Festival Ebony à Dakar

La première édition du festival Ebony à Dakar s’est tenue les 4, 5 et 6 juin derniers avec la participation des meilleurs artistes de la diaspora: Alpha Blondy, Jimmy Cliff, Youssou N’Dour, Makoma, Didier Awadi, MC Solaar, Rachid Taha, Jocelyne Labylle ou les Magic System. Diam’s, dont c’était la première apparition en Afrique noire, a fait quant à elle un véritable tabac. Retour sur l’événement.

Un plateau prestigieux

La première édition du festival Ebony à Dakar s’est tenue les 4, 5 et 6 juin derniers avec la participation des meilleurs artistes de la diaspora: Alpha Blondy, Jimmy Cliff, Youssou N’Dour, Makoma, Didier Awadi, MC Solaar, Rachid Taha, Jocelyne Labylle ou les Magic System. Diam’s, dont c’était la première apparition en Afrique noire, a fait quant à elle un véritable tabac. Retour sur l’événement.

"On n’a jamais vu une telle concentration d’artistes de renom jouer en live dans un festival en Afrique. D’habitude, lorsque nous nous croisons dans une manifestation de cette envergure, cela se passe en Europe ou aux Etats-Unis",se félicitait Baaba Maal en clôturant dimanche soir la première édition du festival Ebony au stade Demba Diop. Il est vrai que le plateau concocté par la journaliste sénégalaise Seynabou Sy était prestigieux, offrant en outre, la veille, dans le magnifique cadre de l’île de Gorée un spectacle de qualité, où chacun des artistes interpréta un titre pour une émission de télévision de prestige retransmise en léger différé dans une dizaine de pays.

Dès 14 heures, les chaloupes étaient prises d’assaut pour rejoindre l’île et assister à cette soirée VIP à 80 Euros la place. De 200 %zoblazo interprété par Meiway au final Africa Unite de Bob Marley, c’est à un show en live accompagné par l’orchestre national du Sénégal que l’on a assisté. Cette soirée pour privilégiés, dont les bénéfices seront reversés aux associations de prévention du sida, a en fait porté préjudice aux soirées grand public organisées au stade. En effet, celles-ci n’ont rassemblé chacune que 8.000 personnes au lieu des 25.000 attendues. La belle machine, pourtant si bien huilée, a dérapé, le coût d’entrée de 1,50 Euro n’ayant été que trop tardivement annoncé, donnant un goût amer aux organisateurs qui pensaient qu’une affiche suffirait à remplir le stade. La période des baptêmes et des examens, le match de football de l’équipe nationale qui entamait au même moment le début de sa campagne de qualification pour les coupes du monde et d’Afrique dans le stade de l’Amitié tout proche auront également été fatales au grand succès populaire tant espéré.

Pourtant, elle avait fière allure la scène installée sur la pelouse du stade Demba Diop. La sono et les éclairages arrivés tout droit de Paris étaient dignes des plus grands festivals européens. Des tribunes et de la pelouse, les spectateurs pouvaient suivre le spectacle sur trois écrans géants. Youssou N’Dour, installé incognito dans les tribunes pour assister au concert de son ami Alpha Blondy, était impressionné de voir en tant que spectateur cette scène où il s’était produit la veille.

Venu d’Autriche pour l’occasion, Alpha Blondy a prouvé que l’on pouvait encore compter sur lui, n’ayant pas sa langue dans sa poche pour dénoncer les méfaits de la crise ivoirienne: "La Côte d’Ivoire est fatiguée des présidents élus par les armes", lâcha-t-il avec un certain cynisme, montrant ainsi que Tiken Jah n’avait pas le monopole de la contestation. Après une tournée des festivals européens et une autre au Canada, il entrera en studio à la fin de l’été pour un album prévu début 2005.

Placide, Didier Awadi, lauréat 2003 du Prix RFI Musiques du monde, a montré sur la scène de Demba Diop que son nouveau poss, PBS Radikal, était prêt à suivre les traces de PBS, officiellement arrêté depuis le départ de Doug T, il y a trois mois. Mais lucide, lui qui a l’habitude d’organiser de nombreuses manifestations telles Senerap, était déçu par ce "grand gâchis" où les organisateurs ont oublié que le plus beau des plateaux n’existe que dans un seul but: le public. Il est vrai que le Festival Ebony avait négligé ce "détail".

Trois questions à Diam's

Qu’avez-vous ressenti en entendant le public sénégalais reprendre vos titres ?
J’éprouve encore le sentiment de la jeune fille qui ne comprend pas trop ce qui lui arrive. Je ne m’y ferai jamais. C’est toujours une surprise, et je me dis que ma musique est magique. Etre ici dans cet énorme festival, avec un plateau si prestigieux, c’est vraiment kiffant. Me retrouver si loin de chez moi et voir des gens chanter mes titres, être réceptif, c’est incroyable. Ma génération, qu’elle vienne d’Afrique ou d’ailleurs, n’est pas «langue de bois»; on aime bien dire les choses.

Vous connaissez les rappeurs sénégalais, cela vous donne envie de jouer avec eux ?
Je connais PBS et Daara J. Je ne demande qu’à découvrir les autres. En France, il y a un véritable métissage chez les jeunes. Je fais des sons avec des Sénégalais, des Marocains, on va piocher dans toutes les musiques qui existent. J’ai l’habitude d’entendre toutes ces sonorités, et demain, si je devais faire un duo avec un groupe sénégalais, ce serait normal.

On a l’impression que vous êtes une star ici. Tous les jeunes vous assaillent de demandes d’autographes…
Je ne suis une star nulle part. Je suis une jeune fille comme les autres. Ma musique peut-être est star. Je dis souvent que l’on me reconnaît malgré mon disque. Mon souhait premier était que l’on me dise: «Tu écris bien» ou «J’aime bien ta musique». Je ne m’aime pas trop, alors je ne comprends pas que l’on m’aime bien. Si ma musique est star, c’est cool. Lorsque je me revois il y a deux ans, chez ma mère dans l’Essonne, en train d’écrire mes textes et me retrouver là aujourd’hui, ou à travers le monde, avoir un vrai public en France et m’apercevoir aussi que j’en ai un ailleurs, c’est étonnant. Je n’arrête pas, je rentre de Guyane, ensuite je pars pour La Réunion. Je n’ai que 23 ans, ce n’est pas normal tout ça. Après, il y a un vrai souci de carrière. J’ai toujours peur du déclin. C’est à moi de continuer à travailler.