La marque des Wampas
Un succès inopiné au bout de vingt ans de carrière était tombé sur Les Wampas en 2003. La France chantait alors à tue-tête le refrain de Manu Chao et les cinq compères signaient les autographes avec étonnement. Autant dire que leur neuvième album Rock’n’roll part 9 était un peu plus attendu que les précédents. Rencontre.
L'esprit punk toujours là
Un succès inopiné au bout de vingt ans de carrière était tombé sur Les Wampas en 2003. La France chantait alors à tue-tête le refrain de Manu Chao et les cinq compères signaient les autographes avec étonnement. Autant dire que leur neuvième album Rock’n’roll part 9 était un peu plus attendu que les précédents. Rencontre.
D’abord il y a les différences. Comme la collaboration d’un producteur, Ken Allardyce, qui travaille un son si propre que certains fans des punks déjantés qualifient ce disque de plus pop. Didier Wampas, voix et figure emblématique du groupe, ne leur donne d’ailleurs pas tort. "Même moi ça me gêne un peu. Dans l’absolu, j’aimerais bien que ça soit plus crado mais finalement, je l’ai réécouté tout à l’heure, ça va. Puis on est resté porte de Bagnolet on n’est pas allé à New York pour faire ça."
Ensuite il y a la voix si typique de Didier. Cette signature qui a toujours eu le charme d’être bancale sonne aujourd’hui bien en place. On finirait même par trouver ça joli. "Je sais. Mais ça aussi c’est un peu arrangé."
Enfin, il y a le remaniement de la formation qui est loin d’en être à son premier va-et-vient. Pour tout dire c’est même la seizième fois que les crédits changent. Cette fois, c’est Jo, l’un des guitaristes qui n’est plus là. "On l’a viré dans un avion au dessus de l’Afrique. On a fait l’album à quatre et Tony Truant va venir faire le cinquième à partir de maintenant."
La friandise du rock en France
Mais il y a surtout ce qui ne change pas, ce qui sera éternellement la marque des Wampas, ce qui fait d’eux la friandise du rock en France : l’absurde et le surréalisme, l’intégrité et la simplicité, l’humilité et le festif. De la ballade tendre aux guitares énervées, les ambiances changent, tournent, voyagent. Il y a l’hommage au cycliste Marco Pantani, la grinçante canonisation du RMI, Christine la punk un peu trop fille à papa, le clin d’œil taquin à U2, le cidre de Bretagne, les années souvenirs où Didier avoue Quand j’étais psycho. "Pratiquement personne ne sait de quoi je parle, il faut vraiment avoir vécu ça. Il y a longtemps que je voulais faire la reprise de Michel Delpech Quand j’étais chanteur en transformant en psycho… je ne l’ai pas faite mais j’ai gardé l’idée."
Il y a aussi cet hommage déroutant et drôle à Johnny, cette sincère naïveté du "ce n’est pas pour l’argent/ ce n’est pas pour la gloire/ écrire une chanson pour Johnny". Didier Wampas explique : "J’étais en studio et comme d’habitude je n’avais pas de paroles pour la chanson. Le patron de la maison de disques est arrivé et a dit que Hallyday cherchait des gens pour écrire. Ça m’a inspiré de suite ce texte. Puis j’ai écrit une chanson pour lui, c’est Christine en fait. On ne lui a pas envoyé parce que y a "punk à chien" dans le refrain, il y avait peu de chances pour qu’il accepte. Alors je me la suis gardée."
Et évidemment il y a ce titre sulfureux qui a déjà fait couler beaucoup d’encre, ce Chirac en prison que Didier a écrit après s’être posé la question de la liberté d’expression et de la censure. "Je me suis juste demandé ce qui se passerait si on mettait cette phrase dans un refrain. Et c’était intéressant, j’ai vu comment marchent les médias. Quand on me dit que c’est un coup de pub j’ai juste à répondre que le single ne s’est pas vendu puisqu’il ne passe pas à la radio. Le plus drôle est quand on a fait l’émission télé de Guillaume Durand, toute la soirée un invité a dit du mal de Chirac : pas de problèmes. Mais nous on n’a pas le droit de jouer la chanson... "
Trois accords, pas plus
Côté musique aussi les invariables jouissances des Wampas sont de mises. Trois accords, pas plus. Un esprit punk qui reste, une fraîcheur simple qui ne se complique rien. C’est Didier qui en est le responsable : "C’est un vrai choix de ne faire aucun progrès. Ça me suffit, je suis super heureux avec mes trois accords. Puis j’ai trouvé mon style, personne ne joue avec deux doigts au bout de plus de dix ans."
Didier Wampas est l’homme le plus normal du rock, juste un type simple qui à côté de son travail d’électricien à la RATP fait de la musique. Un genre d’honnête et droit dans ses bottes qui trouvera toujours la condition de chanteur peu naturelle. "C’est sur scène que c’est bizarre. Ce n’est pas une situation normale, que cela soit devant cent ou dix mille personnes. À chaque fois je me pose des questions. Puis c’est rare que je sois fier de moi. Avant de monter, je me demande ce que je fous là et après je me demande ce que j’ai foutu !" S’il en est donc un qui ne court pas après la gloire ou l’argent c’est bien lui. Juste sa guitare aux trois accords, ses potes et ses envies. Juste le plaisir. Alors forcément Rock’n’roll part 9 s’écoute avec le sourire.
Les Wampas Rock’n’roll part 5 (Atmosphérique) 2006
En tournée à partir du 31 mars.