Sergent Garcia tombe le masque
Depuis le temps, on s’en doutait un peu mais avec son cinquième album, Mascaras, c’est maintenant évident. Sous ses dehors de musicien, Sergent Garcia agit en tant qu’un agent infiltré en Occident des rythmes latins. Sa mission : propager dans le plus grand nombre d’oreilles possible la culture musicale de cette autre Amérique. Et le gars Bruno s’en acquitte plutôt bien, une fois encore.
Toutes les influences de la musique latine
Depuis le temps, on s’en doutait un peu mais avec son cinquième album, Mascaras, c’est maintenant évident. Sous ses dehors de musicien, Sergent Garcia agit en tant qu’un agent infiltré en Occident des rythmes latins. Sa mission : propager dans le plus grand nombre d’oreilles possible la culture musicale de cette autre Amérique. Et le gars Bruno s’en acquitte plutôt bien, une fois encore.
Il a ce point commun énervant avec le chanteur Antoine. On a l’impression que Sergent Garcia passe le plus clair de son temps à se balader à travers le monde et de temps à autres, il revient nous narguer avec toutes les beautés vues et entendues. Son prédécesseur (beaucoup plus) barbu nous gratifiait à l’époque des reportages télé. Lui nous sert régulièrement une galette épicée fourrée des multiples influences musicales côtoyées durant ses expéditions.
Mascaras, le cinquième album ne fait pas exception. Sergent Garcia a tourné pendant deux ans avant son enregistrement, aussi bien en grande formation qu’en sound system. Au fil des concerts et des continents, il a constaté que même si chaque ville avait ses traditions locales, elles contribuaient toutes à une onde globale et universelle. C’est cette buena onda qu’il entend restituer en usant toujours de sa salsa-muffin, mélange détonant d’effluves latines et reggae. Les fondamentaux restent donc les mêmes mais loin de faire du sur-place, Bruno Garcia et son compère le percussionniste Ivan Montoya, ont enrichi leurs compositions d’électronique, de cumbia et de folk.
Jamais en retard d’une tendance
Guitares rock, matraque de percussions, l’intro du premier titre Dulce con chile surprend… pour mieux enthousiasmer. Sur cette chanson où un couple s’aime et se déchire, Sergent Garcia rappe, chante en espagnol sur un tapis de basses électro. Un premier single qui va vite vous tourner dans les tympans. Le rayon "machine à danser" est d’ailleurs fort bien achalandé dans cette cuvée. La bombe salsa Eres Tu ne pourra pas vous laisser de glace, obligé que vous serez de fondre sous les cuivres incandescents du refrain. Même sanction avec Pintame, cette fois gorgée de mambo.
Sergent Garcia ne renie rien. Si le reggae est moins mis en avant que sur ses précédents albums, il sert toujours de creuset à ses compositions. Que ce soit avec le folk très argentin Tantas Cosas, chanté en duo avec la Cubaine Yaité Ramos Rodriguez ou sur cette chanson en français, Guantanamo City, avec un break dancehall étudié pour faire chavirer les concerts. A noter que les paroles de ce titre sont l’œuvre de Karim Berrouka, l’ex-acolyte de Bruno au sein du combo punk alternatif Ludwig von 88.
Jamais en retard d’une tendance, avec Si solo fuera yo un pajaro, Sergent Garcia se met au reggaeton, le son du moment, mélange de rap, musique latine et reggae. Le Français garde d’ailleurs toujours une affection particulière pour le hip hop qu’il sert pur avec des relents d’Eminem sur Non-words ou coupé à la salsa dans Les 5 sens du guerrier.
C’est cette alliance entre musique populaire et urbaine que Bruno cherchait à atteindre. Pour cela, il s’est adjoint les services de Toy Hernandez, le producteur de Control Machete, le premier groupe de rap latino à avoir irradié sur tout le continent américain à la fin des années 90. Sa capacité à intégrer un instrument acoustique dans une structure électronique l’a emballé d’emblée. Le résultat est parfaitement convaincant sur Yo me voy pa’ la cumbia où le Sergent lorgne vers la cumbia, ce style à base d’accordéon, répandue dans toute l’Amérique latine (même si les connaisseurs ne jurent que par la colombienne, la vraie !).
Un pont entre tradition et modernité
Cette collaboration avec le Mexicain lui a permis d’enregistrer au pays des Aztèques, à Monterrey, ville limitrophe des Etats-Unis. Un choix loin d’être anodin puisque pour le chanteur, le Mexique représente la charnière entre nord et sud, tradition et modernité. Le titre de ce cinquième album, Mascaras, (masques en français), est d’ailleurs un hommage à une des grandes traditions du pays : la lucha libre. Dans ce catch très populaire, les protagonistes montent sur le ring le visage couvert d’une cagoule. Un choix allégorique pour El Sergento, une façon de rappeler que dans notre monde de communication à outrance, les idées, les personnes ne correspondent pas toujours à la description qui en est faite. Derrière les effets d’annonce, il faut encore chercher la vérité.
De Mexico à Barranquilla, en passant par Buenos Aires ou Lima, Sergent Garcia vous offre le meilleur de la musique latine. Sa salsa-muffin maintenant bien étoffée se coule librement dans tous les styles du continent. Plus qu’un disque, Mascaras se révèle bien vite une carte de visite plus que présentable des musiques qui émoustillent cette Amérique hispanisante. Une bonne manière de continuer l’été à la rentrée.
Sergent Garcia Mascaras (Emi-Labels) 2006