La musique au bout du comptoir

Il n’y a pas que chez les disquaires que l’on peut découvrir de nouveaux artistes, ni dans les salles de concert que l’on entend de la musique live. Au coin de la rue aussi. Ou plutôt au comptoir de ces cafés parisiens qui programment régulièrement des concerts, de plus en plus nombreux dans la capitale française. Ambiance.

A Paris, les cafés-concerts se sont multipliés

Il n’y a pas que chez les disquaires que l’on peut découvrir de nouveaux artistes, ni dans les salles de concert que l’on entend de la musique live. Au coin de la rue aussi. Ou plutôt au comptoir de ces cafés parisiens qui programment régulièrement des concerts, de plus en plus nombreux dans la capitale française. Ambiance.

C’est un café de quartier comme il y en a plein Paris. Discret et petit, on passerait presque devant sans le remarquer. Puis on lit : “Zic-Zinc”, suivi de “vente de CD”. Deux fois par semaine, le bar reçoit des musiciens, jusqu’à 22h30, pour ne pas gêner les voisins. Ce soir, c’est le duo Cathon Cataix qui se produit sur scène. La scène, justement… : dix minutes avant le début du concert, on a du mal à la situer au milieu des tables de la petite salle. Elle apparaît “comme par magie”, selon Antoine, le jeune patron, qui pousse les meubles, sans perturber la sieste du chien installé dans un coin. Doucement, les gens arrivent et se serrent derrière le zinc. Aux premières notes des accordéons, les conversations s’interrompent et la clientèle se fait auditoire. “On vient ici pour les rencontres et le plaisir de la musique”, raconte un habitué. Des rencontres entre gens du quartier, entre amateurs de chansons françaises bien troussées ; une opportunité de discuter avec les artistes qui chantent là, simplement, au milieu de la foule. A la pause, ils tournent parmi le public et avancent le chapeau, qui fera la recette du soir.

Antoine pensait d’abord ouvrir un magasin de disques, avec un coin bar. Il a finalement fait l’inverse, mais toujours parce qu’il aime la chanson en concert, pour “cette spontanéité qu’il n’y pas sur le CD”. Rapidement, la formule a attiré du monde. Ils sont deux à trois fois plus nombreux à pousser la porte du Zic-Zinc les soirs de concert.

Tout le monde s'y retrouve

Ces dernières années, les cafés-concert se sont multipliés dans la capitale. La création en 1994 de Lylo, l’agenda des événements musicaux à Paris, a participé au phénomène. La petite bible du caf’conc’ estime qu’en dix ans l’offre de musique live s’est multipliée par dix. Aujourd’hui, le choix est ouvert. Côté musique, tous les genres sont représentés : chanson française en tête, mais aussi musiques du monde, reggae, électro, techno, jazz… Côté lieux, on trouve aussi de tout, du bistrot traditionnel qui fait avec les moyens du bord, aux bars qui aménagent des scènes pour proposer des concerts quotidiens. L’entrée est libre ou tarifée à petits prix, entre 5 et 10 euros en moyenne. Pourquoi ce succès ? Sûrement parce que tout le monde s’y retrouve, les cafés comme les clients. Mais aussi parce que certains lieux viennent combler le manque de petites salles à Paris et permettent de produire des artistes qui, s’ils ne remplissent pas le Palais omnisports de Paris-Bercy, ont leur public.

Du rêve et de la poésie

Ainsi à la Flèche d’Or, près de la porte de Bagnolet, installée dans une ancienne gare de la Petite ceinture parisienne. Dans la grande salle, la scène, encadrée comme un tableau, fait face au bar circulaire, au centre du café. Chaque soir, trois groupes se relaient, qui ne jouent pas forcément dans la même catégorie : des pros (l'Américain Ben Harper est passé par là !) ou des musiciens en passe de le devenir, du pop-rock surtout, mais aussi des musiques orientales, un peu de hip-hop. On vient ici pour le lieu, sa programmation, pour découvrir de nouveaux sons, poussés à fond ! Pour boire et même manger, pour écouter et répondre aux musiciens, pour danser…

Au Limonaire, on croit entrer dans un restaurant et c’est tout un programme qui retient l’attention. Tous les soirs, les musiciens sont à l’honneur dans ce “bistrot à vins et à chansons”. La participation du public, qui mélange jeunes et anciens, est également sollicitée. Le lundi, par exemple, lors des soirées goguette où chacun peut monter sur scène chanter ses textes. Ou, un dimanche par mois, pour regarder un film muet accompagné au piano. Mais le plus souvent pour découvrir des artistes, jeunes ou confirmés et se voir “offrir un peu de poésie et de rêve”, comme le propose Noëlle qui travaille dans l'établissement depuis près de vingt ans. A 22 heures, quand la lumière se fixe sur la petite scène, le service s’interrompt et le spectacle commence. Ce mardi-là, Eric Toulis chante les petits riens de la vie qui avance, c’est drôle et touchant. La salle bondée dégage une douce intimité, à l’écoute ; le lieu sonne juste pour cette chanson réaliste et poétique. Après les rappels et les applaudissements, chapeau pour l’artiste, que certains viennent remercier au comptoir. Avant de repartir dans le froid.

Zic-Zinc, 39 rue Saint-Maur, 75011 Paris
La Flèche d’Or, 102 rue de Bagnolet, 75020 Paris
Le Limonaire, 18 cité Bergère, 75009 Paris
Lylo (Les Yeux Les Oreilles), agenda bimensuel des concerts de la région parisienne, disponible gratuitement dans les bars.