Muriel Vandenbossche, attachée de presse

Vandenbossche. Un nom qui ne s'oublie pas. Une femme qui sait surtout y faire en matière de promo. Au service de pointures jazz et world. Attachée à faire valoir les talents et les tendances auprès des gens de presse. Bercée par le son des années 70, Muriel Vandenbossche est engagée dans ce métier depuis bientôt vingt ans. Portrait.

Les artistes me fascinent

Vandenbossche. Un nom qui ne s'oublie pas. Une femme qui sait surtout y faire en matière de promo. Au service de pointures jazz et world. Attachée à faire valoir les talents et les tendances auprès des gens de presse. Bercée par le son des années 70, Muriel Vandenbossche est engagée dans ce métier depuis bientôt vingt ans. Portrait.

Muriel y est venue un matin de stage. Elle y a pris goût. Elle y est restée pour toujours. "C'est un métier que je ne connaissais pas quand j'étais plus jeune. Par contre, je savais que j'aurais du mal à vendre des chaussettes ou des maisons". Père fonctionnaire, mère libraire. Muriel Vandenbossche a très vite été happée par les lumières du monde des arts et de la culture dans sa prime jeunesse. "Le milieu des artistes me fascinait". Elle évoque aussi son caractère trempé. "Je n'ai jamais voulu faire comme tout le monde". Question de tempérament. "Ce qui est sûr, c'est que j'ai eu la chance à 14 ans de fréquenter des gens plus âgés". Des amis qui lui font découvrir le rock des années 70, pendant que ses copines jouent aux minettes complètement fada de Patrick Juvet. "J'étais donc complètement déconnectée de mon milieu d'adolescente".

Parcours hors norme

En la prenant sous son aile, cette jeunesse plus âgée influe directement sur ses centres d'intérêt, lui fait gagner dix ans de vie, change sa vision du monde: "C'était après 68. Nous étions curieux de tout. Avec une telle soif de liberté. Un esprit de contestation. On lisait Sartre. On était révolté" Et de deux choses l'une : "Ou on rentrait dans le moule, ou on était rebelle. Moi je faisais partie des rebelles". Normal ensuite de vouloir tracer sa vie d'une manière peu linéaire. Muriel s'inventera un parcours hors norme, sans trop de mal. "Je voulais faire ce que les autres ne font pas. Je voulais être à part. Même ma mère me disait "toi t'es une sauvage". C'est-à-dire que je suis ailleurs. Je n'étais pas comme les autres gamines". Déconnexion à caractère vital. "De toutes façons, j'étais comme ça. Toujours à me poser des questions que les autres ne se posaient pas. Mais ça, je crois que c'est dans les gènes. On naît comme ça. On naît d'un seul coup "décalé". Le principal, c'est de se connaître et de le savoir". De là à finir artiste elle-même...

Muriel a pratiqué assidûment le violon durant quelques années. Mais elle ne s'est pas trouvée assez douée pour prétendre à une partition sur scène. "Trop de respect pour les artistes pour être musicienne moi-même. J'ai énormément de respect pour le talent des autres." Elle a donc opté pour un métier qui la rapproche de ceux qu'elle aime. Attachée de presse. Un métier où elle est amenée à promouvoir le talent auprès des gens de presse. Boulot pas toujours évident. À vouloir toujours convaincre, les journalistes par exemple, on finit parfois par les détester. Leur mépris, l’arrogance, leur mauvaise foi. Ce qui n’a jamais été son cas. Sans doute parce qu’elle fait ce métier par amour. "Si je le faisais uniquement par conscience professionnelle, je serais la plus feignasse des feignasses. Par contre, le faire dans la passion, c'est autre chose."

Une affaire de conviction

Avoir à défendre des artistes, "qui ne passent pas en radio, qui ne passent pas en télé", est effectivement de l'ordre du sacerdoce. "On se bat tout le temps pour faire entendre autre chose que les dix premiers du Top 50, les dix premiers qui passent partout et qui trustent tout. C'est vrai que c'est du militantisme. Ce qui correspond vraiment avec ma nature". Elle souligne à nouveau l'esprit de contradiction qui l'anime, résumant ainsi son rapport avec les journalistes : "Vous voulez me faire entendre ça à la radio, moi je veux vous faire découvrir ça" à la place. Affaire de conviction et de persuasion. Affaire de patience et de persévérance également. Une nécessité pour une personne qui dit être arrivée dans ce métier par hasard. "J'ai plutôt fait un cursus m'amenant dans l'animation culturelle". Elle, qui, petite, rêvait d’œuvrer dans la marqueterie, s’est retrouvée à programmer des spectacles pour enfants dans un centre de jeunes. Très vite rattrapée par l’ennui, elle a vu un jour passer une proposition de stage. Un stage d'attaché de presse managé par un ami de ses amis. "Je me suis dit que j'allais le faire, sans savoir vraiment de quoi il s'agissait. Puis ça m'a passionné". À la fin dudit stage, son directeur lui propose une collaboration saisonnière dans son agence. Elle s’y engage, se laisse prendre au jeu et décide de se mettre à son compte.

Dépôt de dossiers, démarchages en coulisses, contact avec les organisations de festival. Et bingo ! Les saisons musicales de Royaumont répondent "oui" à son "appel". Mais par peur de ne pas y arriver seule "et sans références", elle retourne solliciter son ancien patron d'agence: "Je lui ai dit : "écoute ! Je t'amène de quoi financer mon poste et toi tu me prends dans ta boîte". Il m'a dit ok. On est allé tous les deux au rendez-vous de Royaumont. On a eu ces saisons musicales qui représentaient un énorme budget. Pendant ce temps-là, ce mec m'a formé. Et ça n'a jamais arrêté de me passionner depuis". Coup de bol pour la suite ! Le New Morning, lieu mythique où sévissent les géants du jazz et de la world, du tout Paris, l'embauche pour soigner son image. Ont suivi les maisons de disques et les contrats de tournée. Avec des noms aussi illustres aujourd'hui que ceux de Sonny Rollins, Pat Metheny, Dianne Reeves, Jacky Terrasson, Richard Bona, Yusef Lateef, Belmondo ou Ray Barreto, pour ne citer que ceux-là.

À dire vrai, ce métier, supposé ingrat par bien des gens, ne lui a offert que du bonheur depuis ses débuts. Du jour au lendemain, le "milieu", qui fonctionne très souvent par le bouche à oreille, a loué ses services. On salue sa rigueur, on rumine ses intuitions, on lui envie même son indépendance. Artistes, journalistes comme producteurs, tous signalent sa disponibilité, son savoir-faire et sa pertinence stratégique. Un succès qu'elle n'attribue pas au hasard. "Je pense que la chance vient avec le travail. Ça s'est bien passé parce j'ai bossé grave". Couchée tôt, vie de famille mise entre guillemets, sensation d’extrême solitude par moment, tension et surtension sur fond de planning chargé. "On ne compte pas ses heures. Je n'ai pas eu de vacances pendant des années. Ce que j'ai, je le mérite". D'autant qu'elle choisit elle-même ses artistes et refuse autant que possible les contrats alimentaires. "J'ai toujours pris des sorties d'albums qui me plaisaient. Des albums que je considérais avant tout comme "vraiment" bien". Affaire de conviction, disait-on. Cela se lit dans son regard, dans ses deux petits yeux, qui vous percent jusqu’au fond de l’âme, d’un air mi-rieur et mi-sérieux à la fois.