Dionysos porté par la foule
Vous en connaissez beaucoup vous des groupes capable de chanter a capella dans une salle de 5 500 personnes ? Dionysos a une nouvelle fois offert un concert incendiaire avec un final de folie. Apothéose d’une soirée électrique emmenée par les Hushpuppies, Katerine, Artic Monkeys et Deus.
Champion du monde, catégorie : crawl sur public
Vous en connaissez beaucoup vous des groupes capable de chanter a capella dans une salle de 5 500 personnes ? Dionysos a une nouvelle fois offert un concert incendiaire avec un final de folie. Apothéose d’une soirée électrique emmenée par les Hushpuppies, Katerine, Artic Monkeys et Deus.
L’après midi, les Hushpuppies appréhendaient de n’être que le groupe qui jouerait le temps que la salle se remplisse. Une frayeur infondée puisque dès l’entame du set des Français, les gradins étaient déjà noir de monde et les premiers rangs dans la fosse bien agités. Les "chutes de chiots" (traduction littérale) ont défendu crânement leur chance. Si leur musique et leur style s’inspire très nettement des années 60, nous sommes loin d’un exercice d’exhumation. Le quintet aligne des mélodies pop portées par une guitare acérée, avec un son on ne peut plus actuel. Signe de contentement dans la salle : on aperçoit les premiers slammeurs portés à bout de bras par le public. Les Hushpuppies ont mis toute leur énergie dans ces trente minutes. La voix cassée, Olivier, le chanteur, remercie la salle.
Il se tient au milieu de la scène, bras en croix, chemise rose parfaitement assortie à la fleur qu’il a glissé dans ses cheveux. L’assistance applaudit à tout rompre : Philippe Katerine n’a pas encore esquissé une vocalise. A écouter Louxor, VIP, on a peine à croire que les morceaux de son dernier album Robot après tout sonnaient à l’origine résolument électronique. Accompagné par une partie des ex-Little Rabbits, il a complètement remanié l’orchestration pour des versions terriblement rock et parfaitement efficace. L’ancien prof de gym doit être le seul en France à pouvoir faire danser plus de 5 000 personnes juste en égrenant des chiffres. Son style baroque déconcerte : "Il se la raconte quand même beaucoup", lâche un spectateur sceptique. Deux morceaux plus tard, il ne pipe plus mot, complètement hypnotisé. C’est ça l’effet Katerine.
Vous les verriez dans un bar, vous les trouveriez sympa. Sur la scène du Phénix, on ne peut s’empêcher de trouver la "dernière nouvelle relève anglaise du Rock’n’Roll" quelque peu survendue. Les Arctic Monkeys balancent une floppée de bons titres dans un ensemble relativement linéaire mais c’est surtout le jeu de scène qui pêche. Un signe qui ne trompe pas, le chanteur joue avec sa guitare très haut sur sa poitrine comme si habituellement il ne pratiquait son instrument qu’assis. Il y a certainement nombres de Découvertes rock de cette année qui les auraient largement supplantés ce soir…
La salle du Phénix convient parfaitement à Deus. Comme l’oiseau fabuleux, la formation belge renaît de ses cendres, après un lustre de silence. Son leader Tom Barman a maintenant atteint le juste équilibre entre douceurs pop et expérimentations mais il s’est souvenu qu’une pédale de distorsion était raccordée à son ampli. A l’apparition du groupe succède un bon quart d’heure de déluge sonore, ponctué d’un impressionnant jeu de lumières. Après une heure de pop jouissive et puissante, Deus tire sa révérence sur son hymne imparable Suds & Soda. Le public n’exige pas de rappel, dommage.
20 minutes d’attente avant l’arrivée de Dionysos. Le public piaffe d’impatience. La scène s’allume sur deux arbres échappés d’une gentille forêt hantée. Pendant plus d’une heure, les valençois vont nous présenter le bestiaire échappé de leur album Monsters in love.
On retrouve Giant Jack, L’homme qui pondait des œufs, Miss accacia... Comme à son habitude, Mathias, le chanteur, saute en tous sens, se roule par terre, grimpe sur les structures soutenant les projecteurs. Le groupe s’est même adjoint les services d’un nouveau guitariste pour laisser à son leader une totale liberté dans ses excentricités. Pour son quatrième passage au Printemps, Dionysos ne fait pas dans la dentelle. C’en ai même étonnant de voir le public s’extasier sur un rock aussi sombre et agressif. Le stade ultime de la frénésie sera atteint pour un rappel d’anthologie : une version de quinze minutes de Song for a Jedi avec en prime un crawl de Mathias à travers toute la salle. Une fois les lumières éteintes, décidément infatigable, le chanteur revient et devant plus de 4 000 personnes (quasi) silencieuses interprète a capella Tokyo Montana. Intense instant de communion lorsque tout le monde reprend en chœur le refrain. On touche alors de la voix le secret de Dionysos : faire du public non un spectateur mais bien un membre à part entière du groupe. Chapeau.