Pensez-vous que ce soit une bonne chose pour les artistes électro de participer à ce genre de concours ? 
C’est vrai que je n’ai jamais été fan des concours. Je ne pense pas qu’il y ait le meilleur ou le moins bon dans les musiques électroniques : c’est tellement large. Ce qui est intéressant en revanche, c’est de pouvoir faire découvrir au public un son différent de ce qu’on entend partout.  C’est la seule chose que je vois de positif dans ce concours et ce n’est déjà pas si mal.

Mais vous êtes quand même quelqu’un de reconnu dans le milieu électronique français. Ça ne vous fait pas bizarre d’être considéré comme une découverte ?
Bien sûr, mais je navigue pour l’instant dans un milieu d’initiés. Je n’ai pas fait beaucoup de disques et je suis dans un style musical bien particulier. Le Printemps de Bourges, je le vois vraiment comme un festival rock, et le public qui s’y rend ne s’intéresse pas vraiment à l’underground. Les disques que l’on produit, principalement des vinyles sont disponibles uniquement à quelques milliers d’exemplaires. J’espère donc toucher plus de monde avec ce festival.  Mon style est minimal donc pas forcément populaire…


Justement, vous ne sortez que des maxis vinyles de vos propres morceaux ou alors des remixes de Gainsbourg et Demon, par exemple. Est-ce le cheminement classique pour tous les producteurs de musique électronique ?
Oui, ça commence comme ça mais je veux continuer ainsi. J’aime bien le format du maxi, tu peux faire ça rapidement. Bien entendu, je pense m’atteler cette année à la production de mon premier album. Ce qui est sûr, c’est que je continuerai toujours à produire des formats courts pour d'autres DJs. 


Ce style minimal est en train de s’imposer un peu partout dans le monde… 
Effectivement, depuis quelques mois, cette scène est en train de se développer en France avec des artistes comme Ark, Cabanne ou Feadz, par exemple. A l’étranger, les travaux d’Akuphen, d’origine canadienne, intéressent de plus en plus de monde. La preuve, le nouveau maxi de David Guetta serait une pale copie de ces titres. Je me produis régulièrement devant un public qui ne connaît pas cette musique et qui y adhère rapidement. Reste après le problème de réseaux pour la faire connaître. Les maisons de disques, elles, n'ont pas vraiment envie de la pousser et de la promouvoir. Il faut dire qu’elles ont tellement mis en avant des copies de copies de French Touch que les ventes se sont cassées la figure. Pourtant des artistes qui ont des choses à dire, il en reste beaucoup et ce ne sont pas les moins talentueux. 


Manu Baron est à la tête de la programmation du Printemps de Bourges depuis 3 ans. Il fait partie de cette nouvelle génération de programmateurs qui a convaincu le public de la richesse des musiques électroniques. Grâce à lui le Printemps de Bourges s’est éloigné de la variété pour suivre des chemins plus aventureux. Il est aussi programmateur de La Villette-Numérique à Paris.

Quelle était la place de la musique électronique au Printemps de Bourges lors de votre arrivée ?
Manu Baron
 : A l’époque, le Printemps de Bourges s’était lancé comme d’autres festivals dans l’organisation de grosses soirées, style rave party. Les têtes d’affiche étaient des DJs locomotives, tendance techno lourde. La première année, nous avons décidé de diversifier les lieux et d’éclater la programmation. Nous avions gardé l’idée d’une soirée spéciale électronique mais avec une programmation plus 'arty' que les précédentes. C’était un essai, pas complètement transformé. L’année suivante, nous avons décidé de travailler avec les clubs de Bourges. Ce qui a très bien fonctionné. Nous avons lancé aussi les Audio Brunch et les parcours électroniques qui ont donné une autre image de la création électronique. 


Avez-vous avec la baisse des ventes de disques, réduit la programmation électronique ? 
Pas vraiment. Si on considère Massive Attack comme un groupe de la mouvance électronique, non ! En comparaison avec l’édition 2002, c’est plutôt le rap qui a subi de plein de fouet cette régression. Nous suivons de très près l’évolution des musiques électroniques et nous mélangerons des concerts rock avec des DJs plus électro. Nous avons lancé par ailleurs la thématique des labels : deux artistes d’un label "affrontent" deux artistes d’un autre label.
Et puis nous allons faire jouer les 2many dj’s (duo belge connu aussi sous le nom de Soulwax, qui ont popularisé le mariage électro-rock en mixant par exemple Nirvana et Basement Jaxx) dans une véritable salle de concert de 500 personnes. L’électro est toujours présente à Bourges mais sous des formes diverses. C’est sa richesse.


Coup de coeur ou révélation de cette édition ? 
M83. un jeune duo français basé à Antibes et qui est signé sur le jeune label Goom. Leur album est absolument magnifique et sur scène, il devrait le sublimer. J’aime aussi beaucoup Abstrakt Keal Agram. Ces deux groupes sont le futur de la musique électronique en France.

Willy  Richert