Mikidache

L’artiste comorien vient de signer avec World Connection pour la distribution de son dernier album: Hima. Découvertes RFI 99, Mikidache, devenu à ce jour l’un des talents les plus prometteurs de la région Océan indien, nous revient serein et plein de conviction. Il cultive sur une dizaine de titres l’accent du terroir et le rêve du global village.

Un enfant des îles

L’artiste comorien vient de signer avec World Connection pour la distribution de son dernier album: Hima. Découvertes RFI 99, Mikidache, devenu à ce jour l’un des talents les plus prometteurs de la région Océan indien, nous revient serein et plein de conviction. Il cultive sur une dizaine de titres l’accent du terroir et le rêve du global village.

Naître dans un pays qui navigue sans boussole tel un vieux boutre rabroué par le mauvais temps en haute mer. Vouloir interroger le monde alentour ensuite. Avec un répertoire qui conjugue la nostalgie des temps passés par son approche mélodique et rythmique, tout en s’inventant de lointains cousinages dans un langage d’une modernité absolue. Voilà en quelques mots le portrait d’un artiste "insulaire", qui ambitionne d’embraser le monde par son petit jeu de guitare, afin de lui murmurer ses angoisses multiples. Mikidache nous parle de partage, d’espoir, d’amour et de respect. Hima le titre éponyme de ce nouvel album ne dit rien d’autre que le besoin de voir son prochain, son frère, son semblable se relever simplement. Hima [qui signifie «relève-toi» en langue-pays] sonne comme l’ordre annonçant l’avènement d’un monde meilleur, où chacun peut enfin retrouver une place digne sur cette terre.

Une musique avec ou sans étiquette ...
C’est toujours très difficile de se définir. Je crois que je fais une musique d’essence africaine. Mais je suis Comorien avant tout. Ma culture est faite de plusieurs influences. Sur le plan musical, nous nous abreuvons à plusieurs sources. Des rythmes et des mélodies venus du monde entier nourrissent notre patrimoine. C’est donc normal pour moi de faire une musique éclatée avec de multiples influences. J’ai baigné dans la pluralité depuis mon enfance. Par ailleurs, je vis avec mon temps. Aujourd’hui, on échange beaucoup avec le reste du monde grâce aux moyens modernes de communication. Donc j’écoute les musiques de mon temps et ma musique se nourrit elle aussi de ces influences. Il ne faut pas oublier aussi que je vis en partie à Paris et que les musiques du monde sont très présentes dans cette capitale.

Des permanences dans cette musique ?
Il n’y a pas une rythmique unique. Chaque composition correspond à un univers particuliers. Mais la ligne directrice de mes compositions réside - je pense - dans l’approche mélodique. Je suis très attaché à la mélodie. Il y a une unité que j’essaie de travailler en profondeur sur ce plan-là. Ceci étant, je recherche ce que tout artiste désire ou souhaite dans sa création, c’est-à-dire atteindre une certaine émotion. Emotion qui est bien sûr à partager avec le public. La mélodie a ceci d’intéressant d’ailleurs qu’elle permet d’aboutir parfois à une forme d’universalité.

Qu’est-ce qui change radicalement avec ce nouvel opus ?
Il y a une continuité entre le premier et le deuxième album au niveau de l’esprit. Il y a peut-être une différence importante, dû au fait que j’ai bénéficié de temps et de moyens pour réaliser le second. Cela se ressent peut-être au niveau des compositions. Avec le premier, on ne savait pas où on allait. Cette fois-ci, les choses sont plus claires. Par ailleurs, j’ai eu la possibilité de collaborer sur cet album avec quelques artistes de renom. Je parlerais par exemple de l’accordéoniste malgache Régis Gizavo, du batteur percussionniste camerounais Brice Wouassy ou encore de Magic Malik, un flûtiste de génie. Je n’oublie pas de citer la présence de Minino Garay, un percussionniste de folie. Des gens avec qui j’ai pris un réel plaisir à travailler.

En parlant de Gizavo : il y a une influence malgache très perceptible sur quelques-uns de vos morceaux, une influence qui va au-delà de vos liens de sang avec cette île du côté maternel j’imagine…
Ce qui me fascine chez les malgaches, c’est une certaine pratique du jeu musical. C’est une musique – je devrais dire "musiques" au pluriel – très riche. Sans avoir vécu à Madagascar, il s’est trouvé que certaines façons de faire, typiques de cette musique, sont apparus dans mon propre jeu musical. De façon naturelle. Peut-être que les échanges entre ma terre natale et Madagascar y ont été pour quelque chose, peut-être pas. Ce que je sais, c’est que je n’ai pas eu à forcer, ni à chercher longtemps pour que ça sonne parfois malgache. Je n’ai pas imité non plus. Je me suis contenté de jouer des sons qui sortaient du fond de mes tripes. Je les ai d’abord ressentis, avant de les jouer. Et puis, il ne faut pas oublier qu’il existe aujourd’hui une culture de cousinage ou de voisinage «océano-indienne» ou «indianocéane». Disons qu’on partage un peu la même histoire entre Comoriens, Malgaches, Réunionnais, Mauriciens, Seychellois, etc.

Mikidache Hima (Local Studio/World Connection/Night & Day) 2004