Oxmo Puccino fait du jazz !
Bienvenue au Lipopette Bar, l’antre de Monsieur Puccino alias Black Popaye, où les destins s’entremêlent sur le mode d’un scénario à la Audiard. Ici prend forme la quintessence du rap et du jazz sur une thématique de film noir. Un huit clos d’où émane un groove ciselé sur mesure par le Jazzbastards en ping-pong créatif avec l’orfèvre des mots, Oxmo Puccino.
Rendez-vous au Lipopette Bar
Bienvenue au Lipopette Bar, l’antre de Monsieur Puccino alias Black Popaye, où les destins s’entremêlent sur le mode d’un scénario à la Audiard. Ici prend forme la quintessence du rap et du jazz sur une thématique de film noir. Un huit clos d’où émane un groove ciselé sur mesure par le Jazzbastards en ping-pong créatif avec l’orfèvre des mots, Oxmo Puccino.
RFI Musique : Comment est né le projet ?
Oxmo Puccino : Tout est parti d’une rencontre avec Vincent Taurelle et Vincent Taeger, les jazzmen et co-réalisateurs de l’album. Avec eux, j’ai appris les règles du jazz, les codes, les standards, l’histoire de la musique, la technique. C’était très enrichissant et plein de surprises. Je ne travaillais plus avec des musiques finies et eux avec des textes déjà écrits, mais on avançait ensemble. Je me suis même mis à la contrebasse. On a donc passé trois mois à discuter, à douter, à revoir les habitudes de chacun, jusqu’au premier concert au Bataclan (fabuleux concert donné lors du Bose Blue Note Festival en juin dernier - ndlr). À partir de là, on est sorti de la phase d’improvisation pour finaliser les morceaux en studio.
Ça a été difficile d’adapter ton flow sur des instrumentaux jazz ?
Rythmiquement le jazz est beaucoup plus complexe que le rap, moins fixe. C’est du double temps, du ternaire. J’ai préféré écrire sur les musiques, en même temps qu’elles se dessinaient plutôt que d’arriver avec des textes finis sur ce type d’instrumentaux. Heureusement que ça s’est fait dans ce sens et au final, ça donne du "sur mesure".
Comment t’est venue l’idée du Lipopette Bar?
Je me suis documenté sur les clubs de jazz au début du siècle, les jeux de hasard à rideau fermé, les ambiances de tripots et j’ai mélangé tout ça avec l’ambiance des années 1960, le noir et blanc, les films d’Audiard, Jean Gabin… Musicalement par contre on est resté dans les créneaux du jazz en tirant quelques fois un peu vers la soul et le hip hop, qui est aussi issu du jazz, mais dès qu’on s’éloignait trop du jazz on recommençait.
Tu écoutais du jazz auparavant?
J’ai découvert le jazz en 1988 avec le premier clip de Gangstarr, Just to get a rep. J’ai acheté l’album Step in the area et là j’ai découvert la liste des auteurs des boucles de jazz et des interludes instrumentaux que Dj Premier - le compositeur de Gangstarr - avait samplé. Disons qu’à l’époque il y avait déjà beaucoup d’artistes qui samplaient du jazz mais DJ Premier avait une approche beaucoup plus fouillée du jazz, une science du rythme. C’est lui en quelque sorte qui m’a emmené vers cet album. Aujourd’hui, avec ce projet, j’ai redécouvert Miles Davis, Billie Holiday, John Coltrane, Bob James, Thelonious Monk, que je n’ai pas encore bien saisi. J’ai aussi découvert Lee Morgan, Erik Truffaz, Norah Jones…
C’est aussi l’occasion de voir ton répertoire sous un autre jour ?
Oui, ça déculpe le plaisir de chanter mes anciens titres sur scène version jazz, c’est comme une cure de jouvence... Sur Mama Lova ou L’enfant seul, on leur donne un nouveau souffle avec des nuances instrumentales auxquelles je n’aurais jamais pensé.
Peut-on faire la comparaison avec d’autres groupes de hip hop qui se sont frotté au jazz comme The Roots, mais aussi Rocé et Abd Al Malik plus récemment ?
Chacun sa manière. En ce qui me concerne, j’ai vraiment cherché à réaliser un projet compact, à trouver la symbiose entre les textes et la musique à toutes les phases de compositions et d’écritures. En ce qui concerne The Roots, si on a pensé à eux en composant cet album c’était surtout pour ne pas faire pareil. Les inspirations ont avant tout été cinématographiques, on a construit les musiques comme pour une bande originale. On peut dire que c’est de la musique de narration sur la plupart des morceaux.
Quels sont tes projets à venir ?
En plus de la tournée qui accompagne la sortie de l’album, j’ai un street CD qui sortira dans deux mois. C’est un mélange de mes morceaux préférés, de titres que j’aime mais qui n’ont pas assez été entendus et de quelques inédits. Et puis, j’ai presque terminé d’écrire mon prochain album. À défaut d’avoir des musiciens, je ferai le mélange musiciens/machine, autant que possible et avec encore plus d’exigence dans le choix des instrumentaux.
Oxmo Puccino & the Jazzbastards Lipopette Bar (Blue Note) 2006
En concert le 10 octobre au Café de la Danse à Paris et en tournée en France