La vie en Red

Axelle Red est une fille old school. Elle préfère le son des vieux vinyles au rythmes de l’ère Internet. Ses héros sont ceux du R'n'B d’un autre siècle. Elle se dit allergique à la globalisation et chante que "le monde tourne mal"... Rien d’étonnant donc de la voir aujourd’hui sortir Jardin secret, sorte de bulle de soul gravée avec l’aide du producteur d’Al Green et de pointures américaines. Et qui s’obstine à positiver - les vieux soulmen disaient "sourire pour ne pas pleurer". Façon de voir la vie en Red quand d’autres broient du noir.

Axelle Red dévoile son Jardin secret

Axelle Red est une fille old school. Elle préfère le son des vieux vinyles au rythmes de l’ère Internet. Ses héros sont ceux du R'n'B d’un autre siècle. Elle se dit allergique à la globalisation et chante que "le monde tourne mal"... Rien d’étonnant donc de la voir aujourd’hui sortir Jardin secret, sorte de bulle de soul gravée avec l’aide du producteur d’Al Green et de pointures américaines. Et qui s’obstine à positiver - les vieux soulmen disaient "sourire pour ne pas pleurer". Façon de voir la vie en Red quand d’autres broient du noir.

RFI Musique : Jardin secret, c’est la "positive attitude" version Axelle Red ?!
Axelle Red : C’est une forme de contrepoids à mon album précédent, qui était aussi très engagé, mais dans lequel j’étais beaucoup plus "fâchée" ! J’ai beaucoup voyagé ces derniers temps et donc été confrontée à la misère, aux choses qui ne vont pas : j’avais envie de dire ce que je voulais de façon positive. C’est un exercice de style et une sorte de thérapie pour moi. En même temps, pour pouvoir continuer à lutter contre les injustices ou tout simplement survivre dans ce monde, on a besoin d’être utopique, naïf.

Exorciser les malheurs avec le sourire… C’est le trait d’union entre Jardin secret et la soul music?!
C’est drôle parce que cet album, je ne l’ai pas commencé en me disant "je vais faire un album soul". Je me suis d’abord concentré sur l’écriture des chansons, car je trouve que c’est quelque chose qui devient de plus en plus rare. Il y a plein de titres joliment produits, avec de belles voix, des bons sons, mais j’ai une nostalgie des "belles chansons d’avant".
Je me suis d’abord concentrée sur les compositions, au piano, à chercher de belles mélodies. Après, j’ai travaillé longtemps sur la pré-production avec les musiciens – comme Lester Snell. On a travaillé sur les accords, les structures… Les chansons paraissent très simples, mais les accords sont super compliqués.

Aller enregistrer à Memphis, avec des prises de voix live, c’est aussi votre réaction à un monde qui va trop vite ?
C’est vraiment une sorte de révolte douce. Si tu commences à réfléchir à ce que les gens ou les radios veulent aujourd’hui... Tu ne peux que fonctionner en faisant ce que tu aimes, et en faisant passer le message de cette façon. Moi, qu’est-ce qui me fait plaisir ? C’est d’écrire des chansons, mais aussi de passer du temps avec les musiciens. Ça me nourrit. J’ai donc travaillé avec des gens que je connais depuis longtemps, mais cette fois je voulais aller là où eux travaillent encore souvent, à Memphis. En l’occurrence au studio de Willie Mitchell, qui est une idole de toujours. Le lieu est vraiment pourri ! Il y avait encore le vieux B3 sur lequel a été enregistré I can’t stand the way de Ann Peebles. C’était sale, rien ne fonctionnait, il y avait les vieux vinyles au grenier… c’était vraiment super ! Et puis j’ai demandé beaucoup de conseils à Willie Mitchell. Il nous a expliqué par exemple comment il enregistrait la batterie –directement sur le béton, pas sur un tapis. Quand on a fait les cuivres, il y avait juste un micro au dessus. Pareil quand on a fait les voix, on a testé une demi journée comment placer les micros…

La nostalgie dont vous parlez, c’est celle de l’artisanat…
Quand on commence à faire la promo et à voir l’évolution de ma musique, on risque vite d’être déçu. C’est une sorte de fuite de pouvoir me dire "n’oublions pas ce que c’est que la musique". Ce sont ces moments que je préfère, quand on créé.

Enregistrer dans ces conditions devient rare, presque incongru !
C’est mon luxe. Même si maintenant aller aux Etats-Unis devient de plus en plus pénible. Mais bon, ne parlons pas de ça : ne parlons que du positif ! (rire)

Votre positivisme peut-être perçu comme un excès de naïveté…
Je ne pense pas, parce que d’un autre côté j’agis. Pour pouvoir continuer, il faut que j’aie cette vision-là. Quand enfin je suis en vacances à Amsterdam avec ma famille, après une longue période de travail, et qu’à la première heure on m’appelle en me demandant si je veux aller aider les victimes du Tsunami en Indonésie. Qu’il me faut partir le soir même, laisser les enfants chez des amis etc. Tout ça demande une certaine conviction. A un moment donné, ça me déçoit trop, je vois que les résultats sont parfois minimes… J’avais donc besoin d’y croire, de me dire "mais non, les gens sont bons" ! Et de me dire que je ne suis pas la seule à penser ça. Aujourd’hui on critique tout, on remet tout en question, on vit dans une société individualiste : c’est chacun pour soi ou pour sa petite famille. Parfois on va verser pour les ONG, ça c’est une bonne chose. Mais le travail commence avec toi-même. Comment peux-tu juger une guerre en Afrique, en disant "c’est une bande de sauvages, ils recommencent toujours" ? La seule différence, c’est qu’ici, il n’y a pas de vraie crise économique. Mais les gens sont méfiants, on va juger le musulman en pensant qu’il est peut-être quelque part un peu extrémiste. Il suffit de peu pour qu’on s’entretue nous aussi. La haine, c’est une escalade. Je pensais que la société avait donc plus besoin d’un retour aux sources, aux vraies valeurs de la vie. Qu’est-ce qui est important ? C’est l’amour, être tolérant, le respect d’autrui. On peut le dire via de grands discours. Ma façon à moi, c’est ça. C’est ça, le jardin secret. C’est donc aussi le travail qu’on doit faire sur soi.

Le propos de votre album est donc traditionaliste, voire conservateur ?
Non, je le trouve révolutionnaire ! (rire)

Axelle Red Jardin secret (Virgin) 2006
En tournée en France en janvier 2007 et à la Cigale à Paris du 30 janvier au 10 février 2007