BORDER BUZY

Un an après son retour sous forme d’un livre autobiographique (Engrenage), Buzy nous livre son septième album studio. Un BorderLove à l’amour pourtant affirmé et au caractère trempé qui reflète parfaitement les élans et le chemin de cette chanteuse sans concessions. Retour sur le parcours d’une égérie des années 80.

Retour de la chanteuse des années 80

Un an après son retour sous forme d’un livre autobiographique (Engrenage), Buzy nous livre son septième album studio. Un BorderLove à l’amour pourtant affirmé et au caractère trempé qui reflète parfaitement les élans et le chemin de cette chanteuse sans concessions. Retour sur le parcours d’une égérie des années 80.

Marie-claire Girod, alias Buzy, écrit et compose son tout premier titre en 1981 et le succès est immédiat. Dyslexique se vend à 500.000 exemplaires. "Je ne m’attendais pas à ça. Je ne savais même pas ce que voulait dire le métier de chanteuse." Très vite, on demande à Buzy de livrer un album entier (Insomnies). Elle le fait en un mois et la France tombe sous le charme de ce minois à la voix rauque et spéciale, de ce bout de femme décidée qui revendique son rock, alors qu'elle n'est pas vraiment à l’aise dans les systèmes du métier. Malgré quelques déboires de contrats qui l’emprisonnent et d’argent qui ne lui est jamais versé, celle que l’on appelle désormais la Punkette, continue de flirter avec les hit-parades.

Adrian & Adrénaline

 

 Le second album, Adrian, sort en 1983 et là encore le titre générique et Adrénaline deviennent des tubes. Deux ans plus tard I love you Lulu ne déroge pas à la règle et se voit même orné d’une rencontre marquante : Serge Gainsbourg. L’homme à la tête de chou y réalise deux titres, y prête sa voix pour un clin d’oeil parlé et devient le photographe de la pochette. "Au départ, je suis allée le voir avec un texte (I love you Lulu) ce qui a d’ailleurs donné lieu à un quiproquo. Gainsbourg s’appelait Lucien et il a cru que le texte était pour lui. En réalité, je l’avais écrit pour Lucas le musicien avec lequel je vivais à l’époque. De là, est née notre collaboration. Il a aimé le texte et sûrement la trombine un peu lunaire que j’avais à l’époque. Je n’étais pas tremblante et il devait voir tout un tas de jeunes impressionnés. J’en ai vu d’ailleurs, des gens comme Jean-Louis Aubert ou Etienne Daho qui papillonnaient autour : ils avaient tous peur. Moi je devais avoir une espèce d’innocence qui lui a  plu. J’avais 24 ans."

En 1986 le titre Body Physical atteint encore les cimes des tops 50 mais les trois albums suivants n’auront pas le même accueil. Rebel (1989), Rêve éveillé (1993) et Délits (1998) s’essoufflent et Buzy se rend très vite compte du déclin. "Nous étions 3 : il y avait Gérard Pedron qui produisait, Bertrand Le Page qui était mon éditeur-manager et moi. Le premier est mort du sida et le second, séropositif et meurtri par le métier a mis fin à ses jours. C’est comme si on m’avait coupé les deux jambes. Personne n’a pu les remplacer avec le même charisme. Progressivement cela s’est effiloché, j’ai tenu le coup parce que j’avais un bagage d’auteur-compositeur mais les équipes qui se sont succédées n’ont pas été les rencontres formidables que j’avais eues en amont. Et puis sociologiquement, tous les artistes des années 80 étaient sur la touche. On était des ringards."

Une autre vie

 

    Buzy redevient alors Marie-Claire et s’investit dans deux autres métiers. Elle ouvre un cabinet et devient à la fois astrologue et psychothérapeute. "En général ceux qui viennent me voir ne savent pas qui je suis et le fait d’avoir la possibilité d’exercer une autre activité m’a sauvé. Il fût une époque où quand je voyais Mylène Farmer ou Jeanne Mas faire une télé de plus que moi, je n’en dormais pas la nuit. Tout ça rend fou. Plus jamais je ne veux ça. Et j’en croise des artistes qui sont bien coincés là dedans. Mon métier me permet aujourd’hui de croiser des gens normaux, qui ont des problèmes un peu plus graves que de passer sur NRJ."

L’an dernier un éditeur lui propose pourtant d’écrire une autobiographie. Engrenage la replonge donc dans les années dorées de sa carrière et cristallise l’envie de revenir musicalement. BorderLove en est le résultat, album aussi paradoxal qu’évident. Naviguant entre une nostalgie inconsciente et une volonté d’aller de l’avant, entre une écriture franglaise à la Gainsbourg et une urbanité d’aujourd’hui, ce nouveau-né est à la fois d’une modernité désuète et d’un savoir faire intemporel. La voix est toujours là, mais plus patinée, plus mûre, plus rocailleuse. Les collaborations sont également présentes : il y a les amitiés de toujours comme celle d’Alice Botté pour les guitares et certaines compositions, ou celle de Daniel Darc pour un duo sensible (Comme des papillons). Mais il y a aussi les nouvelles participations comme le titre Je suis un arbre signé par les No One Is Innocent.

Alors évidemment certains diront que l’ensemble reste encore trop influencé par les années 80, que le rock d’aujourd’hui n’est plus le même et que les quinze dernières années musicales y ont été un peu trop oubliées. Mais jamais personne ne pourra retirer à la Buzy bien(re)venue sa sincérité, sa volonté. La dame a grandi avec une loyauté et un franc-parler qui laissera toujours "InLove". Et elle de conclure : "Je veux que ce disque marche mais si ce n’est pas le cas cela ne remettra pas mon intégrité, ma personnalité ou ma vie en jeu. Et ça, je ne le savais pas dans les années 80."

Buzy BorderLove (Night & Day) 2005