Le retour de Sylvie

De retour sous les feux de l’actualité avec un livre autobiographique et un spectacle prévu pour la fin de l’année, Sylvie Vartan ajoute aujourd’hui un nouvel album à une discographie entamée il y a plus de quarante ans. Un nouvel opus sans surprise, taillé sur mesure pour ses fans les plus fervents.

Nouvel album et autobiographie pour Vartan

De retour sous les feux de l’actualité avec un livre autobiographique et un spectacle prévu pour la fin de l’année, Sylvie Vartan ajoute aujourd’hui un nouvel album à une discographie entamée il y a plus de quarante ans. Un nouvel opus sans surprise, taillé sur mesure pour ses fans les plus fervents.

De la triple actualité de l’ex-Madame Hallyday, cette nouvelle livraison, sobrement titrée Sylvie est sans doute la plus anecdotique. Si Entre ombre et lumière sa récente autobiographie, figure en effet en bonne place dans les classements de vente des libraires françaises, et que l’annonce d’un prochain retour sur la scène parisienne du Palais des Congrès, où elle fêtera avec quelques semaines de retard son soixantième anniversaire, constitue à elle seule un événement, les quatorze chansons de ce millésime 2004 ont en comparaison une teneur presque dispensable. Non que cette nouvelle sortie - la première après une large parenthèse de six ans - ne soit déshonorante, ou même véritablement ratée, mais la tonalité résolument conformiste qui se dégage à la première écoute de Sylvie tranche avec l’intimisme affiché de Sensible, dernier témoignage studio de l’ancienne égérie yé-yé.

Epaulée par les collaborateurs habituels en tête desquels Didier Barbelivien, Michel Mallory et David Hallyday et par une poignée de nouvelles signatures piochée dans le vivier des jeunes auteurs français (Daran, Florent Marchet), c’est effectivement sur un mode plutôt convenu que Sylvie Vartan amorce ce retour discographique, essentiellement motivé semble-t-il par la perspective de ses prochaines échéances scéniques. Pensé pour rythmer le spectacle à venir, Sylvie mise vraisemblablement sur la cote d’amour de son interprète, qui fait montre ici d’une belle énergie, quitte à minimiser toute prise de risque. A l’image de sa pochette, dont le verso montre une Vartan col relevé, prenant la pose dans un cuir rouge sang, bouche en coeur et regard mutin comme à la belle époque des mises en scène de Jean-Marie Perrier, l’album ressert, si ce ne sont des clichés, tout au moins des formules éprouvées : ballades à l’italienne (Tu sei dentro di me), ritournelles douces amères (La neige en été) ou néo-disco pailleté (Give me a reason). Une façon de survoler peu ou prou toutes les figures de style déjà expérimentées par l’artiste en quarante-trois ans de carrière…mais aussi de museler toute créativité, laissant une voie royale à un habillage passe-partout et volontiers clinquant, qui porte la marque de l’Anglais Paul Manners (Kelly Joyce, Tina Arena), chargé ici de la production. De fait, le disque n’esquive que trop rarement la facilité, comme au détour du familier On s’est tant aimé, resucée inavouée d’un vieux titre du duo pop Eurythmics (The miracle of love) à qui il emprunte harmonies et lignes mélodiques. Et il faut presque attendre le dernier titre, un ghost track justement nommé Invisible, pour atteindre des ambiances moins tonitruantes, et par définition plus propices à la grâce.

Recyclage faussement moderne, où les arrangements emphatiques desservent plus qu’ils ne flattent un timbre régulièrement dissonant (La neige en étéou autres Tangos argentins ne sont à cet égard pas exempts de reproches), Sylvie a la fâcheuse tendance de noyer ses titres les plus appliqués (Ce n’est pas rien, que co-signe Frédéric Lô, complice de Daniel Darc sur son dernier album) dans un mélange assez peu digeste de rythmiques de synthèse et de cuivres pesants. Aussi, on peut légitimement recevoir certains couplets ventant la passion ("Il serait bienséant/que je n’chante/ rien qui soit déconcertant/ On trouverait charmant que je serve un air simple et entraînant/ On me veut sage et rassurante/ Je suis l’image tranquillisante" avant d’entonner le refrain ardent de Je ne plaisante pas) avec une pointe d’ironie…

Il n’empêche. Il y a dans ce Vartan 2004 une forme d’anachronisme fade, mais paradoxalement rassurant. Un certain sentiment de confort et d’indulgence mêlés, l’impression d’avancer en terrain connu. Reste qu’un album comme Sylvie, s’il demeure tout à fait écoutable, hypothèque sérieusement toute forme d’audace artistique -tel n’est, ceci dit, pas son propos. L’industrie du disque se lamentait récemment des scores soi disant alarmants des ventes de CD, ramenant le secteur dix ans en arrière, selon certains observateurs. Resservir des formules sans risque, voire un poil rétrograde, n’est peut-être pas la solution trouvée pour convoler vers des horizons plus cléments.

Autobiographie : Sylvie Vartan Entre ombre et lumière (XO Edition) 2004
Album : Sylvie Vartan Sylvie (Mercury) 2004