Fred Robbe, directeur de salle

On lui parle musique et concert, il répond "intérêt public" et "projet pédagogique". Frédéric Robbe, 38 ans, dirige l’Astrolabe, salle de concert d’Orléans, depuis 7 ans. Un espace de 600 places qui accueille plus de 20000 personnes chaque année. Ce directeur militant a un credo : pour être connu et reconnu, un artiste doit passer par la scène.

"Nos lieux ont réellement un sens"

On lui parle musique et concert, il répond "intérêt public" et "projet pédagogique". Frédéric Robbe, 38 ans, dirige l’Astrolabe, salle de concert d’Orléans, depuis 7 ans. Un espace de 600 places qui accueille plus de 20000 personnes chaque année. Ce directeur militant a un credo : pour être connu et reconnu, un artiste doit passer par la scène.

"Nous ne sommes pas dans la logique : tu viens, tu bouffes ton concert et tu te casses. Nous ne sommes pas des épiciers." De son passé rock’n’roll, Frédéric Robbe a gardé un parlé imagé mais surtout une mentalité de militant : "On essaie de donner un sens à  notre programmation, qu’elle soit pointue, éclectique, inventive, populaire sans forcément tomber dans la grosse variété. Nous voulons faire découvrir au public des artistes qui ne passent pas sur les gros médias traditionnels. Il y en a beaucoup qui ont pignon sur rue dans des salles comme la nôtre mais qu’on entend rarement à la télévision. Je pense à des mecs comme Dominique A ou Philippe Katerine." 

Physique de tonneau, voix éraillée, Fred Robbe est aussi à l’aise accoudé au comptoir d’un rade que face à un parterre d’élus politiques. Ça tombe bien, c’est son rôle : une fonction multiple de "coordination, direction artistique, gestion, recherche de financement et lien avec les collectivités territoriales".  Depuis 1999, date de son inauguration, il dirige l’Astrolabe : deux salles, dont une de 600 places, 10 salariés avec un budget annuel de 900000 euros assurés à 60 % par des financements public. La mairie d’Orléans apporte la plus grosse contribution (360000 euros) dans le cadre d’une rémunération de service public. Autrement dit, lui et son équipe ne doivent pas juste se contenter de faire du chiffre : "une salle de concert, c’est un projet d’intérêt général. Nos missions vont très loin : de l’accompagnement artistique jusqu’à la prévention sur les risques auditifs."

"Nous voulons générer une scène"

La phase de programmation n’est que la partie émergée du travail de l’Antirouille, l’association qui gère la salle et dont Fred est le directeur. Aux soixante concerts par an, s’ajoutent chaque mois, deux cafés culturels. La structure est également dédiée à des "filages" : quelques jours où des groupes peuvent roder leur spectacle sur scène. Mais la mission qui lui tient à cœur, c’est l’accompagnement de jeunes formations peu rompues à l’art du concert : "C’est dur aujourd’hui, parce qu’il y a de moins en moins de possibilités de jouer dans les bars. Nous leur donnons les moyens techniques et "intellectuels" pour que leurs compositions puissent trouver un équilibre dans une prestation en public."

En partenariat avec le pôle musique actuelle de la région Centre, la Fracama, les groupes peuvent également bénéficier de formations administratives très poussées. Un domaine peu glamour mais qui permet à des groupes encore amateurs de se structurer. Membre de la fédération des Salles de Musiques Actuelles (la Fédurock), l'Astrolabe se situe aussi au cœur d'un maillage associatif plutôt bien étendu sur la région. "La logique de réseau est importante, affirme Fred qui veut encore repousser cette frontière. Il faut que ces groupes ne jouent pas seulement dans la salle d’Orléans mais aussi dans celle de Dijon, Poitiers… On voudrait presque reprendre la main par rapport aux maisons de disques pour être les premiers à allumer des mèches sur des groupes. Nous voulons générer une scène."

L’aubaine des nouvelles technologies

Les nouvelles technologies tant décriées par les majors pourraient d’ailleurs apporter de l’eau à son moulin. "On observe une mutation hallucinante. Avec Internet, le public va maintenant pouvoir porter ses groupes sur des supports virtuels et ensuite ils vont rentrer dans la chaîne des concerts et maisons de disques. On a tout intérêt à aller dans ce sens-là. Que les groupes ne soient plus des produits conçus pour êtres diffusés à la télé mais de vrais parcours d’artistes issus de la scène. Des gars comme  -M- ou Bénabar, leur réputation ils l’ont faite, au départ, en concert."

Comme beaucoup dans cette profession, il a d’abord débuté par désœuvrement. S’ennuyant à la fac de Dijon, il a organisé un concert puis succès aidant, le rythme est passé à une vingtaine par an. C’est d’ailleurs cette expérience qui convaincra la mairie d’Orléans de l’enrôler. Si des formations scolaires de qualité existent maintenant, rien ne remplacera "la passion de la musique et surtout l’expérience de terrain. Ce qu’il faut, c’est se créer un réseau de salles, de tourneurs et apprendre petit à petit. Dans notre métier, la logique de transmission de savoir est fondamentale." Directeur de salle de concert, une fonction qui demande avant tout selon Fred Robbe : "une extrême rigueur dans la méthode de travail. Mais le plus délicat, c’est la gestion des ressources humaines. Je n’étais pas préparé à encadrer 10 personnes, d’autant que ce sont des gens qui ont une vraie personnalité, ils viennent souvent du rock et du punk !"