Maman au Bataclan

Appuyant son répertoire sur son dernier album éponyme, dont le succès se renforce tranquillement, Bruno Maman, auteur, compositeur, et interprète de chansons très intimes, s’est résolu à apporter à son travail une dimension scénique qui lui manquait, du temps de ses deux premiers opus, dans les années 90.

Bruno Maman hante les scènes

Appuyant son répertoire sur son dernier album éponyme, dont le succès se renforce tranquillement, Bruno Maman, auteur, compositeur, et interprète de chansons très intimes, s’est résolu à apporter à son travail une dimension scénique qui lui manquait, du temps de ses deux premiers opus, dans les années 90.

RFI Musique : Avant de monter sur la scène du Bataclan, comment appréhendez-vous le live ?
Bruno Maman : De tout temps, le live a été une constante, une façon de révéler des artistes au public. C’est moi qui, à l’époque, me considérais plus comme un auteur-compositeur. J’avais fait quelques concerts, mais je me sentais plus à l’aise dans ma bulle du studio, curieusement. Je dis curieusement parce qu’aujourd’hui je ne fais plus aucune différence, et je comprends le besoin qu’on a des deux. Il ne s’y passe pas les mêmes choses. Je me suis mis à faire de la scène réellement avec cet album. Auparavant, je retournais toujours dans ma planque. Cet album est aussi très simple : toutes les chansons ont été composées avec une guitare et un piano, donc le fait d’aller sur scène avec une guitare et un piano, ça me paraît logique. Même si pour moi ça a été une démarche nouvelle.

Ce disque comporte pourtant une mise en scène sonore luxuriante du mythique arrangeur de Gainsbourg, Alain Goraguer ?
Il n’y a pas de façon de recréer ces arrangements sur scène, donc j’ai pris le contre-pied, j’ai décidé d’être complètement minimaliste, et d’intégrer dans mes parties de guitare des lignes mélodiques d’Alain. C’est comme une réorchestration. Pour le piano, on a fait des réductions d’orchestre, en reprenant l’idée principale de l’arrangement, pour le recréer avec un seul instrument. Les chansons, de cette façon-là, sont pour certaines exactement comme je les ai composées, et pour d’autres, elles sont enrichies des lignes fortes mélodiques d’Alain. Ce qui donne un spectacle intimiste. Je ne voyais pas d’entre deux. On a pour projet de faire un concert, pour la rentrée, avec tout l’orchestre. J’avais parlé de ça avec Goraguer, on s’était interrogé sur la façon de recréer ces arrangements sur scène. Quand je suis allé le voir avec mes maquettes, c’était juste piano et voix. Alors on s’est dit que j’allais dérouler le fil à l’envers, et revenir à ça.

Au Bataclan, ce sera donc aussi dépouillé que lors de la série de concerts au Bateau-Lavoir ?
Dépouillé, mais en trio. J’ai fait une rencontre avec un pianiste et multi instrumentiste, Medhi Benani. Et puis il y a toujours Patrick Goraguer au piano, aux percussions : on va se retrouver à trois pianistes, avec moi parfois à la guitare. C’est agréable d’avoir des musiciens poly-instrumentistes. Patrick, ça fait 20 ans qu’on travaille ensemble, c’est un peu mon alter ego. Les concerts sont différents à chaque fois, même si on a des structures assez écrites. La scène, c’est comme le sport ! Il faut avoir la forme, déjà, car le moindre coup de fatigue se ressent. Et puis je comprends qu’on veuille ne plus s’arrêter, je comprends Bob Dylan, avec son "never ending tour" qu’il prolonge depuis des années. On écrit des chansons en studio, qui rencontrent leur public par la radio, mais la musique vivante, c’est autre chose. On n’a fatalement pas les mêmes émotions. En studio, je suis attentif, je refais beaucoup mes voix. Sur scène, je dois être spontané. Il y a une forme d’humilité.


D’autant plus quand on fait des premières parties…

Depuis le mois de décembre, j’ai fait des premières parties de Calogero, Hubert-Félix Thiéfaine, Michel Jonasz et Marc Lavoine. J’ai le sentiment que les gens qui me connaissaient ne m’ont pas oublié, d’autres me découvrent aujourd’hui. Le public de ces gens-là a une vraie curiosité, ils ne viennent pas pour moi, mais ils ont une vraie écoute. Ça me plaît d’être débutant à chaque disque, j’ai le sentiment de recommencer à zéro quelque chose. Je rêve à chaque fois de contrées vierges, non foulées. Etes-vous vous-même consommateur de concerts ?
Pas plus que ça, je me suis souvent surpris à louper des choses que je voulais voir. J’essaie d’aller voir les copains, déjà, et puis les gens que j’aime, mais je sors peu, c’est handicapant. Ayant vécu à Strasbourg, j’ai un grand souvenir de la grosse salle locale, j’y ai vu Bob Marley à l’époque, c’est inoubliable. Il avait fait Redemption Song, seul à la guitare, que je ne connaissais pas puisqu’il ne l’avait pas encore enregistré. Les moments de musique sont toujours liés à des moments de vie, de bonheurs, de peine, de coups de foudre, de ruptures… La musique n’est jamais loin, elle est toujours là.