Primavera sound 2004

Pour sa quatrième édition, le festival Primaverasound qui a eu lieu du 27 au 29 mai à Barcelone affichait un programme prestigieux marqué par le retour du rock et de la grosse guitare, avec des groupes phares légendaires tels que les Pixies ou les Primal Scream. La musique française actuelle n'était pas en reste: le programme affichait au contraire une belle palette d’artistes français allant de Blackstrobe, Colder, à Miss Kittin en passant par Julie Delpy, Benjamin Biolay et Dominique A. L'occasion pour RFI Musique de demander à Sébastien Prieto, responsable du Bureau Export de la Musique Française en Espagne, de nous parler de la place de la musique française actuelle en Espagne.

Une édition marquée par le retour du rock et de la chanson

Pour sa quatrième édition, le festival Primaverasound qui a eu lieu du 27 au 29 mai à Barcelone affichait un programme prestigieux marqué par le retour du rock et de la grosse guitare, avec des groupes phares légendaires tels que les Pixies ou les Primal Scream. La musique française actuelle n'était pas en reste: le programme affichait au contraire une belle palette d’artistes français allant de Blackstrobe, Colder, à Miss Kittin en passant par Julie Delpy, Benjamin Biolay et Dominique A. L'occasion pour RFI Musique de demander à Sébastien Prieto, responsable du Bureau Export de la Musique Française en Espagne, de nous parler de la place de la musique française actuelle en Espagne.

Le lieu du festival est magique : celui-ci est situé dans le Poble Espanyol, village construit pour l’exposition universelle de Barcelone en 1929, le tout sur la colline de Montjuic, grand espace vert dominant Barcelone. Jeudi 27 mai, l’ambiance est encore relativement intimiste et le programme plutôt électronique. Les Blackstrobe semblent un peu perdus sur la grande scène Rockdelux située en plein air à l’entrée du village, loin des clubs parisiens plus intimistes. Avec les 2 Many DJs qui leur succèdent, c’est le début de défaillances techniques qui malheureusement dureront jusqu’au vendredi soir inclus. C’est Miss Kittin qui clôt la soirée à 04h00 du matin, avec une performance efficace qui remplit la parterre de danseurs.

Le vendredi 28 mai voit la programmation de la grande scène Rockdelux très marquée par le retour de la chanson, car jusqu’une heure du matin y défilent des chanteurs accompagnés (ou non) plutôt que des groupes. Le concert de Lloyd Cole est très triste: celui-ci, programmé à 21h30 ne suffit pas à faire venir la foule tôt. Seul sur scène avec sa guitare classique, il livre à quelques 300 personnes un répertoire de chansons mélancoliques. Benjamin Biolay lui succède à 22h30 devant un parterre qui se remplit peu à peu. Accompagnés d’un pianiste, d’un guitariste et d’un batteur qui le mettent parfaitement en valeur, l’étoile montante de la chanson française entame alors une suite de chansons très belles dont l’éclectisme rappelle définitivement celui de Serge Gainsbourg, le tout marquée d’une tristesse assez communicative. On pourra cependant regretter que Benjamin Biolay n’est pas ou pas encore un artiste de scène. Retranché derrière une grande mèche de cheveux qui lui cache le visage, il communique peu avec le public, créant même la confusion en dédicaçant une chanson au soit disant regretté Henri Salvador. Par ailleurs, il faut souligner que Benjamin Biolay fait malheureusement lui aussi les frais d’une technique défaillante: la finesse des intonations du chanteur, ses mélodies légères et toutes en nuances ne permettent en effet aucun doute, la voix plate et pleine de parasites qui sort des hauts-parleurs n’est qu’un lointain écho de la sienne. Malgré cela, le séduisant Benjamin Biolay reçoit un bon accueil du public.

Le lendemain, les problèmes techniques semblent enfin réglés sur la grande scène Rockdelux comme le prouvent les belles performances de Julie Delpy puis de Dominique A. Le public est aussi plus à l’heure, soit parce que c’est le dernier soir du festival soit peut-être même pour entendre Dominique A, car celui-ci débute son concert à 20h45 devant quelques 1500 personnes visiblement attentives. Le chanteur est seul sur scène, avec deux guitares, l’une classique l’autre rock, et une machine qu’il commande au fur et à mesure du concert. La première chanson suffit à convaincre le public: sa voie forte et puissante sonne merveilleusement dans la cour géante du Poble Espanyol, et le chanteur à l’air concentré semble déjà tout donner de lui. Des chansons très noires là aussi, ponctuées par une guitare parfois très rock mais toujours résignée et écorchée, et un chanteur extrêmement touchant, très présent sur scène. Il n’en faut pas plus au public pour acclamer Dominique A qui réalise là un parcours sans faute.

Le festival Primavera Sound reste tout de même un festival très mixte de par son programme, où la musique électronique n’était pas en reste et où l’on pouvait aussi entendre des musiques aussi enjouées, différentes et innovatrices que celles des Chicks on Speed avec leur concert électro pop théâtral, les Scissor Sisters avec leur performance disco house endiablée, ou tout simplement les!!!, nouvelle révélation post rock américaine. Au total, malgré sa relative jeunesse, le festival Primavera Sound est déjà une référence en matière de festivals d’été, un festival ou l’on est sûr de trouver des musiques et artistes de qualité, dans un cadre en plein air magnifique.

Sébastien Prieto, responsable du Bureau Export de la Musique Française en Espagne, tire un bilan somme toute très positif sur la place de la musique française actuelle en Espagne.

Quelles sont les spécificités du marché espagnol de la musique actuelle, sont-elles importantes ?
Oui, car ce marché est très jeune et peu structuré puisqu’il date de l’avènement de la démocratie en 1976: il y a donc peu de productions nationales et peu de diversité musicale, et pour des musiques actuelles comme le dub, il faut encore créer la demande. De plus, le public est habitué à des concerts gratuits de fêtes municipales, plutôt traditionnels en matière de programmation. Enfin, les salles de concerts ne payent les artistes qu’en pourcentage d’entrées. A l’arrivée, en dehors de Barcelone qui est très ouverte à l’international, il est particulièrement difficile de faire tourner des artistes internationaux de musique actuelle en Espagne.

Quelle est la place de la musique actuelle française en Espagne ?
La musique actuelle française est bienvenue en Espagne et même recherchée. En ce qui concerne la musique électronique par exemple, l’Espagne étant un pays de clubs : des maisons de disques comme F Com y sont implantées depuis longtemps. De même, la nouvelle vague de la chanson française a aussi touché l’Espagne, avec par exemple Carla Bruni qui comptabilise quelques 45.000 albums vendus. C’est que le peu de diversité dans les productions nationales crée une demande de produits finis en Espagne, et la France est juste à côté et a une offre très variée. De plus, de nombreux festivals se sont développés et affichent une programmation internationale de qualité. Enfin, la presse espagnole réserve un très bon accueil à la musique actuelle française.

Ce bilan positif de la musique actuelle française en Espagne annonce-t-il un avenir prometteur ?
Hélas, la crise du disque touche tout le monde. Elle touche certes moins l’Espagne qui enregistre un recul de 7,8% des ventes de disques, chiffre inférieur à la moyenne mondiale de 10%. Mais c’est l’ensemble de l’industrie qui est touché et les grandes maisons de disques, qui financent en partie les Bureaux Export de la Musique Française, réduisent budget et personnel, à l’instar de Sony France qui n’a plus qu’une personne en charge à l’export.