Ousmane Touré
Après cinq ans d’absence, l’ex-voix de tête des Touré Kunda revient sous les feux de la rampe avec Avenue du monde. Un bel écrin aux couleurs sénégalaises nourries d’influences les plus diverses, qui laisse présager une renaissance pour Ousmane Touré. Calme, serin, le chanteur dévoile aujourd’hui sa véritable personnalité de conteur. Rencontre.
Le renouveau de l’élégant artiste sénégalais
Après cinq ans d’absence, l’ex-voix de tête des Touré Kunda revient sous les feux de la rampe avec Avenue du monde. Un bel écrin aux couleurs sénégalaises nourries d’influences les plus diverses, qui laisse présager une renaissance pour Ousmane Touré. Calme, serin, le chanteur dévoile aujourd’hui sa véritable personnalité de conteur. Rencontre.
Rfi musique : vous venez de signer Avenue du monde, un album chanté, bien sûr, en wolof mais aussi mandingue, en créole portugais et en français. Quelles sont les histoires que vous nous racontez sur les dix plages de cet opus ?
Ousmane Touré : Je parle beaucoup d’amour, de respect et de fraternité sur ce disque. Que ce soient les relations entre les êtres humains, entre l’homme et la femme. J’exprime cette flamme du coeur qui nous réchauffe et devrait symboliser l’humanité. Sur le titre Dimba, par exemple, il est question de cette flamme olympique que tout le monde convoite et qui voyage de continents en continents, de pays en pays, d’athlètes en athlètes. Dans le morceau Beng, je rend hommage à la Casamance, cette région colonisée par les Portugais, les Anglais puis les Français. Il y a aussi une chanson qui s’appelle Leer, que l’on pourrait traduire par l’aura, la lumière que dégage l’être humain, qu’il soit sympathique, ou non. Vous savez, j’écoute beaucoup les griots parce que ce sont des musiciens qui s’inscrivent dans le temps, car leurs paroles ne disparaissent pas. Cette caste de conteurs n’écrit pas tel qu’on l’entend en Occident. Elle fixe un moment, un lieu, une histoire, tel un caméraman. En ce qui me concerne, j’essaye de travailler comme les griots en donnant cette profondeur dans mes textes.
Musicalement, où vous situez-vous ? C’est de la néo-pop africaine que vous faites, non !
Je ne m’inscris pas dans la musique africaine, parce qu’il n’y a que la voix qui est africaine ! Pour moi, cet album est basé sur une rencontre de musiciens venus d’horizons différents. Chacun compose et joue cette musique. Le son occidental épouse le chant griotique afin d’établir un pont entre ces deux cultures. Il s’agit d’un album du monde tout simplement. C’est pour cela que je l’ai appelé Avenue du monde.
Cet album marque votre retour en France après une période passée au Sénégal. Qu’est-ce qui vous a poussé à rentrer à Paris ?
Ce sont mes enfants qui m’ont incité à revenir. Après l’aventure avec les Touré Kunda, qui s’est achevée au début des années 90, j’étais fatigué. On partait parfois pour 3 à 6 mois en tournée et on ne voyait plus nos proches. J’avais complètement perdu la notion de famille ! Je suis d’abord rentré me ressourcer à Dakar pour une retraite qui a durée près de dix ans. En 2000, j’ai enregistré Lolo, un album intimiste acoustique dans la pure tradition sénégalaise, qui a d’ailleurs bien marché au pays. Ensuite, j’ai pris la décision de remonter sur Paris. Là, mes enfants m’ont expliqué ce qu’ils vivaient au collège et au lycée. Ils me racontaient : "papa, nous avons des camarades qui nous dises que tu es l’un des chanteurs des Touré, mais ils n’ont jamais entendu ta voix !". Cela m’a fait mal, car je comprenais que j’étais un père inconnu pour mes enfants et aussi pour toute cette jeune génération. Je leur est donc offert ce disque disponible uniquement en Afrique de l’Ouest. C’était un cadeau réservé exclusivement pour eux et leurs amis. Cette histoire a été un déclic pour moi. C’est à partir de là que j’ai eu envie d’écrire le CD que je publie aujourd’hui.
Quel est le meilleur souvenir que vous gardez de la grande époque des Touré Kunda ?
Et le plus mauvais souvenir ?
Il n’y en a pas. Si ! Le revers du succès peut-être ...
De vos débuts au sein de l’orchestre national de Mauritanie à votre actuelle carrière en solo, vous affichez plus de vingt ans de métier. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur votre parcours ?
Aujourd’hui, je prends les choses avec sagesse, alors qu’auparavant, je vivais tout avec passion. J’étais trop fougueux mais maintenant, j’ai pris du recul. Il faut savoir apprécier la vie, ce qu’elle nous donne et être patient. C’est comme cela que le quotidien de l’être humain peut devenir plus agréable. Pendant des années, j’ai bien profité mais aussi observé et écouté. Désormais, j’avance par rapport à mon passé en redémarrant tranquillement dans la direction que j’ai choisi. Avec comme mot d’ordre, le sourire. Ce n’est pas pour rien si dieu a donné à l’homme des dents blanches. C’est pour les montrer ! (rires)
Ousmane Touré Avenue du monde (Together Production/Night&Day) 2005
En concerts : 25 juin à Dortmund (Allemagne) et 29 juin à Montpellier (France)