Indochine

Comble de la désuétude artistique il y a encore peu aux yeux de certains, Indochine n’en finit pas de créer l’événement. Ils terminent ce vendredi 23 janvier leur Paradize Tour par deux concerts le même soir dans deux villes différentes (Bruxelles et Paris), et sortent 3.6.3, un double album live prélude discographique à un triple DVD.

Un son brut

Comble de la désuétude artistique il y a encore peu aux yeux de certains, Indochine n’en finit pas de créer l’événement. Ils terminent ce vendredi 23 janvier leur Paradize Tour par deux concerts le même soir dans deux villes différentes (Bruxelles et Paris), et sortent 3.6.3, un double album live prélude discographique à un triple DVD.

La résurrection est à la mode. Après Henri Salvador, remis en selle il y a trois ans grâce à sa Chambre avec vue, c’est au tour d’Indochine, synonyme il y a encore peu d’aimable "has been", d’être consacré à coups de chiffres de ventes à six zéros. N’en déplaise à certains observateurs, prompts à enterrer le groupe réduit à son seul membre fondateur, ou à crier au come back à chacune de leur nouvelle sortie, la bande à Sirkis s’affiche aujourd’hui en champions d’une industrie du disque en petite forme.

Pourtant, malgré son générique de luxe (Murat, Mickey 3D, Melissa Auf Der Maur…), leur Paradize, aux relents de rock indus n’était pas donné gagnant. "Quand on a amené l’album à notre maison de disques il y a deux ans, la moitié des gens étaient terrifiés : c’était dans leur jargon un album spé, c’est à dire spécialisé dans le rock. Ils pensaient en vendre 80.000 exemplaires" confie Nicola, qui ajoute par ailleurs avoir "plus vendu d’albums qu’à l’époque du très gros succès du groupe dans les années 80". Peut-être porté par un retour en grâce du binaire, Paradize emportera tout sur son passage : adhésion des critiques, lauriers en tous genre (Victoires de la Musique, NRJ Music Awards…), sans pour autant que son artisan ne dévie de sa ligne de conduite ("on a par exemple, décidé à un moment donné d’arrêter la commercialisation de J’ai demandé à la lune, parce qu’on trouvait qu’un million de singles, c’était largement suffisant et qu’on n'était pas parti pour ça, mais pour présenter un album"). Le triomphe modeste, Indochine ponctuait néanmoins en juin dernier leur tournée française par un passage à Bercy, l’antre parisienne des grands messes populaires. Une première pour un groupe rock français. Et l’occasion d’offrir aux Indofans une nouvelle sortie CD.

Live intégral

Vaccinés au live, et vraisemblablement transcendé par l’enjeu, le groupe livre ici un concert généreux, fidèle à l’esprit du dernier album. Le canal saturé fonctionne à plein régime, les guitares crachent leurs riffs avec bonheur tandis que Sirkis, semblant défier l’outrage des ans, transpire d’énergie juvénile. Logiquement, 3.6.3 feuillette les titres de Paradize, avec l’énergie de rigueur, et s’offre une revue de détails des tubes du groupe au détour d’un Indo club compilant Canary bay, Les tzars et autres Fleurs pour Salinger, standards hors d’âge, fédérant des fans de la première heure comme la génération Mickey 3D.

Au total, plus de deux heures d’offrandes pop livrées à un public acquis, pour un disque qui se veut le plus fidèle possible au concert. "C’était vraiment un point de vue de notre part de faire un live intégral". On peut ainsi goûter aux débordements de vitalité du live selon Indochine, à condition de ne pas se montrer trop regardant sur la qualité de l’enregistrement, laquelle inspire la plus grande circonspection. Brouillon, brut, bruyant, 3.6.3 n’est pas un modèle de haute fidélité, malgré "plus de deux mois en studio pour le mixage du cd audio". Explication avancée par Nicola Sirkis : "il y a eu un mixage, mais pas de retouche. Pour 99% des lives qui sortent qui sortent dans le commerce, on refait une voix par-ci, une guitare par-là, ce qui est normal d’ailleurs. On a pratiqué ça dans le passé par ce que de temps en temps la voix déraillait, qu’il y avait un problème de son. Pour Bercy, on a été bénis des dieux : on a décidé de tout garder parce qu’il n’y avait pas de grosse catastrophe". Pas de toilettage sonore donc, mais un live brut de fonderie, résultat d’un parti pris artistique certes louable, mais qui ne séduira pas les tympans les plus sensibles. "Beaucoup de gens se plaignent du son qui est assez brut, mais c’est un live : ce n’est pas un album de studio, mais enregistré en concert. Il y a le public et nous. On aurait pu faire un live complètement aseptisé, ça ne nous intéressait pas". Un bootleg officiel en somme. Intègre, brutal, et définitivement rock’n’roll !

Indochine 3.6.3 (Columbia / Sony) 2004