YACOUB AUX ETATS-UNIS
Depuis le 12 avril 2003, Gabriel Yacoub, ex-chanteur du groupe Malicorne, a entamé une mini-tournée américaine de sept dates. De passage à New York, pour deux jours de repos et de détente, le musicien encore bouillonnant de son concert de la veille à Philadelphie a donné ses impressions à chaud à notre correspondante sur place, Karine Wong.
Le musicien folk se produit sur les scènes américaines
Depuis le 12 avril 2003, Gabriel Yacoub, ex-chanteur du groupe Malicorne, a entamé une mini-tournée américaine de sept dates. De passage à New York, pour deux jours de repos et de détente, le musicien encore bouillonnant de son concert de la veille à Philadelphie a donné ses impressions à chaud à notre correspondante sur place, Karine Wong.
Quel bon vent vous amène aux Etats-Unis ?
Un bon vent justement... qui s'accompagne d'une petite tournée de deux semaines avec un trajet un peu en zigzag dû au hasard du "booking" et des gens qui m'engagent. De centres culturels en clubs, je ballade ma musique "folk" comme on dit ici. C'est un style très répandu aux Etats-Unis, par conséquent il existe un véritable circuit pour les artistes comme moi. En tout cas, suffisamment important pour venir jouer dans des tonnes d'endroits différents et j'en suis ravi.
Mais est-ce que les gens vous connaissent ici ?
Oui et non, je dirais ! Le grand public ne me connaît pas mais par contre, dans le circuit folk que je viens de mentionner, les gens me connaissent parce que la presse et les radios font bien leur travail, ce qui est capital pour pouvoir tourner régulièrement. Précisons que c'est un milieu très spécialisé, relativement marginal et hors des grands circuits commerciaux et des grands systèmes du showbiz. En revanche, cela représente énormément de monde, beaucoup de festivals par exemple et ces gens-là me connaissent parce que je tourne ici depuis près de 20 ans. Pour être plus précis, depuis 1982 pratiquement tous les ans avec un petit break de cinq ans ces dernières années. J'ai joué dans tous les états et les gens ont fini par me connaître un peu.
Est-ce que c'est difficile l'Amérique pour un artiste comme vous ?
Ce n'est pas difficile parce qu'ici la musique est quelque chose de beaucoup plus normale entre guillemets, en tout cas plus habituelle que chez nous. En France, on peut considérer la musique comme un produit de luxe. Les concerts sont très chers, les disques sont fortement taxés... Il y a des gens qui ne vont jamais au spectacle ou qui ne se déplacent jamais pour écouter de la musique vivante alors qu'ici, c'est quelque chose de parfaitement habituel. On va choisir un bar pour aller boire un verre entre amis parce que tel groupe ou tel artiste va s'y produire. Les disques sont pratiquement moitié prix. Les artistes ici sont des gens normaux. Ce ne sont pas des espèces d'excentriques ou des gens à part que l'on traite d'une manière un petit peu spéciale. Croyez-moi, c'est très agréable parce que l'on se sent bien accueilli, très à l'aise. On est un artiste à part entière. L'autre côté très positif, c'est la façon dont les Américains réagissent c'est-à-dire très spontanément, ils viennent nous parler à la fin des concerts sans réfléchir de la façon dont on va les juger si ils disent ça ou ça. J'aime beaucoup ce naturel, on a l'impression vraiment d'avoir touché et d'avoir fait réagir et pour un artiste c'est une belle récompense.
Comment êtes vous perçu par le public américain ?
C'est très intéressant, lorsque j'ai commencé à tourner dans les années 80 aux Etats-Unis, il y avait un véritable problème de langue. Les gens parlent très peu le français et à l'époque, beaucoup étaient bloqués. Si le concert était en français, il n'était pas question qu'ils se déplacent. Depuis, il y a eu un phénomène qui a bouleversé cet état d'esprit, c'est l'intérêt pour les musiques du monde. En dix ans, les gens ont été exposés aux musiques du monde entier... Il n'y a donc plus ce blocage de la langue comme chez nous où on écoutait les Beatles quand on avait 12 ans. On ne cherchait pas à comprendre les paroles et on ne parlait pas un mot d'anglais. Je crois que ça leur a permis d'aiguiser leur curiosité et maintenant, je rencontre beaucoup de gens qui me dissent : "Je ne parle pas du tout français, mais j'adore le son de la langue française" ou bien encore, cela leur rappelle les quelques années de "high school" qu'ils ont complètement oubliées. Il y a une espèce de fantaisie et de grâce dans la langue qu'ils aiment énormément et qui les fait aujourd'hui se déplacer. Cela les touche quelque part ! Sur scène, je chante en français à une ou deux exceptions près. J'ai sorti un disque tout récemment aux US qui était censé s'adresser plus au moins au public américain, avec des arrangements très simples, acoustiques. Quand on tourne ici, il faut rester simple, on n'a pas les moyens d'amener un groupe conséquent... J'avais envie de faire un disque qui donne l'image de ce que l'on fait sur scène en France.
Aujourd'hui encore lorsque l'on parle de vous, on pense tout de suite à Malicorne... Est-ce que ce n'est pas frustrant de se voir replongé dans le passé systématiquement ?
Je suis très partagé... Ce qui me fait plaisir, c'est que les gens en parlent encore alors que le groupe n'existe plus depuis très longtemps. Les disques se vendent encore assez bien d'ailleurs. Cela me fait très plaisir qu'on en parle, ça ne me gêne pas, c'est juste une question de proportion et j'avoue que si l'on ne me parle que de ça, ça m'agace un petit peu. J'aime que les gens se souviennent d'une manière positive pour la bonne et simple raison que je considère mon travail comme un tout. Malicorne, c'est le passé que je ne renie pas, au contraire, ça fait partie d'une progression dans l'évolution de mon apprentissage. Alors encore une fois disons que cela ne me dérange pas si dans la conversation les proportions sont raisonnables.
Quel artiste américain peut-on comparer à votre style ?
Oh ! il y en des quantités. Ici, ces artistes sont appelés les "folk singers" comme on disait dans les années 70. Ce sont des gens qui écrivent des chansons qui dépassent le niveau des chansons de variété pour ne pas dire des chansons poétiques. Ils s'accompagnent très simplement, soit avec une guitare, soit avec des instruments acoustiques. La "folk music", c'est Bob Dylan et tout ce qui en a découlé. Alors, autant vous dire que des gens comme moi il y en a des centaines voire des milliers dans ce pays. En France, on n'a pas véritablement ce phénomène. Un gars comme Brassens, si il avait été américain on aurait dit c'est un "Folk Singer". Cabrel aussi par exemple. En France il y a la variété et la chanson bien rangées dans des espèces de compartiments. Ici, ce style de musique est très populaire, c'est pas "country", c'est "folk". Ça s'inspire des musiques traditionnelles plus ou moins comme Dylan l'a beaucoup fait au début. Il écrivait ses textes sur des mélodies traditionnelles et c'est ce que je fais. C'est un peu à cette famille d'artistes que je me reconnais appartenir.
Quels sont les projets des mois à venir ?
Je suis tenté de vous répondre qu'il n'y en a pas étant donné que la vie que je mène est une vie de création perpétuelle et de tournées. Je tourne partout et tout le temps... (rires). Cela étant dit, nous avons fait deux très beaux concerts en janvier dernier à Quimper et de cette aventure sortira certainement un disque live. Appelons cela un projet ! Sinon, j'ai bien l'intention de passer mon temps à continuer... sans m'arrêter !
En concert :
25 avril, The Freight & Salvage Berkeley CA
26 avril, Folsom Community Center Folsom CA