Mano (vraiment) Solo

Rendez-vous le 18 septembre 2006, à Paris, salle de l’Olympia. Mano Solo y présentera In the Garden, son septième album. Un disque qui ne sera commercialisé que dans six mois. L’artiste a décidé de se produire seul en lançant une souscription par Internet avec l’envie de renvoyer dos à dos maisons de disques et adeptes du "tout gratuit".

Il va produire seul son prochain album

Rendez-vous le 18 septembre 2006, à Paris, salle de l’Olympia. Mano Solo y présentera In the Garden, son septième album. Un disque qui ne sera commercialisé que dans six mois. L’artiste a décidé de se produire seul en lançant une souscription par Internet avec l’envie de renvoyer dos à dos maisons de disques et adeptes du "tout gratuit".

Ni colère, ni déception. Mano Solo n’a pas quitté son label sur un coup de tête, qui ne l’a pas remercié pour cause de méventes. "Je ne me place pas en ennemi des maisons de disques, précise d’emblée le chanteur. Warner voulait me re-signer. Ils étaient de bonne volonté. J’ai choisi, je ne sais pas pourquoi d’ailleurs. Peut-être parce que j’ai les moyens de le faire." Et aussi par volonté d’en découdre, de se confronter à ce qu’il appelle "une mentalité un peu viciée". Cette vision manichéenne qui oppose majors "qui s’engraissent" et partisans du téléchargement "qui tuent les artistes".

Depuis 6 ans, Mano Solo anime son site Internet, l’un des plus fournis dans le genre : "Sur mon forum, en permanence, il y avait de grands débats sur le téléchargement. C’est peut être ce qui m’a conduit là finalement. Cette décision, c’est pour montrer que même si c’est moi qui produit l’album, il aura le même coût. Même en se débarrassant soit disant de l’ennemi honni : les maisons de disques. Et même pire, je ne peux pas faire les mêmes remises qu’elles parce que je n’ai pas les mêmes volumes. Je vais expliquer aux gens, que s’ils veulent que Mano Solo existe, on ne peut pas le télécharger. Si tu n’achètes pas cet album, il n’y aura pas de prochain. Dans le prix d’un disque, il y a  aussi celui de la diversité."

Le discours le plus raisonnable

Loin d’être un théoricien, Mano adopte une attitude ambivalente sur le téléchargement. Lui-même utilisateur, il ne condamne pas, à priori, la pratique. "Quand je télécharge un film avec Arnold Schwarzenegger, je n’en ai rien à battre. Je sais que toute façon jamais j’aurais été le voir au cinéma. Je l’ai juste consommé comme s’il était passé à la télé. Je le jette après." En schématisant, on pourrait résumer sa position par : on achète ce qui est bien, le reste on télécharge ! Une doctrine pas évidente à mettre en pratique. Mano l’admet humblement : "Je pense que mon discours ne tient pas vraiment le coup mais c’est le plus raisonnable que j’ai. Celui sur le téléchargement à tout va se mord aussi la queue. C’est une position libérale : puisque je peux le faire, je fais, peu importe les conséquences pour l’autre. Si les gens qui me téléchargent me consomment comme [un film de Schwarzie], c’est qu’ils ne m’aiment pas vraiment."

Le filtre d’amour concocté par Mano se décline sous la forme d’une souscription. En payant 17 euros, vous aurez accès à un espace privilégié sur son site internet. L’artiste promet deux titres par mois à écouter en exclusivité, des clips, l’accès aux répétitions par le biais de sa télé interne et "tout ce qu’il sera possible d’imaginer". Les souscripteurs recevront également l’album avant sa sortie dans le commerce, prévue dans le courant du mois de mars 2007. L’argent récolté servira essentiellement à la promotion, "le nerf de la guerre", domaine dans lequel les maisons de disques font preuve d’immobilisme selon Mano : "Pour mon précédent album, j’avais exactement le même plan de communication que sur le tout premier, sorti il y a treize ans. On fait comme si Internet n’existait pas, comme si ça marchait toujours en fait, comme si draguer une grosse radio allait suffire à te faire connaître dans la France entière. Je ne comprends pas que les sites web des maisons de disques soient morts. C’est juste un catalogue. En même temps, ils tiennent le grand discours : "Internet nous détruit". Mais t’as qu’à y aller mon gars !"

L’appel du 18 septembre

"L’intérêt d’une maison de disques, c’est son service de presse. Sauf que maintenant, ils bossent sur toi pendant trois mois et après ils sont obligés de passer à autre chose.Ça me contrarie. J’ai une carrière. Moi, je veux être présent tout le temps. Je suis assez commerçant pour avoir envie de me vendre au jour le jour." Une démarche qui n’est qu’un retour aux sources pour l’artiste déjà producteur de ses concerts : "Avant de faire de la musique j’étais avec des peintres de rue. On n'avait qu’une idée : amener la peinture partout et la vendre en permanence. On s’appelait les book’tins parce qu’on se baladait dans tous Paris avec notre book. Quand tu finis par vendre un tableau, c’est quand même une sacrée reconnaissance. Le côté commerçant, la conquête, ça m’éclate."

La campagne débute grandeur nature, le 18 septembre, salle de l’Olympia. Une entame plutôt culottée : remplir une salle de plusieurs milliers de personnes sans pratiquement aucune promotion. Peut-être déjà une indication sur la saveur de la suite de l’aventure... Mano Solo affirme devoir vendre entre 30 000 et 40 000 exemplaires d’In the Garden , son septième album, pour pouvoir financer les suivants.

Mano Solo en concert à l’Olympia (Paris) le 18 septembre 2006.
Souscription sur : www.manosolo.net/