Darkel, changer d'air
Echappé, le temps d'un album, de la galaxie Air qu'il forme avec son acolyte Nicolas Godin, Jean-Benoît Dunckel livre enfin ses aspirations personnelles à travers un disque trait d'union. D'une grande richesse sonore, balançant entre une électro-pop à la fois dansante et cérébrale, le laborantin signe son forfait du nom de Darkel. Rencontre.
Un album solo pour Jean-Benoît Dunckel
Echappé, le temps d'un album, de la galaxie Air qu'il forme avec son acolyte Nicolas Godin, Jean-Benoît Dunckel livre enfin ses aspirations personnelles à travers un disque trait d'union. D'une grande richesse sonore, balançant entre une électro-pop à la fois dansante et cérébrale, le laborantin signe son forfait du nom de Darkel. Rencontre.
RFI Musique : Pourquoi cet album solo ?
Jean-Benoît Dunckel : Darkel ce n'est pas quelque chose à la place de, c'est quelque chose en plus de, une fenêtre qui s'ouvre sur mon univers personnel. Les raisons sont aussi artistiques, j'avais besoin de sortir ces morceaux de ma tête pour ne pas être gêné dans le futur. Je n'avais pas le choix.
Que raconte cet album ?
J'ai utilisé les morceaux pour analyser ma vie, mes amours, mes angoisses, mes problèmes spirituels, mes questions universelles. La mort revient assez souvent mais pas d’une façon triste, vraiment. Il y a des élans d’amour, philosophique et sexuel, qui se retrouvent sous différentes formes, des questions mystiques comme celles de Dieu ou de Jésus, et puis il y a ce mot "You" que l'on retrouve dans de nombreuses chansons, un "You" qui peut signifier une femme, sa compagne, ses enfants, mes enfants mais aussi le public.
L'écriture des chansons ?
Ce qui est difficile c’est de savoir ce qu’il faut cacher. Une fois trouvé le mot clé ou le concept de la chanson et trouvé ce qu’il faut cacher, là tout devient facile.
Tu balayes beaucoup de styles différents sur cet album, tu avais besoin de cette ubiquité musicale ?
C’est quelque chose que je voulais expérimenter, je voulais faire ça pour voir ce que ça fait, tout simplement.
Tu te considères plus comme un musicien ou comme un chanteur ?
Comme un musicien qui se laisse parfois aller à chanter, quelque fois c’est heureux, quelque fois ça l'est moins, mais ça on ne le sait jamais au début.
Tu as des objectifs particuliers avec ce disque ?
Je n’ai pas de stratégie. L’objectif, c’était de m’exprimer, de libérer mes chansons. La réaction du public est toujours importante mais je n’attends pas quelque chose de massif. J'ai juste libéré un son dans le paysage musical. Je crois que je vais continuer à faire beaucoup de morceaux, que ça marche ou que ça ne marche pas.
Comment cette volonté de sortir un album solo a-t-elle été perçue par ton acolyte Nicolas Godin ?
Il a été un peu surpris au départ, mais je lui ai très vite donné une copie de l'album, et comme il y a de belles ballades dessus, je pense que le résultat lui convient. De toute façon, nous sortons plein de choses en parallèle, il y a ce side-project Darkel, l'album de Charlotte Gainsbourg 5:55, la compilation de nos morceaux favoris Late Night Tales. Tout cela est excellent pour notre groupe. Ça maintient le public en alerte, et nous avec. Au delà du fait de vendre des disques, ce qui est important c'est la réalisation personnelle, musicalement et humainement parlant, c'est-à-dire apprendre des choses. Grâce à ces projets, moi j’apprends énormément.
Tu n’as pas peur parfois de trop en faire ?
Bien sûr. J’ai peur de trop en faire, d'ailleurs je crois que j’en fais trop, mais je n’y peux rien.
Ton disque perso, tu penses le défendre sur scène ?
Pour l’instant c’est impossible. Les projets se succèdent. Être sur scène c’est un gros investissement. Humainement, il faut beaucoup travailler, ça demande beaucoup de temps, beaucoup de moyens. La priorité est ailleurs.
Mais l’envie est là ?
Je ne sais pas. Je ne sais pas comment faire pour adapter ces morceaux sur scène. J'ai un peu fait cet album tout seul et pour le reproduire en concert, ce sera compliqué.
Quel regard tu portes sur ta carrière ?
Je pense que nous avons énormément travaillé, nous ne nous sommes jamais vraiment reposés sur nos lauriers. Ce qui est bien, c’est que nous avons toujours pris des risques, nous sortons des projets spéciaux et ça, ça nous aide à nous régénérer. C’est génial.
Comment juges-tu l’évolution de la scène électro depuis dix ans ?
La mode est au renouveau du rock mais la musique électronique est toujours active dans les clubs, et elle change, elle évolue. Elle reviendra sur le devant de la scène un jour, quoiqu’il arrive.
Est-ce qu'on a peur de ne plus être dans le coup quand on s'appelle Jean-Benoît Dunckel ?
Je n’ai pas la prétention de faire quelque chose d’universel ou d'éternel, ce que je fais est dans l’instant. Il y aura une traversée du désert. Tous les artistes passent par une période difficile, une période où le public n’est pas en phase. Car c'est le public qui, en partie, fait l’artiste. Les générations se succèdent, les modes changent, on n’y peut rien. Ce qui est jouissif je pense c’est de disparaître pour mieux revenir.
Quelles sont les plus belles critiques que tu pourrais recevoir pour ton album ?
Entendre dire que mon disque est plein d’amour, c'est mon concept. Mettre tellement d’ondes positives et d’amour en général pour qu’on puisse voir le disque chauffer, devenir incandescent et finalement mettre le feu à la console.
Darkel (Source Etc/EMI) 2006