Sanseverino
Sanseverino qui, il y deux ans, faisait swinguer toute la France (boulevard périphérique compris) avec Les embouteillages revient aujourd'hui avec un album très attendu Les Sénégalaises. Intronisé grand mamamouchi du swing manouche, ce personnage de BD musicale n'a pas perdu de sa gouaille et de son humour tout en continuant à défendre ses belles idées. Rencontre.
Les Sénégalaises
Sanseverino qui, il y deux ans, faisait swinguer toute la France (boulevard périphérique compris) avec Les embouteillages revient aujourd'hui avec un album très attendu Les Sénégalaises. Intronisé grand mamamouchi du swing manouche, ce personnage de BD musicale n'a pas perdu de sa gouaille et de son humour tout en continuant à défendre ses belles idées. Rencontre.
C'est votre deuxième album mais vous avez toujours cette drôle de manie de dénoncer un tas de petits camarades dans vos chansons. Cette fois : Patti Smith "jeune", Freddy Mercury, Mitterrand et Michel Sardou…
(rires) Ben ouais… Sardou… Il paraît à peu près évident qu'on n'a pas le même bulletin de vote. Il me fascine. C'est le seul chanteur à apparemment ne jamais prendre de plaisir, jamais sourire quand il et sur scène. Comment fait-il ?
Pour ma "drôle de manie" disons que j'aime bien citer des noms de vrais gens, contemporains… Cela fait partie de ma façon de m'exprimer au quotidien. Je dis fréquemment : "Tiens, celui-la il a le pull de Sardou" ou "Celle-ci elle est coiffée comme Patti Smith". Quand je les évoque dans une chanson, ce n'est pas tant un hommage que l'opportunité d'insérer un nom qui sonne bien à l'oreille comme Jean-Pierre Darras ou Micheline Dax…
Une chanson qui prête moins à rire, en principe…. L'enterrement de votre grand mère….
C'est longtemps resté un mystère pour moi, les obsèques. Et plus j'y vais, plus je m'habitue. L'étau se resserre parce qu'avec l'age, la vie fait qu'on enterre de plus en plus de gens. D'une manière générale, je flippe pas mal sur la mort des enfants, des proches. Cela fait plus de dix ans que j'essaie de faire une chanson sur l'enterrement de ma grand-mère. Je n'y arrivais pas et je me suis rendu compte que simplement en citant cet événement avec un cortège de personnages imaginaires, je réussissais à me dégager du truc, à en parler facilement. J'adorais cette femme, ma grand-mère maternelle qui était une femme qui avait beaucoup d'humour et de la dérision sur tout. C'est la personne dont je tiens le plus…
Votre premier single s'appelle La Cigarette, une chanson qui va faire plaisir aux buralistes et aux fumeurs qui, en France, se plaignent de la hausse du prix du tabac…
J'ai voulu y glisser quelques réflexions apparemment anodines sur l'Etat qui augmente le prix de la cigarette dans l'espoir de nous faire arrêter de fumer, alors que ce même Etat continue de percevoir des marges énormes sur un produit qu'il dit nocif et mortel et s'en met plein les fouilles.
Si ce produit est dangereux pour la santé pourquoi continuer de l'autoriser en vente libre ? C'est évidemment terriblement hypocrite et en plus, c'est une arnaque. Ecrire sur un produit qu'il est dangereux, pour moi, c'est juste se prémunir contre d'éventuels futurs procès de victimes du tabac, comme on en voit aux Etats-Unis. C'est une tartufferie.
Toute votre musique est un hommage à la musique jazz-manouche et particulièrement le titre Michto la pompe… Depuis le succès de votre premier album, cette musique qui était un peu ignorée du grand public est de plus en plus appréciée. Est-ce que vous estimez que vous y êtes pour quelque chose ?
Ouh la ! Je sais pas moi… Disons que…Objectivement, je pense que oui, un peu. Mais pas plus que Bireli Lagrene. Mais j'ai du mal à l'admettre parce que, musicalement, je suis une merde par rapport à tous ces musiciens. Moi, je suis juste celui qui a eu le gros contrat chez une major.
Je continue d'aller voir entre deux concerts deux guitaristes merveilleux à la Chope des puces à St Ouen, Mondine et son fils Ninine. Cela doit faire trente ans qu'il jouent dans ce bistrot mythique. Il y a des fondus de musique manouche qui viennent du Japon pour assister à des boeufs ou à des concerts. Des endroits comme cela, il y en a de plus en plus à Paris. La Guinguette Pirate organise ce genre de soirée tous les mardis. Pour satisfaire cette culture swing, il faut aller à la Chope. C'est comme les fans d'Elvis qui vont à Memphis chaque année. Chacun son truc, moi je préfère aller à Lourdes !
En attendant Lourdes, peut–être irez vous à Dakar pour y chanter Les Sénégalaises…
Cette chanson part d'une idée ratée. Je voulais faire une chanson engagée sur le peuple africain. Peuple si magnifique, si souriant, si généreux, si riche de culture et qui se retrouve avec des présidents si… merdiques. Je m'interrogeais sur ce grand mystère, mais je ne suis pas parvenu à mettre cela en chanson. Pour moi, un président c'est un peu le reflet, l'essence d'un pays. En tout cas, cela devrait l'être. Et là, c'est l'inverse. Ils n'ont pas les dirigeants qu'ils méritent. Mais quelque part je ne me sentais pas le droit moi, petit blanc plutôt bobo, de dire : "Voilà vous êtes magnifiques, mais vos présidents sont des sales cons". Du coup, j'ai fait une chanson fantaisiste sur un espion qui craque sur les meufs africaines et parle un peu trop pour un agent secret.
Un mot, pour conclure, sur la mort de François Béranger…
François Béranger, c'est un mec dont le décès n'a pas fait plus de bruit que certains moments de sa carrière. Je n'ai pas mis de chanson de lui sur cet album parce que c'était d'une évidence implacable. Mais je mijote un album entier de reprises. C'est un auteur de chansons que j'ai adoré sur la totalité de ses quinze albums. C'était un mec sans retenue… Ce n'était pas mon maître, car j'espère n'avoir ni dieu, ni maître. Mais c'est quelqu'un que j'aimais beaucoup. Du début à la fin, il a été droit et les choses qui l'emmerdaient, il a eu raison de les dénoncer, parce que c'est le rôle d'un chanteur… (il se reprend). C'est le rôle de tous de dire les choses qui vont de traviole. Lui, n'a jamais déroger à cette règle, il est allé toujours tout droit.
Sanseverino Les sénégalaises Saint Georges / Columbia