Marka retrouvé

S.L.F. –sans label fixe- et privé de distribution dans le commerce : malgré cela, le belge Marka a trouvé la parade : il s’est laissé compiler par son public, sollicité sur son site web ! C’est tout moi résume ainsi les dix ans de carrière solo de l’auteur d’Accouplés, dans des versions réenregistrées pour l’occasion.

Réenregistrements de ses chansons

S.L.F. –sans label fixe- et privé de distribution dans le commerce : malgré cela, le belge Marka a trouvé la parade : il s’est laissé compiler par son public, sollicité sur son site web ! C’est tout moi résume ainsi les dix ans de carrière solo de l’auteur d’Accouplés, dans des versions réenregistrées pour l’occasion.

      Lors d’un récent passage aux Francofolies de La Rochelle, on pouvait s’étonner de voir Marka vendre ses propres productions une fois son concert terminé. C’est que malgré ses qualités d’homme de spectacle et quatre albums sous son seul nom, le Belge chantant brille dans les bacs par son absence. "On ne trouve pas mes disques parce que Sony, chez qui j’avais sorti trois albums, ne les met plus en vente : ils sont passés à autre chose et ça ne les intéresse pas de les garder dans leur catalogue. Pour le dernier, L’Etat c’est moi, j’ai joué de malchance parce que Inca, la firme de disque, a fait faillite un mois après sa sortie ... Pas à cause de moi ! Donc sur quatre albums, aucun n’est trouvable", explique Marka pour justifier la sortie de sa première compilation, composée par ses fans via son site internet. Manière, pour reprendre la version officielle, de faire évoluer sur disque des titres qui ont grandi sur scène. Mais surtout de pallier ce souci évoqué ci-avant de visibilité discographique.

L’autoproclamé Homme qui aimait la scène est donc repassé par la case studio pour réenregistrer ses anciens titres de gloire. Le résultat, joliment remis aux goût et orchestration du jour, se nomme C’est tout moi. La compilation s’enrichit au passage - comme il est de coutume dans ce genre d’exercice - de quatre inédits (en fait rescapés du dernier album, comme ce Reine et roi, suite du Caroline de MC Solaar, co-écrit avec le rappeur), et se charge de "mettre un point à la fin de la ligne et repartir sur des bases neuves et créatives." Celles qui permettent à Marka de tirer plus qu’honorablement son épingle du jeu sur ses terres bruxelloises, mais paradoxalement n’empêchent pas un relatif désamour avec l’industrie phonographique française. "C’est clair. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. Mais comme je suis têtu et que je n’abandonne jamais, je me dis qu’à un moment ça ira !", avance l’ex-punk des eighties. "Je suis plus âgé maintenant, j’ai 44 ans. Ce n’est pas que j’ai d’autres ambitions, mais je ne vais plus trop m’en faire pour ça. Je continue, je suis mon propre producteur, je fais mes disques... Je n’ai jamais vendu autant de disques en Belgique alors que les firmes de disques se plaignent toutes de ne pas vendre ! Je ne suis pas un grand vendeur, ce n’est pas ce que je suis en train de dire, mais je vis très bien de mon ‘art’" précise-t-il, avant de conclure "dans le pire des cas, je peux aller tout seul avec ma guitare, et personne ne m’en empêchera !"

Recul nécessaire

 

 Plus lucide que frustré ou aigri, Marka analyse la situation d’autant plus froidement qu’il a, à ses débuts en solo, largement flirté avec le succès. "Je crois qu’il faut rencontrer la bonne personne au bon moment", lâche-t-il, sans cynisme superflu, mais avec ce qu’il faut de recul. "A l’époque d’Accouplés, j’avais envoyé des maquettes partout, et il n’y a jamais qu’une seule personne qui a réagi : Didier Varrod* . C’était rigolo de voir que dès qu’une personne décide de sortir votre disque, les autres peuvent vous suivre ! Là je cherche la personne qui à un moment va se dire :  ce type a quelque chose de particulier. Ce n’est pas moi qui le dis, j’attends qu’on le dise de moi !", s’amuse Marka, qui avoue n’avoir fait "aucune démarche", pas plus qu’il n’avait "l’intention de revenir en France avec ce disque, parce que la période est difficile et que ça prend beaucoup d’énergie". Et de poursuivre "Moi je n’ai pas le choix : c’est mon métier, j’ai des enfants, il faut que ça tourne ! Bien sûr, je réfléchis à la manière de le faire, mais je dois sortir des disques. Par contre, je fais attention à la dépense. Là où un disque peut s’enregistrer pour dix euros, je ne vais pas le faire pour vingt, en me payant du luxe etc. Je fais gaffe."

Plaisir et scène

 

    L’attention du moment, c’est donc ce "best of" un peu à part. Ces anciennes chansons élégamment liftées et dont Marka affirme qu’il ne les a pas réenregistrées à reculons, mais avec un plaisir évident. Une sorte d’égoïsme de survie, qui reste son carburant essentiel. "On est à une période charnière, et c’est chacun pour soi. Donc j’ai décidé de faire les choses pour moi, de la meilleure manière. Ce n’est pas que je ne me vois pas faire autre chose, si ça doit arriver je le ferai. Mais pour le moment, j’ai la chance de faire en Belgique à peu près 70 concerts par an. La Belgique est petite : on est 10 millions d’habitants, mais 6 de Flamands qui n’écoutent pas Marka, parce que c’est une autre langue. Donc je joue pour 4 millions de Belges et je fais 70 concerts par an. Je n’ai pas trop à me plaindre. Si maintenant je peux ajouter une trentaine de dates en France, j’en serai à 100 ... Faut pas faire trop, pas faire de surmenage non plus ! ", conclut-il dans un éclat de rire. Ce vrai-faux nouvel album en forme de carte de visite chargera-t-il l’agenda français de Marka ? Il n’y aurait en tous les cas pas matière à se plaindre.  

*Journaliste musical à la télévision et à la radio publique française, à l’époque directeur artistique de Columbia