Musique et cinéma du monde

Plus rapides que le tour du Monde de Philéas Phog, les 9 premières compilations de la nouvelle collection Musique & Cinéma du Monde initiée par le label MK2 Music propose un voyage à travers les B.O.F des cinémas des cinq continents.

Le tour du monde des musiques de films en 9 compilations

Plus rapides que le tour du Monde de Philéas Phog, les 9 premières compilations de la nouvelle collection Musique & Cinéma du Monde initiée par le label MK2 Music propose un voyage à travers les B.O.F des cinémas des cinq continents.

Souvent affaire de spécialistes, les musiques de films sont un genre musical en soi. « Qui n’a pas à la sortie d’une salle obscure, fredonné pendant des heures voire quelques jours, la musique du film qu’il vient de découvrir ? Universelles et insidieuses puisqu’elles autorisent des découvertes que la simple curiosité n’a pas toujours permis, les Bandes Originales impressionnent parfois plus durablement la mémoire que les images qu’elles accompagnent. « Ces musiques sontle parfum du film » comme aime à le rappeler Gréco Casadesus(*), un habitué de cet exercice qui consiste à imaginer la mélodie qui embrassera au mieux le rythme des images. Et quand ce parfum a les saveurs de l’exotisme, quand ce parfum invite au voyage immobile, on ne peut refuser le départ immédiat.

Curiosité et goût de la pluralité

Dirigé par Roei Amit, qui a lui-même sélectionné parmi un millier de BO et autant de films proposés par des spécialistes des cinémas et des musiques des pays ou continents abordés, cette nouvelle collection ravit tout autant le passionné de B.O.F que celui des musiques de monde. « La curiosité et le goût de la pluralité ont guidé la recherche » avoue le responsable de la collection. Le premier jet aligne pas moins 120 titres. Les films et les musiques retenus reflètent les caractéristiques propres aux cultures et aux imaginaires régionaux, mais ils sont également très contemporains et proposent des visions du monde d’aujourd’hui parfois méconnues » explique-t-il, avant d’ajouter « Des sons ethniquement marqués se mêlent à l’électronique, au jazz et à d’autres tonalités pour inventer des expressions hybrides et inédites. Enfin, des artistes réputés côtoient des œuvres et des auteurs à découvrir. ».

Classés par destination - le Proche-Orient, l’Amérique Latine (avec deux volumes, un pour l’Argentine et le Mexique, l’autre pour Cuba et le Brésil), la Péninsule Ibérique, l’Europe de l’Est, l’Afrique, l’Asie (deux volumes dont un entier consacré uniquement aux musiques de films indiens, ce cinéma indien étant le premier au monde par sa production et un best-of - ce répertoire est aussi une invitation à découvrir des œuvres cinématographiques ou musicales souvent ignorées par les distributeurs français et sur lesquels malheureusement chacun de ces volumes aux notes d’auteur quasi inexistantes, nous livre fort peu d’informations .

 

L’Europe de l’est festive et mélancolique à la fois

Sous des portraits de femmes au traité BD qui cherchent maladroitement à évoquer chacune des destinations, ces neuf digipacks s’ouvrent pour une fois sur leur longueur. Inévitablement, cette collection se distinguera dans votre discothèque. Le recueil bleu voué au B.O des musiques de films d’Europe de l’Est égrène un chapelet de musiques festives et mélancoliques à la fois, dont quatre titres fouinés dans les B.O. des films d’Emir Kusturica. Le très célèbre Ederlezi, un air traditionnel des Balkans arrangé par Goran Brégovic pour le Temps des Gitans remporte la palme d’or, nous remémorant les images sublimes et oniriques du réalisateur serbe. Autre film à succès, Gadjo Dilo de Tony Gatlif revient à nos oreilles par le biais de son Mama me.Plus étonnant, le hip-hop à tendance symphonique de Sushine pour Absolute 100 de Srdjan Golubovic ou l’Homebase du duo electro-soft viennois Dzihan & Kamien élargissent le champ musical de virée balkanique.

Un proche-Orient de rencontres

Le volume consacré au Proche-Orient (Israël, Liban, Palestine) s’ouvre par Leysh Nat’Ark, un titre interprété par Natacha Atlas et extrait de la B.O. de Chronique d’une Disparition du cinéaste palestinien Elia Suleiman. Il enfile plusieurs perles au fil de son tracklisting comme ce Mangal Song d’Israël Bright. Extrait de la B.O. de Barbecue People, un film de David Ofek et Joseph Madmony, Mangal Song séduit par ses rythmes enjoués. Plus loin Raoui, une supplique de la song-writer algérienne Soaud Massi accompagne avec grâce les images de Cerf-Volant du Libanais de Rondo Chahal-Sebbag. Sous des cieux proche, Nachum Heiman, un des musiciens phare de la musique israélienne des années 50 souligne avec The Milky Way Journey les intentions cinématographiques du palestinien Ali Nasser. Même le hip-hop est au rendez-vous avec le Biladi de Subliminal, un des deux rappers, “héros” de Channels of Rage. Ce documentaire réalisé par le Palestinien Halat Halachmi relate l’histoire du duo hip-hop - le Palestinien Tamer Nafar et l’Israélien Subliminal - empêchés de poursuivre leur collaboration pour des raisons de “real-politic”.

Les deux derniers titres sont de Soapkills, une formation électro-acoustique libanaise récemment signée en France et dont le nouvel opus est annoncé pour le mois de septembre. Au fil des titres présentés, on se prend à réinventer une géographie qui ferait fi des antagonismes territoriaux et réunirait tous ses musiciens frères sur l’écran blanc, nouvel étendard de la paix retrouvée. Ce n’est pas le moindre attrait de ces musiques de films, qui par leurs présences sur cette nouvelle collection nous invitent à fouiller un peu plus loin les cinémas et les musiques découvertes.

(*) Greco Casadesus est aussi l’actuel Président de l’Union des Compositeurs de Musiques de Films (l’UCMF)