Nuits Atypiques de Langon 2005

La quatorzième édition des Nuits Atypiques de Langon qui s'est déroulée du 26 au 31 juillet dans le sud-ouest de la France, fait peau neuve et présente un festival à la programmation généreuse, engagée et innovante. Une occasion pour RFI Musique de rencontrer l'accordéoniste malgache, Régis Gizavo.

Le pari réussi de la qualité

La quatorzième édition des Nuits Atypiques de Langon qui s'est déroulée du 26 au 31 juillet dans le sud-ouest de la France, fait peau neuve et présente un festival à la programmation généreuse, engagée et innovante. Une occasion pour RFI Musique de rencontrer l'accordéoniste malgache, Régis Gizavo.

 

 La quatorzième édition du festival des Nuits Atypiques de Langon s’impose cette année comme vraiment atypique par rapport aux éditions plus "grand public" des précédentes années. Une seule scène de concert, pas de têtes d’affiche, une place importante pour des formes d’expression autres que la musique : le documentaire, les débats ou le théâtre, et enfin une affluence nettement plus réduite. 2003 fut une année de fracture. L'annulation du groupe Noir Désir remplacé au pied levé par Asian Dub Fondation avait mis les Nuits Atypiques dans le rouge. Il a donc fallu réinventer une formule plus légère selon Patrick Lavaud, le fondateur du festival. "Ces dernières années pour diverses raisons, les cartes ont été brouillées et pour 2005, il nous a fallu remettre en question la programmation, avoir un peu de culot et oser un festival pas vraiment grand public". Sur les trois jours de festival musical, des artistes de Gascogne, d’Occitanie, de Côte d’Ivoire, de la Réunion ou de Madagascar se succèdent dans le Village Atypique devant un public d’habitués, de curieux ou de connaisseurs.

Vendredi : bonnes surprises gasconnes

L’ambiance de cette première soirée musicale est avant tout pleine d’attente. Le public, souvent habitué, se réfère aux concerts mémorables des éditions précédentes : Manu Chao, le No Smocking Orchestra d’Emir Kusturica, Salif Keïta ou encore Massilia Sound System. Cette année, il joue le jeu de la découverte. Michel Macias, à l’accordéon et au chant, propose une bonne ouverture du festival. Enraciné dans sa Gascogne de coeur, sa musique s’ouvre sur le monde et nous embarque dans un parcours insulaire pour le moins inattendu : Ouessant, Guadeloupe, Réunion. On se laisse entraîner. Après cette mise en bouche, déboule avec bonne humeur  au milieu de la foule une bande de joyeux lurons : c’est l’Acousteel Gang. Un public enthousiaste se masse autour de la formation de percussionnistes gascons, entre théâtre de rue et steel band funky. Le nom du nouveau spectacle du groupe "L’Acousteel fait son intéressant" donne le ton. Un chanteur déjanté armé d’un mégaphone casse sa voix sur des compositions et des reprises. Autodérision, humour et bonnes vibrations. Emballé c’est pesé : le public est conquis.

Samedi : révélation ivoirienne

 

    L’après-midi commence doucement avec le Camerounais Simon Nwambeben, les percussions japonaises de Mieko Miyazaki, et la samba de Celso Machado. Mais bientôt, le Brésilien propose une expérience unique : avec des instruments simples, quelques sifflets, une pierre, sa bouche, il emmène le public dans une jungle luxuriante et mime un orage tropical avec la complicité mi-émerveillée, mi-rigolarde du public. La grande révélation de la soirée provient de Côte d’Ivoire avec Dobet Gnahoré. La jeune femme à la présence scénique étonnante prône le panafricanisme, d’abord dans ses textes chantés en fon, malinké, baoulé, bété ou dida, puis dans ses compositions, tour à tour empruntes de mélodies mandingues, de bikutsi camerounais, de rumba congolaise ou de jazz.  Initiée à la musique, à la danse et au chant dans le "village panafricain" d’Abidjan de Werewere Liking, Dobet Gnahoré envoûte le public par un large éventail de modulations de voix, une énergie et une émotion communicative. Un formidable succès.

Dimanche : vagabondages africains

Cette dernière journée regroupe une programmation largement tournée vers l’Afrique avec la performance dépouillée et généreuse de la Réunionnaise Nathalie Natiembé, très proche du Mozambique et de l’Océan Indien, le show vitaminé de l’accordéoniste malgache Régis Gizavo ou le jazz vaudouisant du Gangbé Brass Band. Sur scène ou en parade, les Béninois mettent l’ambiance en métissant les percussions sacrées vaudoues et les instruments à vent de fanfare. Résultat : un bel exemple de revalorisation du patrimoine musical traditionnel, qui remporte une adhésion manifeste du public de Langon mais aussi d’Europe, du Canada, des Etats Unis et bien sûr du Bénin.

A la clôture de cette quatorzième édition Patrick Lavaud s’avoue satisfait : "Le concept du festival basé sur l’articulation entre engagement artistique, parole et convivialité apparaît cette édition-ci de façon lisible. Les Nuits Atypiques est un lieu où il se passe des choses fortes, inattendues, des rencontres, et où la programmation, même si elle est inconnue du grand public reste toujours de qualité". Mission accomplie.

 

 Régis GIZAVO : Accordéoniste sans frontière


Régis Gizavo jongle sur scène ou en studio avec des projets aux sonorités multiples. Rencontre à Langon avec cet infatigable collectionneur d’expériences musicales
.

Vous êtes aujourd’hui aux Nuits Atypiques de Langon, vous faites beaucoup de scène, en quoi est ce important pour vous de tourner dans les festivals ?
Pour nous, c’est très important de passer dans des endroits très variés. Chaque festival, chaque scène est différente. Les gens nous découvrent, car la musique malgache est assez méconnue et nous on découvre les gens. Il existe une forte interaction avec le public et c’est cela qui nous nourrit.

Vous présentez une vision de la musique malgache bien particulière avec votre accordéon  chromatique, pourtant votre musique semble n’avoir aucune frontière ...
En effet, j’aime bien travailler sur des projets variés, le seul principe de base, c’est qu’il faut que je les sente ! En ce moment je joue par exemple avec Mano Solo, qui écrit très bien et bénéficie d’une très large ouverture d’esprit. On va tourner ensemble au mois d’août et également à l’automne. J’aime la diversité. C’est une chance !

En dehors des festivals, quelle est votre actualité ?
En ce moment, je travaille effectivement sur pas mal de projets. Un album avec le guitariste sud-africain Luis Mhlanga et mon percussionniste David Mirandon, est prévu pour le début de l’année 2006. J’enregistre aussi mon troisième album solo, dans la lignée des deux précédents, avec cependant une formation musicale plus fournie ... Et en septembre, je rentre en studio pour un projet autour de Madagascar. Le principe est de réunir cinq musiciens originaires des cinq grandes régions de Mada, (quatre musiciens de Mahaléo et moi-même), et de construire ensemble un répertoire commun autour de nos propres compositions. Ce sera un voyage musical dans la diversité culturelle malgache.