Anggun fête la musique en Indonésie
Vingt et un an après sa création, la Fête de la Musique du 21 juin est plus que jamais un événement international. Au milieu de plus de 12.000 initiatives, celle du Centre Culturel français de Jakarta est particulièrement notable : organiser un grand concert pour le retour chez elle, en Indonésie, d'Anggun. C'était le 16 juin dernier, RFI Musique y était.
Retour de la fille prodigue.
Vingt et un an après sa création, la Fête de la Musique du 21 juin est plus que jamais un événement international. Au milieu de plus de 12.000 initiatives, celle du Centre Culturel français de Jakarta est particulièrement notable : organiser un grand concert pour le retour chez elle, en Indonésie, d'Anggun. C'était le 16 juin dernier, RFI Musique y était.
L’Indonésie n’a pas oublié Anggun. Trois ans après son dernier concert dans l’Archipel, la chanteuse a reçu un accueil de "star" pour son retour sur la scène musicale indonésienne. Télévisions, radios, magazines people, grands quotidiens… personne n’a manqué à l’appel lors de la conférence de presse donnée à l’hôtel Méridien de Jakarta. La raison de cet engouement est simple. Celle que l’on surnommait ici Lady Rock au début des années 1990, entame depuis quelques années une très prometteuse carrière internationale.
Succès français
En 1995, la jeune Anggun, née en 1974, s’exile en France et "découvre une autre langueet une autre musicalité". L’assimilation se fait rapidement et accouche d’un premier album (Anggun, Sony Columbia, 1997) mélange de musique pop, hip hop et world, composé de titres en français et en indonésien. Un succès d’estime qui l’entraîne vers un second opus (Désirs contraires, Sony Columbia, 2000) composé, cette fois-ci, entièrement en français.
Elle perce ensuite avec brio le marché européen (déjà Disque d’or en Italie) avant d’enregistrer la bande-son du film Open Hearts en 2002. "Aucun autre chanteur de mon pays n’a réussi un tel parcours" glisse fièrement une jeune journaliste indonésienne lorsque la meute des photographes se jette sur la "star". Anggun se prête au jeu avec autant de professionnalisme que de plaisir. Disponible à toutes les sollicitations, elle répond sans mondanité aux interviews en tête à tête qui précèdent la conférence de presse. Elle écoute attentivement et de ce qu’elle connaît le mieux, la musique, elle parle très bien: "Chanter en Français dans mon pays? Pourquoi pas ? La langue ne doit pas être une barrière. Il faut être capable de la transcender. C’est comme la peinture. Il y a des tableaux qu’on ne peut pas regarder avec ses deux yeux. Il faut avoir comme un troisième oeil et se laisser emporter par l’émotion".
Artiste engagée ?
Mais son exil à l’étranger ne l’a pas pour autant détourné des mutations que traversent son pays depuis la chute du Général Suharto, l’homme qui a gouverné l’Indonésie d’une main de fer pendant trente ans jusqu’à sa destitution forcée en 1998: "Il y a de plus en plus d’artistes qui s’expriment ouvertement sur les grands sujets de société. Mais les Indonésiens sont très pudiques dans leur façon d’exprimer leurs sentiments. Il y a donc un changement qui peut paraître minime quand on le regarde de l’extérieur mais qui est en réalité très important." Elle-même s’est engagée très récemment pour la défense de l’environnement en enregistrement un disque avec une pléiade d’artistes internationaux (Gaïa, Dreyfus).
Elle se dit prête à recommencer l’expérience pour la protection de l’enfance mais estime toutefois qu’il ne faut trop mélanger les genres : "La politique et la chanson ne vont pas ensemble. C’est comme la religion. On peut écrire des chansons pour évoquer Dieu mais il ne faut pas faire étalage de ses propres convictions. Il y a des sujets sur lesquels il faut toucher le maximum de personnes et d’autres qui doivent rester dans l’intimité de l’âme". Prudente dans sa vie d’artiste, Anggun affirme qu’elle pourrait l’être beaucoup moins dans sa vie de femmelorsqu’on l’interroge sur les récentes tragédies qui ont affecté l’Indonésie (attentat de Bali, guerre à Aceh…): "Je ne m’engagerai pas en tant que chanteusemais je peux très bien m’engager en tant que personne, en prenant la plume pour écrire dans un journal par exemple".
Unique concert en Indonésie
En attentant, Anggun chante. Et elle chante très bien. Son concert, organisé sur l'initiative du Centre culturel français dans la petite salle archicomble (1.000 personnes) du Marzuki Center de Jakarta, fut un modèle de générosité. Anggun avait convié des talents en herbe dont les Marseillais de Galleon, le tout jeune Julian Cely, chanteur pop romantique pour lequel Anggun a composé une chanson, et l'étonnant groupe indonésien cyber-techno Cyno. Générosité aussi car la star a multiplié les facétiespendant son concert allant jusqu’à descendre dans la foule pour l’asperger de pétales de rose. Le public, très hétéroclite (jeunes et moins jeunes, français et indonésiens, Ambassadeur de France et midinettes survoltées) apprécia et la communion fut totale. Un tour de chant, exécuté sans fausse note qui avivait à la sortie autant de bonheur que de regret : ce concert sera le seul qu’Anggun donnera cette année, et avant longtemps sans doute, en Indonésie.