Seb Martel

Trois ans après la parution de Ragalet, Seb Martel sort un nouvel opus : Coïtry?. Ce double album, partagé entre un côté "ville" et un côté "campagne", révèle les deux facettes de Seb : un dandy, chouchou d’une nouvelle scène parisienne, qui  continue de concocter ses créations à la campagne, chez sa grand-mère.

À la campagne comme à la ville

Trois ans après la parution de Ragalet, Seb Martel sort un nouvel opus : Coïtry?. Ce double album, partagé entre un côté "ville" et un côté "campagne", révèle les deux facettes de Seb : un dandy, chouchou d’une nouvelle scène parisienne, qui  continue de concocter ses créations à la campagne, chez sa grand-mère.

Le cow-boy guitariste de -M-, c’est lui. On le découvre encore aux côtés de Femi Kuti, Cyril Atef, Vincent Ségal, Camille, Piers Faccini ou Enrico Macias. Depuis Ragalet, un disque au goût des galettes de sa grand-mère, fabriqué quelque part entre l’Anjou et le Poitou, Seb Martel tente une échappée en solitaire. Un nom en haut de l’album qui n’empêche pas les équipées artistiques avec ses "copains".

Un univers teinté de blues

En 2003, le producteur du label Exxos (Chambre avec vue de Henri Salvador) lui commande un album "folk". "Je n’y connaissais rien. J’ai composé Ragalet avec une spontanéité et une naïveté absolues : sans réflexe, sans influence et doué d’une liberté totale. La forme, vaguement ' folk', ne résistait pas à l’analyse !". Seb dépasse malgré lui le cadre "folklorique" pour donner la clé de son univers : un blues artisanal, familier mais énigmatique, touche-à-tout, champêtre. "Je me suis marré à le faire !". Pris au jeu de la chanson.

Trois ans après, Seb Martel remet le couvercle avec Coïtry?, un double album, disque des villes (City Limits) et disque des champs (Country Side). Trois ans durant lesquels le guitariste plonge au cœur de la musique folk américaine (Hank Williams, la Carter Family…) et du blues (Skip James, Blind Blake…). Savoir si l’immersion se perçoit dans l’opus ? "C’est à vous de me le dire ! J’ai étudié tout ça pour moi, mais forcément, indirectement, ça transpire !".

Coïtry? se divise donc en deux formats courts. "Je viens d’un milieu rural, mais j’ai atterri à Paris à 18 ans. Ma vie est partagée entre la ville et la campagne. J’avais envie d’illustrer ça." La part des morceaux s’est faite naturellement. "Au début, il y avait quatre univers. C’était un mois d’août au ralenti. Les gens étaient en vacances. Moi, j’inventais des thèmes : la plage, la montagne, la ville, la lune". Après autocensure, il n’en reste que deux, plus terre-à-terre. Le volet "campagne", solaire, rayonnant, ouvre les fenêtres sur un optimisme rieur ; tandis que la partie "ville", plus électro, s’étourdit dans les limites de ses propres obsessions. "Je réside ici, mais chez moi, c’est là bas. Quand je suis à la campagne, j’ai le cœur joyeux, qui déborde. Quand je reviens à Paris, je déprime".

Les deux albums, en apparence aux antipodes, s’unissent pourtant dans la même veine : le blues, sacré pour Seb. "C’est un état d’esprit que j’ai. C’est pas moi qui le dis, c’est mon ostéopathe, psychologue à ses heures". Et une réserve, une pudeur sur le fil, une délicatesse à ne pas exploser, ni s’affranchir de ces tempos lents, où se devinent une rage et un enthousiasme, timides à s’affirmer. "Je me situe hors compétition. Je suis un coureur de fond, en sport en tout cas. C’est mon côté nonchalant, flegmatique. Je trouve, par exemple, un chanteur comme Al Green fantastique. Il est tout le temps modéré, il ne va jamais au bout. Il lance des indices, tu sens la force qui est en lui, mais il se réserve."

Des invités de marque

Si Seb signe la totalité des musiques de l’album, il délègue les paroles : des noms aussi illustres que Piers Faccini, Cyril Atef, Fred Poulet, Juliette Cuthbert ou Hervé Salters. Des titres partagés entre français et anglais qui permettent à Seb de se démarquer d’une variété française, éloignée de son paysage musical. Citons notamment la très belle chanson Ma Veine, une commande de Seb à Franck Monnet, sur la relation avec son frère Nicolas : "Je voulais une chanson premier degré, sincère, qui illustre la fratrie : des rapports compliqués à gérer. Trop se connaître, et pourtant." Ou encore les textes déjantés de Cyril Atef et Fred Poulet sur la boucle groove "marécageuse" répétée à l’infinie de Shoe Lace. Côté interprètes "invités", Coïtry? se targue aussi de beaux noms : -M-, Vincent Segal, Martin Gamet."J’ai moi-même, accompagné tous ces gens. Je ne prends pas beaucoup de risques !".

L’album fut, à son habitude, composé chez sa grand-mère entre deux tournées de Mathieu Chédid. Une résidence artistique à la Boule Noire et une série de cinq concerts, ont permi de le rôder et de le mûrir. Une démarche singulière : Seb Martel ne divulguait son" Song Book" (partitions, paroles) à ses musiciens que le jour même. "Ça permettait de débroussailler de manière amusante. De réaliser un concert spontané, où se côtoient des musiciens, des comédiens, des danseurs, dans une installation sympa, intimiste et acoustique". Des shows familiaux où apparaissent notamment des invités tels Fred Pallem du Sacre du tympan. "Ils incarnent la nouvelle génération. Nous on a passé la trentaine. On appartient à la deuxième". "Nous", ce sont les copains, toujours présents : Cyril Atef, Vincent Ségal, -M-… "Une amitié fidèle, d’une décennie, nourrie d’expériences et d’expérimentations, qui fonctionne comme un collectif, dans lequel émergent les projets de chacun".

Une autre façon de mieux connaître Seb ? Son site. Quelques infos "pratiques" mais surtout une radio où tournent ses coups de cœur, ses découvertes, de la country au jazz (Sun Ra, John Coltrane…). Le guitariste a, par ailleurs, sur le feu le nouvel album de Las Ondas Marteles, son trio de musique cubaine, avec son frère et la contrebassiste Sarah Murcia. C’est fait : le cow-boy a dégainé. Et capturé l’auditeur. Pas au lasso, mais à la grâce de son talent.

Seb Martel Coïtry? (Because Music) 2006
Actuellement en tournée en France.