Ragga à la française
Représentants ragga du collectif musical Secteur Ä dont sont issus les rappeurs Passi, Doc Gyneco et Stomy Bugsy, les deux toasters français d’origine cap-verdienne et congolaise sont partis enregistrer leur dernier album Héritage en Jamaïque pour y travailler avec Mister Vegas et les légendaires Sly Dunbar et Robbie Shakespeare.
Troisième album des Neg' Marrons
Représentants ragga du collectif musical Secteur Ä dont sont issus les rappeurs Passi, Doc Gyneco et Stomy Bugsy, les deux toasters français d’origine cap-verdienne et congolaise sont partis enregistrer leur dernier album Héritage en Jamaïque pour y travailler avec Mister Vegas et les légendaires Sly Dunbar et Robbie Shakespeare.
Jacky et Ben-J ont attendu près de dix ans et deux Disques d’or pour partir, trois ans après le succès de leur second album Le Bilan, à la source de la musique qui les inspire depuis leurs débuts en banlieue parisienne avec leurs copains du Secteur Ä. On retrouve dans cet album la même approche que celle qui avait fait leur succès avec Passi dans le projet Bisso Na Bisso, puisqu’ils continuent à mélanger allègrement leur reggae à la musique de leurs racines, soukouss ou funana.
Partis en Jamaïque après avoir enregistré leur précédent opus à Londres, Jacky Brown le Capverdien et Ben-J le Congolais ont tenu à retrouver Tyrone Downie, l’ancien clavier de Marley, qui avait réalisé leur dernier album. Se plonger dans l’ambiance de Kingston était un challenge pour les deux compères. "Nous avions tout préparé à Paris avant notre départ. On avait choisi pour la section rythmique Sly et Robbie qui avaient bossé avec Marley et Gainsbourg pour l’album Aux Armes, etc., réservé le studio, tout balisé histoire d’éviter les galères.Les maquettes avaient bien été avancées avant de partir et nous savions ce que nous voulions réaliser sur place", raconte Ben-J.
Evolution des conditions de travail pour la recherche d’un nouveau son, certes, mais il leur fallait rester dans la continuité de ce qui avait fait le succès de Rue Case Nègres et du Bilan. Tyrone Downie était donc là pour fédérer les musiciens lors de l’enregistrement aux Anchor Studios de Kingston. "Pour ce troisième album, on a décidé de partir en Jamaïque travailler sur l’évolution de notre son. Si pour les deux premiers on tenait à imposer notre style et notre message, on a voulu cette fois-ci, solliciter l’expérience des anciens et repartir à la source du reggae" explique Jacky. Cette aventure jamaïcaine prouve aussi la volonté du groupe de refuser la facilité, en évitant de s’entourer de sa fidèle bande de copains. Les deux compères ont également contacté Frenchie, l’homme qui avait travaillé sur deux albums du groupe Raggasonic, pour compléter l’équipe à Kingston. L’énergie de ses instrumentaux dance hall et sa patte de programmateur firent merveille et grâce à lui, les deux Neg’Marrons ont rencontré Mister Vegas qui interprète avec eux le single Tout le monde debout,sorti à l’automne dernier.
"Une collaboration qui s’est vraiment faite au feeling. Mister Vegas a débarqué en studio alors que l’on enregistrait notre version du titre et le morceau l’a bien fait flasher. La musique lui a plu, sachant qu’elle est basée sur un rythme très en vogue dans l’île en ce moment. Il s’est installé dans un coin du studio et a écrit en une petite heure ses lyrics sur notre morceau" raconte Ben-J. "En côtoyant chaque soir Capleton, Beenie Man et d’autres stars de la scène dance hall jamaïcaine, on s’est fait un carnet d’adresses qui servira pour d’autres projets, qu’ils soient personnels ou ceux qu’on aura l’occasion de monter pour notre label Première Classe, devenu la pépinière de nouveaux talents de la scène ragga-hip hop de la banlieue nord.On a trouvé la filière pour de futures collaborations avec des DJs ou des artistes jamaïcains, et on est vraiment satisfait d’avoir réussi à partager nos vibes avec celles des Jamaïcains. C’est un disque qui sent bon la Jamaïque tout en restant fidèle à l’esprit Neg’Marrons".
En seize titres, Jacky et Ben-J ont été au bout de leur rêve. Mais ils n’oublient pas leurs éternels complices Pit Baccardi et Arsenik, que l’on retrouve sur Dead, en final de l’album, ni leurs racines africaines, celles qui ont été le creuset fédérateur de leur projet Bisso Na Bisso, en sommeil pour le moment. Héritage est un hommage à leurs parents, partis d’Afrique "pour venir en Occident rechercher la vie". Des valeurs familiales héritées des anciens que ces artistes élevés dans des cités dortoirs ne peuvent renier: "Pour tous ceux qui nous aiment, faut qu’on fasse mieux". Cet album est également un héritage musical qui les a conduits au pays du reggae, à la source du ragga.
Neg’Marrons Héritage (Small/Sony Music) 2003