Vu d'ailleurs nov. 2005
De Benjamin Biolay à Françoiz Breut, en passant par Arthur H, Philippe Katerine et Sébastien Tellier, la pop française sait se renouveler et s’attire le respect de la presse étrangère.
La pop au top
De Benjamin Biolay à Françoiz Breut, en passant par Arthur H, Philippe Katerine et Sébastien Tellier, la pop française sait se renouveler et s’attire le respect de la presse étrangère.
La pop française a la cote. Après avoir relevé la tête dans les années 90 grâce à la house et aux musiques du monde, elle s’attire depuis le début de la décennie les faveurs de la presse internationale grâce à une nouvelle vague de… chanteurs français. Cette génération d’artistes parviendra-t-elle à faire tomber la barrière de la langue ? Le mensuel musical allemand Intro s’est intéressé, dans son numéro d’octobre, à "la nouvelle école française". "Quand on entend le mot chanson en Allemagne, un film commence dans la tête, dans lequel on voit des hommes vêtus de costumes années 50-60 et fumant des cigarettes sans filtre. On voit aussi des créatures comme Brigitte Bardot." Mais "qui sont les héritiers de cette époque dorée", s’interroge Intro. Comme au début des années 1980, la Bretagne est redevenue un vivier important, sous l’appellation "scène nantaise", grâce à des artistes comme le Brestois Yann Tiersen, "l’autre star d’Amélie Poulain", et "le très glamour Philippe Katerine". Sur la carte de la France pop, on trouve aussi Jérôme Minière, Orléanais installé à Montréal, le Caladois Benjamin Biolay, "un dandy qui a épousé Chiara Mastroianni, la fille de Catherine Deneuve", la Cherbourgeoise Françoiz Breut, et j’en passe (Mathieu Boogaerts, Pascal Parisot, Vincent Delerm, Albin de la Simone...).
Justement, la susnommée Françoiz Breut sort un album : Une saison volée (Tôt ou tard/Warner). Le Süddeutsche Zeitung (19/10), édité à Munich, salue cette digne représentante de la "nouvelle chanson" et son univers "gentiment mélancolique". Pour le journal australien The Age (23/10), cette jeune artiste "crée l’illusion de chanter pour une seule personne : vous-même" et "évoque une Françoise Hardy moderne", bien qu’elle "exprime une gamme plus large d’atmosphères et d’émotions". Ailleurs, alors que son père, Jacques Higelin, enchante Charles Trénet sur les routes de France et de Navarre, Arthur H, dont le nouvel album Adieu tristesse (Polydor) est sorti le mois dernier, prépare ses valises pour une prochaine escapade en Espagne. "Le musicien, chanteur et compositeur français Arthur H offrira le 11 novembre prochain son unique récital en Espagne", informe sobrement la presse espagnole, relayant une dépêche de l’agence EFE (26/10). L’évènement aura lieu au Palacio de los Deportes (Palais des Sports).
Fan de Syd Barrett et de Robert Wyatt, le Parisien Sébastien Tellier occupe une place à part dans cette nébuleuse, avec une musique très personnelle qui mélange les genres, et une personnalité non moins iconoclaste. Le quotidien national britannique Telegraph (6/10) s’est récemment penché sur le phénomène. "Sébastien Tellier possède un look sauvage", avec "sa barbe de Jésus en bataille et ses cheveux bruns ébouriffés". Extrait de l’album Politics (Record Makers), La Ritournelle a été décrite "par de nombreux critiques modérés comme la chanson la plus puissamment émotionnelle à avoir marqué les dancefloor depuis Unfinished Sympathy de Massive Attack". Une référence. Le reste du disque est plus déconcertant. "C’est un album concept bizarre sur le coût humain des grandes victoires politiques et la fascination de Tellier pour les figures dictatoriales." Le "despote" s’en explique : "Dans cet album, je me suis mis dans la peau d’un dictateur. C’est mon rêve ! Avant de mourir, j’aimerai beaucoup être le leader d’une secte – donnez-moi cinq ans. J’aime l’idée d’un seul homme, un complet égoïste, dirigeant d’innocentes gens. "
Moins inquiétant que Sébastien Tellier, Philippe Katerine évolue aussi dans un style complètement inclassable. Tellement bizarre que son nouvel album concept, Robots (Rosebud), "nous laisse avec un étrange malaise", grince le chroniqueur du journal canadien La Presse (16/10). "Katerine, devenu agoraphobe, s'est enfermé dans sa chambre avec une boîte à rythme pour ériger les charpentes électroniques qui serviront à appuyer des textes paranos (Le Train de 19 heures), inquiétants, crus (Excuse-moi), parfois loufoques (Au Louxor) et frôlant l'absurde - seule constante dans la plume de Katerine. Au final, le dandy français (qui cherche de toute évidence à briser cette image, en commençant par son look, ainsi que l'exprime l'hideuse pochette) engage Renaud Létang et Gonzales pour polir les squelettiques arrangements de Robots." En s’affranchissant des règles classiques, la pop française crée la (bonne) surprise de l’automne.