Une année en musique : DJ CAM

Une année en musique, deuxième volet : Quelques mois après la sortie de son excursion jazzy Fillet of Soul, DJ Cam est revenu en 2004 à ses premières amours, le hip hop instrumental, avec son album Liquid Hip Hop. Portrait d'un artiste français qui a collaboré avec de nombreuses pointures du rap américain.

Retour au rap instrumental

Une année en musique, deuxième volet : Quelques mois après la sortie de son excursion jazzy Fillet of Soul, DJ Cam est revenu en 2004 à ses premières amours, le hip hop instrumental, avec son album Liquid Hip Hop. Portrait d'un artiste français qui a collaboré avec de nombreuses pointures du rap américain.

      DJ Cam est une figure à part au sein du paysage musical français. Pionnier du hip-hop instrumental, il a participé à l'émergence de ce genre dans les années 90 pour une raison très simple: il ne connaissait pas de rappeurs. "À l'époque, je voulais surtout travailler avec des rappeurs américains mais comme j'étais inconnu, c'était impossible", raconte-t-il. "Donc, quand tu décides de monter ton label à dix-neuf ans (Street Jazz), que tu veux sortir un disque et que tu n'as aucune connexion, tu es obligé de remplacer les chanteurs par des samples. C'est ce que j'ai fait et c'est ce qu'on a appelé par la suite la mouvance abstract hip-hop."

Considéré aujourd'hui comme l'un des fondateurs du genre avec DJ Shadow et DJ Krush, DJ Cam ne s'est cependant jamais enfermé dans un style. Cet artiste très versatile a touché à presque toutes les musiques au cours de sa carrière: jungle, hip-hop, house, dub, soul, ou jazz, sa soif d'exploration sonore ne connaît pas de frontières. Il délaissa même les machines et son qualificatif de DJ pour sortir en 2002 un album entièrement acoustique, Soulshine. Mais, en mai 2003, DJ Cam décide de casser le contrat le liant à sa maison de disques, Sony Music. "On avait réalisé quatre albums ensemble et puis après, ça m'a fatigué, explique-t-il. Je ne souhaitais plus continuer avec eux car je trouvais que ma musique n'avait plus aucun intérêt au sein de leur label. Ils ne comprenaient pas que ce n'était pas de la variété et que ça ne se travaillait pas pareil. Et puis, plutôt que de laisser 80% de ce que tu gagnes à des gens qui ne savent pas bosser, je préférais encore le faire moi-même."

Du classique

 

 Au mois de septembre de la même année, il termine Liquid Hip Hop qui sort aujourd'hui sur son propre label, Inflammable Records. "C'était un vrai besoin: j'avais envie de faire un disque comme je le voulais, que ça sorte vite et qu'il n'y ait pas de discussions dans le genre: “attends, tu vois, on a pensé à un truc avec un concept derrière”", ironise-t-il. Au final, DJ Cam nous livre un album de pur abstract hip-hop, sincère et sans fioritures. "C'est du classique DJ Cam, résume-t-il simplement. Je me suis remis dans l'ambiance de mes premiers albums Underground Vibes et Substances. J'ai essayé de faire un disque en un mois, quelque chose de très impulsif sans réfléchir. Je composais quasiment un morceau par jour."

Alors que, ces dernières années, la scène abstract hip-hop internationale s'est réduite telle une peau de chagrin, DJ Cam a donc choisi de revenir aux sources de son hip hop. "A l'heure actuelle, il n'y a plus grand monde qui fait de l'abstract hip hop, constate-t-il. DJ Shadow s'est orienté vers une tendance plus pop-rock. Krush est parti sur quelque chose de très électro, très sombre. Et moi, comme je suis plutôt nostalgique, j'ai voulu faire du hip hop instrumental pur et dur. Pas un truc trip hop aseptisé ou lounge, comme on a pu en être abreuvé pendant des années."

Influences

 

    Les influences et les références ayant marquées la carrière de DJ Cam émaillent donc les onze morceaux composant ce nouvel opus. De DJ Shadow à Rakim en passant par DJ Premier et Guru du mythique groupe de rap américain Gang Starr, que l'on retrouve d'ailleurs sur l'album. Car si DJ Cam ne connaissait pas de rappeurs à ses débuts, il peut aujourd'hui se targuer d'avoir travaillé avec les plus grosses pointures de la scène hip-hop internationale. Mais paradoxalement, aucun rappeur français ne l'a jamais sollicité. "Je n'ai pas vraiment de contact avec le milieu du rap français, remarque-t-il. Pour eux, ma musique n'est peut-être pas du hip hop, je n'en sais rien. J'ai peut-être une étiquette d'un mec qui fait de la techno parce que je suis ouvert d'esprit. On ne m'a jamais rien demandé mais je vous avouerais que je m'en fiche complètement car je fais beaucoup de choses à l'étranger avec des gens que j'admire. Mais ça ne veut pas dire que je n'ai pas envie de travailler avec des rappeurs français. Il y a des groupes que j'adore, comme NTM par exemple. Et si Joey Starr me demandait de lui faire une rythmique, j'accepterais sans hésiter. Mais en France, conclue-t-il, il y a peut-être trop d'étiquettes et trop d'a priori avant d'écouter un disque."

Ce qui est sûr c'est que DJ Cam n'est pas près de ranger ses platines. La preuve, il envisage déjà de réaliser une suite à son album Substances paru en 1996. "Tout le monde me parle de ce disque et je me suis dit que je pouvais faire encore mieux, explique-t-il. Il y avait quand même pas mal d'erreurs dans cet album et je suis parti pour faire une suite où les gens chialeront du début à la fin tellement ça va être beau." (rires) Affaire à suivre, donc !

DJ Cam Liquid hip hop (Inflammable records/Nocturne) 2004