Orchestre National de Jazz
Chose unique dans la jeune histoire de l’Orchestre National de Jazz, son directeur est un récidiviste. Le guitariste Claude Barthélémy est élu pour la deuxième fois à la tête de cette formation dont il recrute lui-même les membres. Une quinzaine de musiciens qui pendant deux ans vont jouer les créations originales signées Barthélémy. Un chef d’orchestre facétieux, joueur (pléonasme) et surtout ravi d’avoir l’opportunité d’être reconduit dans un deuxième mandat qui démarre avec la sortie d'un disque Admirabelamour.
Deuxième mandat pour le guitariste Claude Barthélémy
Chose unique dans la jeune histoire de l’Orchestre National de Jazz, son directeur est un récidiviste. Le guitariste Claude Barthélémy est élu pour la deuxième fois à la tête de cette formation dont il recrute lui-même les membres. Une quinzaine de musiciens qui pendant deux ans vont jouer les créations originales signées Barthélémy. Un chef d’orchestre facétieux, joueur (pléonasme) et surtout ravi d’avoir l’opportunité d’être reconduit dans un deuxième mandat qui démarre avec la sortie d'un disque Admirabelamour.
Admirabelamour… De qui ou de quoi s’agit-il avec ce titre d’album ?
Elle est admirable, elle est belle, c’est mon amour... C’est mon admirable bel amour. C’est ma femme bien sûr, mais c’est aussi la musique. Essayez avec votre femme. Dites-lui "Tu es mon admirabelamour", vous verrez, l’effet est garanti.
Vous avez déjà été directeur de l’ONJ de 1989 à 1991. C’est la première fois qu’un directeur rempile…
Je suis resté très près du dossier et apparemment, j’ai réussi à présenter le projet le plus convaincant. Et puis, mon premier mandat remonte à douze ans et pendant ce temps, j’ai fait d’innombrables autres choses. Très souvent grâce à mon passage à l’ONJ d’ailleurs. Ce fut une formidable carte de visite. Et puis, j’ai fait de gros progrès en matière d’écriture. Je suis hypnotisé par cette idée de diriger l’ONJ, j’en avais très faim. J’aime bien ce costume, ça me plaît énormément. C’est assez pénible parce qu’on est sans cesse sollicité par des milliers de choses qui n’ont rien à voir avec la musique. Mais c’est en même temps passionnant de tenir les rênes de cette machine.
Comment avez-vous choisi votre équipe de musiciens ?
Les musiciens que j’ai réunis ont aux alentours de trente ans et ils sont le résultat de l’implantation des classes de jazz dans les conservatoires. Ce sont des gens extrêmement brillants. Ils arrivent à un âge où ils se posent des questions sur leur cheminement et leur propos. Ils sont en plein devenir et il y a une espèce de fraîcheur et de désir chez eux qui est passionnant. C’est un peu comme une écurie de Formule 1. Ça court magnifiquement pendant le concert et le reste du temps, on ne fait que la régler.
Cet album s’ouvre sur un morceau de bravoure Queue fer, dix minutes de mélanges musicaux aussi divers que variés. Quel est le propos d’un tel morceau ?
Ce sont des musiques qui ont en commun le fait que tous les jazzmen y ont accès. Je veux dire par là qu’entre le jazz et la salsa, il y a des rapports évidents. Entre le jazz et le rock, il y a plus que des rapports. Ici, on se place du point de vue de notre art et on explore les autres musiques. Je ne pourrais pas faire cela avec d’autres musiciens, de rock ou de funk. Il n’y a que des musiciens de jazz qui ont suffisamment de science de la musique et d’ouverture d’esprit pour faire cette musique. Alors, quand vous avez la chance d’avoir un orchestre pareil et de telles compétences, ce serait dommage de s’en priver.
C’est votre côté «dévoreur de musique» qui ressort peu à peu…
Je ne suis pas devenu un fanatique de reggae parce que j’écoute Bob Marley depuis 74. Il y a plein de choses que je connais depuis très longtemps et qui font partie du discours. Je ne me suis pas mis à la mode de la techno il y a trois jours. Je suis branché dessus depuis très, très longtemps. Je mastique longtemps les choses avant de les régurgiter… On peut avoir l’impression qu’il y a beaucoup de choses différentes sur cet album mais si on écoute bien, on trouvera toujours un lien. J’aime bien trouver la musicalité commune, au delà des styles.
Qu’écoutez vous ces temps-ci ?
Il y a un compositeur de musique contemporaine qui s’appelle Laurent Martin qui m’a donné son dernier enregistrement et je me suis acheté le disque d’Eminem 8 Miles. Je suis en train de me faire un cadavre exquis avec le croisement de ces deux musiques… J’ai décidé d’en faire une pièce avec l’ONJ. C’est parce que c’est incongru, politiquement incorrect, que cela me plaît. Je suis arrangeur, donnez-moi un navet, donnez-moi une tulipe et je vous en ferai quelque chose. C’est mon job !
Si je vous donne le nom des différents directeurs de l’ONJ, vous pouvez me donner un qualificatif ?
Allez-y.
François Jeanneau: Printemps
Antoine Hervé: Années 80
Denis Badault: Il m’a piqué mon nounours
Laurent Cugny: Un grand batteur
Stéphane Huchard: Gladiateur
Didier Levallet: Jazz-Jazz
Paolo Damiani: Je lui ai piqué son nounours
Claude Barthélémy (première époque): Fin d’un monde
Claude Barthélémy (nouvelle époque): Nouveau monde. Planète
Selon vous qu’est ce qui a changé dans le monde du jazz depuis la création de l’ONJ ?
Aujourd’hui, quand je parle à des gens de vingt à trente ans qui sont mordus de jazz et il y en a beaucoup plus qu’on ne croit, je suis fou de joie de voir que ces jeunes ne font plus de différence entre Pat Metheny ou je ne sais quelle star américaine.... et un musicien français. Le niveau des jazzmen en France et le niveau des musiciens en général, a fait un bond extraordinaire depuis les années Lang*. Le niveau musical français est énorme.
Et est-ce que les polémiques autour de l’Orchestre National de Jazz se sont tues?
On entend des conneries au sujet de l’ONJ… L’autre jour, quelqu’un me prenait à partie en me demandant ce qu’était un «jazz national»? Mais enfin! Est-ce que l’Orchestre National de France ne fait que de la musique française?Les gens perdent toute raison lorsqu’il s’agit de l’ONJ. Et c’est grave parce c’est un outil formidable de travail et de création…
C’est pour cela qu’il faut qu’on présente la meilleure musique possible pour qu’elle devienne incontournable. Il faut que je balance une image dynamique, gaie, jeune et qui représente l’ouverture en disant voilà des éclairages nouveaux sur ce qu’est le jazz. Si on singe les Américains, on nous dira qu’il ne sert à rien de refaire une musique qui existe déjà. C’est une identité qu’on a ici, qui est extrêmement métissée puisque la France est un pays de carrefour et qui a toujours été une bonne terre d’accueil pour le jazz.
Avez-vous un projet précis pour la Fête de la musique ?
Ce sera à la Maison de la Culture d'Amiens. Il y aura deux chorales de vingt chanteurs, plus une chanteuse, plus une harmonie. Au total, on sera cent cinquante à jouer... Cela s’appelle Tout un monde riant comme le peintre Mondrian. C’est un mélange de chansons qui vont de Syracuse à Fidèle mélangées avec le répertoire de l’ONJ, il y aura du Trenet, du Téléphone, Noir Désir, du Rita Mitsouko.
Des projets de concerts à l’étranger?
On espère jouer au Canada et en Europe du Nord. Mais moi, je ne rêve que d’une chose, c’est de jouer en Asie et en particulier au Japon.
*Jack Lang, ex-ministre de la Culture français
Claude Barthélémy Admirabelamour Label Bleu 2003