Dis l'heure 2 ragga dancehall

Tandis que les Francofolies s’offrent pour leur vingtième anniversaire un concert Dis l’heure 2 zouk, Passi sort un nouvel épisode de la série Dis l’heure consacré au ragga français. Rencontre avec Passi.

Compilation

Tandis que les Francofolies s’offrent pour leur vingtième anniversaire un concert Dis l’heure 2 zouk, Passi sort un nouvel épisode de la série Dis l’heure consacré au ragga français. Rencontre avec Passi.

Mener plusieurs projets de front ne fait pas peur à Passi. A croire même qu’il aime cela. Quelques mois après la sortie de son album Odyssée et du DVD 30 ans chrono, il donne une suite à la compilation Dis l’heure 2 zouk avec laquelle il avait obtenu un joli succès l’été dernier. "En faisant Dis l’heure 2 rimes en 2002, on savait qu’on pouvait faire Dis l’heure de quelque chose d’autre. On a commencé à voir comment ça se passait au niveau de la production, à développer les singles des artistes. Avec cette expérience et vu le succès de Bisso na Bisso, on en a profité pour faire Dis l’heure 2 zouk et, après, on avait vraiment très envie de faire de Dis l’heure de ragga parce qu’on a toujours aimé le reggae-ragga. Le ragga, c’est l’enfant électronique du reggae. On est tous des fils de Bob Marley. C’est un de mes artistes préférés", indique Passi.

Le rap est américain, le ragga est jamaïcain, mais en France les deux musiques se sont développées ensemble au tout début des années 90. Entre ces deux univers, des passerelles ont très vite été jetées et empruntées par de nombreux artistes. Les exemples ne manquent pas: Nuttea, Raggasonic qui s’appelait d’abord Rapsonic, Lord Kossity… "Aujourd’hui, Shaggy, Sean Paul ont prouvé que la culture ragga était forte et pouvait s’exporter. Il y a chez nous une oreille pour cette musique-là", poursuit Passi qui, en témoin attentif de cette évolution, fait savoir que sa démarche a pour but de"dire l’heure qu’il est dans le ragga aujourd’hui en France".

S’il est le premier rappeur a s’être autant investi dans un genre musical qui n’est pas celui qui l’a fait connaître, d’autres projets similaires ont, dans le passé, déjà été réalisés par des pointures du reggae français. Profitant de leurs succès respectifs, Tonton David et Pierpoljak avaient également tenté de donner un coup de pouce aux artistes influencés par le style jamaïcain en les réunissant respectivement sur Sans limite et Plus de cœur= soleil , des disques qui se sont tous deux soldés par des échecs commerciaux. Parmi les invités de Passi, bon nombre ont participé à l’une ou l’autre de ces compilations, voire les deux, à l’image du chanteur Supa John. Malgré ses qualités, son ancienneté – il fait partie des vétérans du reggae en France -, il n’est jamais parvenu à sortir de l’ombre. Daddy Mory fait lui aussi figure d’habitué. L’ancienne moitié du duo Raggasonic, qui n’a pas vraiment réussi son retour en solo avec son album Ma voix résonne, s’est associé le temps d’une chanson aux incontournables Neg’marrons, tandis que son ex-partenaire Big Red fait équipe avec Passi pour On contrôle la foule. Ces combinaisons inédites font la particularité de Dis l’heure de ragga puisque sur un total de vingt titres, on ne trouve pas moins de quarante artistes, dont certains font plusieurs interventions!

Dans ce contexte, rares sont ceux qui ont le privilège de pouvoir s’exprimer seul sur tout un morceau. Lyricson fait bon usage de cette opportunité en donnant un bel aperçu de son potentiel, tant sur le plan du chant que de l’émotion qu’il sait faire passer. Révélé par son duo avec Manu Chao sur Mr Bobby, un hommage à Bob Marley figurant sur l’album Proxima estacion : Ezperanza, il avait également accompagné l’ancien membre de la Mano Negra sur sa longue tournée mondiale Radio Bemba en 2002. Avec This Is My Way, la seule chanson en anglais sur Dis l’heure de ragga dancehall, ce jeune artiste originaire de Guinée apparaît une nouvelle fois comme l’un des plus sérieux espoir de la scène ragga française. Étrangement, il n’a pourtant toujours aucun album à son actif. Pas plus que Taïro, qui fut un temps le protégé de Pierpoljak, et s’illustre sur le single Elle veut avec la deejay Flya que Passi a découvert à l’occasion de ce projet. Lorsque le rappeur touche-à tout s’est lancé avec son label Issap dans ce vaste chantier, il s’est adressé un à un grand nombre de producteurs "du moment", pas tous issus du milieu ragga, ce qui explique certaines faiblesses du disque. Il a reçu près d’une centaine d’instrumentaux, écouté certains artistes qui lui avait été recommandé tout en trouvant une place pour ses fidèles, comme Jimi Sissoko, sans oublier ses collègues Doc Gynéco, Disiz la Peste, Arsenik et Diam’s. "C’est un peu la fête au ragga", résume-t-il pour justifier la diversité des profils de ses invités. Et l’alchimie, lorsqu’elle fonctionne, fait parfois naître des envies de prolonger l’aventure: "Il y a des liens qui se créent entre artistes quand on bosse tous ensemble comme ça. J’aimerais bien organiser à Paris un Zénith avec le meilleur de chaque Dis l’heure et un peu de ce que je fais en solo. Ce serait un travail en famille".

Compilation Dis l'heure de ragga (Up Music) 2004