Biyouna rêve les yeux ouverts
La France l’a découverte il y a deux ans, dans le film Viva Laldjérie mais Biyouna est, depuis plus de 35 ans, une véritable institution dans son pays, à la fois humoriste, danseuse et comédienne. Cette Algéroise possède aussi un timbre de voix envoûtant qui porte à merveille son deuxième album enchanteur, Blonde dans la Casbah.
Deuxième album pour la chanteuse actrice algéroise
La France l’a découverte il y a deux ans, dans le film Viva Laldjérie mais Biyouna est, depuis plus de 35 ans, une véritable institution dans son pays, à la fois humoriste, danseuse et comédienne. Cette Algéroise possède aussi un timbre de voix envoûtant qui porte à merveille son deuxième album enchanteur, Blonde dans la Casbah.
"J’ai longtemps rêvé d’être en France. Mais je ne suis pas une aventurière, si je ne suis pas invitée je ne sors pas." Heureusement, pour Biyouna comme pour nous, le réalisateur Nadir Moknèche a eu le bon goût de lui faire traverser la Méditerranée. C’était en 1999 pour le film Le Harem de Mme Osmane. Un déclencheur pour l’Algéroise qui se retrouve à chanter sur la bande originale. 7 ans, un album, des dizaines de galas comiques, des sitcoms et un film plus tard, Biyouna revient à la chanson avec Blonde dans la Casbah. Un album né d’un coup de foudre artistique. Olivier Gluzman, manager de Jane Birkin, a craqué lors d’une rencontre. Il lui a offert cet album racé où s’entrecroise pop, chaabi, et chanson française.
Pour le moment réservées au public français (mais elles ne devraient pas tarder à fleurir dans les rues algérienne…), ces compositions se partagent entre français et arabe. "Moi j’aime bien mélanger les cultures, confie la chanteuse. Il y a des découvertes à faire, c’est ça qui me plait. Dans les équipes techniques [des films], il y a tout un mélange. Oh ! Que je me sens bien avec eux ! Il n’y a pas de politique. On est une famille. Si quelqu’un pleure tout le monde verse des larmes. Alors le reste on s’en fout. Entre l’Algérie et la France, nous vivons une grande histoire d’amour… et de haine. Mais cet amour on ne pourra jamais l’enlever. Que vous le vouliez ou pas, on ne se quittera jamais !"
Entre Brigitte Fontaine et Dalida
Biyouna n’a pas sa langue dans sa poche. Une franchise, toujours rieuse, qui lui a valu quelques déboires avec les caciques de la télévision algérienne. Mais aujourd’hui, tout est rentré dans l’ordre, assure la chanteuse :"On est libre de dire tout ce qu’on veut." Biyouna s’est surtout sentie libre d’explorer, sur cet album, tous les pans de sa personnalité. Elle, la comique, s’est laissé aller au tragique comme sur la reprise du succès de Patricia Carli, Demain tu te maries. Une de ces tragédies intemporelles qui tireront encore des larmes dans 50 ans : une maîtresse folle amoureuse renvoie son amant qui doit convoler le lendemain… avec une autre. Une interprétation bouleversante sur une orchestration splendide de Joseph Racaille. Malgré la barrière de la langue, Echemaa, réserve les mêmes sensations : "cette bougie qui m’illumine mais qui pleure des larmes de cire."
Olivier Gluzman et Biyouna ont eu le bon goût de bien s’entourer. Au gré des collaborations, l’album oscille entre fanfare, violons et piano. Si on pleure, on rit aussi comme sur ce Blonde platine dans la Casbah chaloupée. Par simples échanges de mail, Jacques Duvall a trouvé les mots pour rendre hommage à la mère de la chanteuse, décédée à 84 ans. Un bijou d’humour et de tendresse.
"Merci mon Dieu, pour ce que je n’ai pas" !
Jamais avare d’un contrepied, Biyouna s’offre trois duos, tous aux antipodes les uns des autres. On retiendra d’abord le plus surprenant, celui avec Didier Wampas, découvert grâce à Dolorès, la coiffeuse du film Viva Laldjérie. L’occasion de se livrer à un sommet d’humour pince sans rire dans Merci mon Dieu (pour tout c’ que je n’ai pas). "Moi quand je fais de l’humour, je sais où aller. Sympathiquement, j’arrive à proposer mon message sans blesser les autres. C’est une belle stratégie comme le disait Coluche. Pourquoi y-a t'il des gens qui ont tout et d’autres rien, rien, rien. Je trouve ça injuste. Avant d’arriver ici, il y avait un clochard dans la rue [16e arrondissement de Paris, ndr] Je me dis mon Dieu, quand même, cet homme là, à un moment il a été un bébé, il avait une maman, des parents, pourquoi il se retrouve dehors, livré à lui-même avec personne pour le protégé." A 54 ans, Biyouna pense avant tout comme une maman.
Et comme une midinette parfois aussi. Mais attention avec quelle classe : "Je suis fan de Christophe depuis ma plus tendre jeunesse. Quand j’étais au lycée, je me faisais attraper par la surveillante générale quand je découpais Salut les copains pour classer ses chansons." Lors d’une interview après son premier album, Raid Zone, elle confie qu’elle rêverait de le rencontrer. Elle a, aujourd’hui, été triplement exaucée : non seulement elle l’a vue à plusieurs reprises, mais, il l’a invitée à chanter une de ses œuvres. La Man, duo crépusculaire bouleversant. "Je l’ai dit à mon mari, explique Biyouna tout sourire. Je lui ai dit : écoute j’ai rencontré Christophe, si je rêve attention, surtout ne me réveille pas !" La nuit ne fait que commencer pour l’Algéroise. A partir de novembre, elle jouera Electre, au théâtre, en compagnie de Jane Birkin. Et peut être en mai à Cannes. Délice Paloma, le troisième film de Nadir Moknèche (dont elle tient la vedette) est pressenti pour participer au Festival…
Biyouna Blonde dans la Casbah (Naïve) 2006