LE CLIP C’EST CHIC

Dans le cadre de ses huitièmes Rendez-vous électroniques, l’association Technopol proposait le 15 septembre à la Maison européenne de la photographie, à Paris, une conférence sur les liens entre vidéo et musique. L’occasion de se rendre compte du savoir-faire français en la matière mais aussi de rencontrer le producteur emblématique des clips de la French Touch, Charles Petit.

Un point sur la production française

Dans le cadre de ses huitièmes Rendez-vous électroniques, l’association Technopol proposait le 15 septembre à la Maison européenne de la photographie, à Paris, une conférence sur les liens entre vidéo et musique. L’occasion de se rendre compte du savoir-faire français en la matière mais aussi de rencontrer le producteur emblématique des clips de la French Touch, Charles Petit.

Il y a les stars. Jean-Baptiste Mondino et Stéphane Sednaoui, plébiscités par Madonna, U2 ou encore les Red Hot Chili Peppers. L’ovni Michel Gondry, qui réussit à coller un univers visuel à la musique de Bjork. Et tous ceux, dans les années 90, qui ont émergé en même temps que le mouvement (mode?) électronique de la French Touch. Ludovic Houplain, Antoine Bardou-Jacquet, entre autres, se sont fait les dents en France, ils travaillent maintenant avec Massive Attack, Röyksopp ou Goldfrapp.

Certainement la partie émergée de l’iceberg. Mis à part Charles Petit, tous les autres intervenants de cette conférence Beats & Images ne sont encore connus que d’un cercle d’initiés. Mais ils entremêlent avec un beau plaisir son et musique, épaulés par les nouvelles technologies. Le Parisien Xerak, auto-produit et autodidacte, se définit comme un "artiste total": compositions, enregistrements, pochettes, clips, diffusion et même interface sur ordinateur pour reproduire ses morceaux en concert: il gère tout.

D’autres brisent carrément les barrières. Ils viennent souvent de la programmation de jeux vidéo comme Xavier Boissarie. Associé à des musiciens contemporains, il a développé Bandonéon, une ville très particulière : à l’aide d’une souris ou sur un skate-board relié à l’ordinateur, vous pouvez voler contre les immeubles, rentrer dans les arbres, chaque choc produit une musique. Une aventure envoûtante: "C’est plus une évocation sensorielle qu’une histoire, lors de précédentes démonstrations, une personne est restée deux heures à se promener. C’est aussi un psychotrope pas cher!"

En France, on a donc des idées et la maîtrise technique mais, c’est un constat général, plus aucune chaîne de télévision grand public pour les diffuser. Internet peut être une solution, avec le risque de n’attirer que les initiés. Pour beaucoup des intervenants présent, le DVD semble l’alternative la plus prometteuse. D’autant que les artistes français s’y engouffrent. Ainsi Dionysos, avec Whatever the weather, propose de véritables courts métrages, de vraies oeuvres qui vont plus loin qu’un making of ou des extraits de tournées. En juin dernier, les Troublemakers, ont accompagné la sortie de leur deuxième album Express way d’un moyen métrage, réalisé par leur soin. Une manière d’approfondir leur univers propre mais peut être aussi une façon vraiment créatrice de lutter contre le piratage...

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Charles Petit : "Moins soumis au diktat anglo-saxon"  

Après des collaborations avec notamment, Super Discount ou Alex Gopher, Charles Petit alterne maintenant clip et publicité, le plus souvent à l’étranger. En gardant toujours un oeil sur la production française.

Un clip, ça aide à se faire connaître à l’étranger ?
Sans aucun doute. Il nous est arrivé assez régulièrement de faire des clips presque uniquement pour l’export. On savait à l’avance qu’ils avaient peu de chance de passer en France. Ils n’étaient pas forcément non plus destinés à être diffusé à l’étranger mais plutôt pour permettre à des labels français indépendants de trouver des deals avec des labels japonais, américains. Et quand on projette nos clips dans les festivals, ça aide aussi à faire connaître l’artiste.

Il y a un style de réalisation française ?
C’est dur à définir, il n’y a pas vraiment de cohérence. Je pense qu’il y a un soin accordé à la direction artistique, à la finition et parfois ce sont presque les étrangers qui perçoivent mieux ça que nous. Nous, on est dedans. Je pense que c’est parfois une liberté de ton, de traitement comme si nous étions, nous Français moins soumis à un certain diktat de mode anglo-saxon. Comme on s’en fout un peu au final, on parvient à faire quelque chose qui les surprend vraiment. On passe par une porte dérobée, dans le meilleur des cas.

Est-ce lié au cinéma français, notre fameuse exception culturelle ?
Non plutôt aux écoles, à l’enseignement du graphisme, des beaux-arts qui font qu’effectivement depuis des années, il y a un véritable vivier de jeunes réalisateurs et réalisatrices, parce qu’il y a aussi des réalisatrices. Et n’oublions pas également que tout ça a pu se produire parce que nous avons des aides. Il y a des subventions du CNC [Centre national de cinématographie], du FCM [Fonds pour la création musicale] qui ont permis pour beaucoup de ces réalisateurs de commencer à travailler en réalisant des clips qui étaient subventionnés à 100%. Ce qui n’est pas forcément le cas dans d’autres pays.
Et puis maintenant, les jeunes, ceux qui ont entre 23 et 30 ans, sont tous multicompétents. C’est quelque chose dont moi j’ai suivi l’émergence depuis 5 ans. Ce sont parfois des gens qui peuvent écrire, dessiner, tourner, monter, post-produire. Ce qui est un profil de réalisateur qui n’existait quasiment pas sauf exception, comme Michel Gondry qui a eu cette approche-là très tôt, il y a plus de 10 ans.

C’est dû à l’émergence de l’informatique?
Oui à 100%, grâce aux merveilleux outils que l’on a aujourd’hui, qui coûtent si peu cher.

Dyonisos Whatever the weather (Tréma) 2003
Troublemakers Express way (Blue Note) 2004
Bandonéon de Xavier Boissarie est en démonstration lors du festival Villette numérique 2004, du 21 septembre au 3 octobre, à la Villette (Paris)